A l'instar du pouvoir judiciaire, le secteur des médias doit s'auto-organiser Tentative d'inféodation des médias
La Commission des instances constitutionnelles au sein de l'Assemblée Nationale Constituante (ANC) vient d'approuver un projet de création d'une Instance indépendante des médias. Ce projet confortera-t-il dans leurs attentes et leurs désirs d'indépendance les professionnels du secteur ? Verra-t-on au grand dam des hommes des médias la création d'un nouveau ministère de l'information sous couvert d'instance de régulation ? De quoi éveiller les suspicions les plus alarmantes chez les gens du secteur concerné.
Ce projet contient trois articles. L'article premier précise qu'il s'agit d'une « instance publique indépendante qui veille à l'organisation du secteur des médias, son réajustement et son développement, garantit la liberté d'expression et d'information, le droit d'accès à l'information et l'instauration d'un paysage médiatique pluraliste».
L'instance se compose de neuf membres indépendants et neutres, témoignant de compétence, d'expérience et d'intégrité, et qui sont élus par le pouvoir législatif pour un mandat de cinq ans non-renouvelable, selon l'article 2. Enfin l'article 3 stipule que « cette instance jouit de la personnalité juridique et de l'autonomie financière et administrative, son statut fixe sa composition, son organisation et son fonctionnement ». Hichem Snoussi, membre de l'Instance Nationale de Réforme de l'Information et de la Communication (INRIC) constate que « le projet concerne l'information dans sa totalité, alors que la régulation ne concerne que les médias audiovisuels. Pour la presse écrite, c'est l'auto-régulation qui prévaut. Dans l'audiovisuel, il faut passer par des autorisations préalables. Pour la presse écrite, le champ est large plus et il y a plus de marge de liberté. La confusion entre régulation et autorégulation sera à l'origine de la création d'un nouveau ministère de l'information. En plus la désignation des membres de l'instance par l'Assemblée Nationale Constituante (ANC) va mener au partage sur des bases politiques. Nous savons comment se forment les majorités au sein de l'ANC, alors que tout ce qui se rapporte à la compétence et à la valeur ne doit pas être soumis au vote. En faisant une petite comparaison avec l'Instance de Régulation du décret –loi N°116, on remarque que celle-ci englobe tous les intervenants. Les différentes structures cohabitent où l'on retrouve, les journalistes, les Directeurs, les juges...Il y a également des contre-pouvoirs. Cela n'empêche que nous traversons une période accompagnée de doutes qui ne font qu'augmenter, générés par l'attitude du Gouvernement, traduite par des nominations fortement partisanes. Historiquement, les instances de régulation, ont été créées pour limiter l'intervention du pouvoir exécutif et permettre une plus grande indépendance aux entreprises audio-visuelles. Un autre fait alimente les craintes : la commission d'octroi de la carte de presse professionnelle devait être présidée par un juge, pourquoi l'est-elle par le responsable de l'Information au Premier ministère ? ».
Moncef Ben Mrad, n'y va pas par le dos de la cuillère. « Ce n'est ni à l'ANC, ni au Gouvernement d'organiser le secteur de l'Information ». Il déplore que l'ANC n'ait pas écouté les responsables des journaux qu'ils soient politiques ou économiques... « Ils sont les plus habilités à se prononcer sur les problèmes qui touchent au secteur. Au-delà des textes, le gros problème est celui de l'application et de la pratique. Beaucoup de réticences existent au niveau de la profession. Des menaces économiques sérieuses se posent. Le Gouvernement n'a pris aucune initiative qui puisse soutenir la presse écrite et pourtant, elle fait travailler des milliers de personnes. Le secteur connaît des problèmes énormes. C'est la presse indépendante qui fait le pluralisme et non les partis politiques. Des menaces sérieuses existent. Certains journaux se sont effondrés. D'autres cherchent des financements louches provenant d'hommes d'affaires véreux. Il faut que tous les membres de la profession débattent des problèmes du secteur. Ce n'est pas à l'ANC, ni au Gouvernement de décider pour le secteur. C'est au secteur lui-même de prendre les décisions. La discordance réside en la vision qu'a le pouvoir public de l'information, une approche uniforme au lieu d'être plurielle en mesure de refléter toutes les opinions et en tenir compte. Une télévision est envahie par la douane, des journalistes sont violentés et malmenés... Cela pose beaucoup de questions sur ce qu'attend le Gouvernement. Ça ne veut pas dire que tous les journaux seront contre le pouvoir. Des journaux le soutiendront, d'autres s'y opposeront. L'essentiel est d'assurer la coexistence entre les deux. Je suis contre toute intervention, ni de l'ANC ni d'aucune autre institution ». A l'instar du pouvoir judicaire, le secteur de l'information doit s'auto-organiser.
Le projet de l'instance indépendante des médias élaboré au sein la commission des instances constitutionnelles et qui sera soumis au débat en plénière de l'assemblée nationale constituante, comprend trois articles. L'article premier stipule qu'une instance publique indépendante veille à l'organisation du secteur des médias, son réajustement et son développement, garantit la liberté d'expression, et d'information, le droit à l'accès à l'information, et l'instauration d'un paysage médiatique pluraliste. L'instance se compose de neuf membres indépendants et neutres, témoignant de compétence, d'expérience et d'intégrité, et qui sont élus par le pouvoir législatif pour un mandat de cinq ans non-renouvelable, indique l'article 2. Cette instance jouit de la personnalité juridique et de l'autonomie financière et administrative, son statut fixe sa composition, son organisation et son fonctionnement, conclut l'article 3. Ce texte ne précise pas si cette instance de régulation que tout le monde appelle de ses vœux concerne les médias audio-visuels, à l'instar du CSA français (Conseil supérieur de l'audiovisuel), ou si elle est vouée à couvrir l'ensemble du paysage médiatique.