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« Il aurait fallu trouver une date dans la programmation pour organiser une deuxième soirée » Point de presse avec Gad Elmaleh quelques heures avant le spectacle
Inutile de s'attarder longuement en introductions et préambules, même ceux qui n'ont jamais entendu parler de lui se sont arraché les billets. «In Gad we trust», disaient des slogans, pour pousser l'hystérie jusqu'à sa dernière limite. Quelques heures avant le spectacle, dans une ambiance très officielle, on a eu droit à un point de presse, rapide et net, où Messi(r)e Gad, qui est le sujet de discussion de tous les Tunisiens et les touristes, a répondu aux questions des journalistes. Il nous a feintés trois fois de suite, lui-même n'arrête pas de revenir là-dessus, si bien que son spectacle à Carthage était un vrai événement pour lui. «Tout le monde me dit que c'est un événement pour eux, dit-il, mais ça l'est aussi pour moi. J'ai eu avec la Tunisie plusieurs rendez-vous manqués. Je suis très content, par l'enthousiasme des gens, le nombre de spectateurs ; j'ai appris qu'il y a eu plus de gens qui ont eu des billets que ceux qui n'en ont pas trouvé... Il aurait fallu trouver une date dans la programmation pour organiser une deuxième soirée... Je suis fier de cette première en Tunisie, tous les passagers dans l'avion tout à l'heure voulaient venir... Toutes les fois sont une première fois, c'est toujours une nouvelle destination, de nouvelles gens...» Toute la Tunisie (dont la majorité a désespéré vers la fin) se demandait comment serait Gad sur la scène de Carthage, mais il faut savoir que même Gad ne savait pas à quoi s'attendre, si ce serait difficile de tenir une heure et demie devant un public dont il n'a nulle idée. «Ce qu'il y a de plus difficile, c'est quand la famille est dans le public, et qu'elle va me juger. Pour ce soir, je ne sais pas du tout, je vais découvrir ; Jamel [Debbouze] n'a rien voulu me dire à part : ''Tu vas voir'' Je ne sais pas ce que ça signifie, mais je pense qu'en général c'est positif.» Pourtant, Gad a vécu une grande histoire avec la Tunisie. Il revient dessus en disant : «Le premier film où j'ai joué un premier rôle, c'était ''Salut cousin !'' de Merzak Alouèche, et il avait eu le Tanit d'Or aux Journées Cinématographiques de Carthage... Une première consécration, un premier prix à Carthage pour mon premier grand rôle.» Des débuts pas très évidents, l'occasion est pour les journalistes de remonter la pente avec Gad Elmaleh, vers les origines, qu'il nous parle de cet enfant qu'il était, et qui rêvait d'avoir de la popularité, il n'a pas de honte à le dire. Croyant à son rêve, il a tout fait pour y parvenir, passant même par l'immigration. «Ce qui n'est pas évident, et qu'on oublie souvent, c'est que je suis vraiment un immigré. J'ai fait partie de ce mouvement qu'on connaît au Maghreb, sauf que j'ai fait l'artiste. J'ai fait la queue comme tout le monde, j'ai longuement voyagé, et je suis plus de l'école de ceux qui disent ''Ferme-la ! tu ne vas pas l'avoir !'' que ''Allez, on est là, regarde-nous !...'' J'ai été éduqué dans les valeurs familiales, avec des principes, et je vis de ça. Il y a toujours une pointe de moi dans mes spectacles, que ce soit Coco ou Abderrazak, ce sont tous des personnages qui font partie de moi. Je crois qu'il faut s'ouvrir le maximum et donner ce qu'on est.» Il a été au Canada, et puis a émigré en France, où il a suivi les cours Florent, et a gravi petit à petit les échelons. Tout le monde part de rien, et ceux qui se construisent eux-mêmes sont ceux qui ont toujours le plus de mérite. Il y a dix ans, il avait été invité par Michel Drucker, mais il avait préféré refuser. «Je me suis dit que je n'étais pas à la hauteur de son tapis rouge, et de m'asseoir là où de grands acteurs ont été avant moi. Qu'aurais-je eu à dire ? Et j'ai bien fait de décliner son invitation, parce que je n'étais pas prêt. Maintenant, je résiste plus, je suis le premier à venir ! De toute façon, les passages à la télé font partie de mon métier.» Et qu'il l'ait voulu ou non, Gad Elmaleh a été classé parmi les humoristes issus de l'immigration ; il est content de former un groupe particulier avec eux, il est très ami avec Jamel Debbouze, mais ce n'est sûrement pas parce qu'ils sont tous deux Marocains. «Quant à Arthur, dit-il, je l'ai connu sur les plateaux-télé, mais ce n'est pas vraiment Casablanca qui nous relie. J'admire beaucoup Arthur pour le courage qu'il a eu à aller sur scène.» Toutefois, c'est toujours dans le domaine de l'art que les Maghrébins se sont illustrés, jusqu'à ce que, à la grande surprise des Français et des Maghrébins, une Française d'origine marocaine soit nommée ministre de la Justice. «J'étais vraiment très fier de Rachida Dati, j'avais la preuve que nous, les Maghrébins, pouvions aussi participer à la vie politique, et pas seulement à l'art. Et également content pour cet homme qui a fait la différence, alors qu'on le descendait (Sarkozy ) avant même qu'il ne soit élu.» «On n'est jamais loin de la politique quand on est auteur, c'est juste qu'on prend les choses différemment. Pour ma part, je m'attaque à la source des problèmes, je ne fais pas de chauvinisme ; par exemple, concernant le personnage de Chouchou, je me suis attaqué à l'intolérance par rapport aux homosexuels, et à la montée de l'extrémisme. C'est tout simplement un angle d'attaque.» Il ne faut pas s'attendre à ce que Gad Elmaleh se mette à faire de la politique, tenons-nous en donc à ses one-man-shows, ses films et sa musique. «J'essaie de faire de tout mon mieux ce métier qui s'offre à moi avec différentes casquettes. J'ai été maître de cérémonie aux César, je fais du théâtre, du cinéma, de la télé... tout. Auparavant, il y avait des catégories, le comédien ne pouvait pas animer, l'animateur ne pouvait pas faire du théâtre ; mais aujourd'hui c'est en train de changer, heureusement ; il n'y a plus de barrières.» Lui, qui n'a «pas fait d'études» (sic.), est fier de sa distinction en tant que Chevalier des Arts et des Lettres. Même s'il préfère le théâtre («Avant, j'avais peur de répondre quand on me demandait ce que je préférais, je ne voulais pas rebuter les metteurs en scène par exemple, mais aujourd'hui je n'ai pas de problème à dire que c'est la scène que je préfère. Monter sur les planches et incarner des personnages, j'adore ça.»), et un jour il produira un album, peut-être, car l'envie le démange déjà, mais ce sera toujours dans un contexte comique. Et lui, amoureux de la musique, en se retrouvant avec le public tunisien qui est toujours prêt à pousser la chansonnette, il pouvait être sûr de faire exploser le théâtre.