« Etre là » : effectivement, il faut que les femmes artistes soient là pour qu'en général les acquis de la femme depuis cinquante ans puissent perdurer et son statut puisse être à l'égal de l'homme socialement, politiquement, culturellement et juridiquement. « Etre là » : une grande exposition collective qui a regroupé environ trente cinq femmes artistes dont nous pouvons citer : Fadoua Dagdoug, Dalel Tangour, Patricia Triki, Marianne Catzaras, Faten Rouissi, Sadika Keskes, Hela Briki, Soundes Blah, Sana Tamzini, Rim Temimi, Nadia Zouari, Ymen Berhouma, Ymen Chetouan, Mouna Jemal, Sonia Kallel, Souad Mani, Mouna Belhaj, Saoussen Ben Haj Hassine, Héla Lamine, Rania Werda, Houda Mhiri Ghorbel, Rabaa Skik, Leila Rokbani, Lamia Guemara, Rachida Amara, Héla Ammar, Leila Salmaoui, Houda Agili, B'chira Triki, Khaoula Dridi et Asma Kouraichi. Ces femmes pour la plupart, connues pour leurs activités culturelles intenses ne rechignent pas dans cette période d'incertitude, d'instabilité à affirmer des positions fermes quant à leurs attitudes et à leurs promptitudes à jouer leur rôle là où leurs intérêts et droits sont menacés. Cette exposition est située au Centre Culturel de Hammamet présentant des œuvres de différentes techniques de peinture, photographie, installation, sculpture, céramique. Il s'agit d'une sorte de mosaïque de différentes approches et démarches et de diverses tendances picturales. « Etre là », une exposition qui témoignage sur les dangers qui menacent la femme et la société en Tunisie, dans la mesure où celle-ci est aussi comme le disait Aragon, « la femme est l'avenir de l'homme »...de l'humanité. Déjà le danger qui guette la liberté de la femme se concrétise aujourd'hui par l'action menée par un procureur de la République contre une artiste de renom, Nadia Jelassi. En effet, cette dernière a comparu devant le juge d'instruction le 28 du mois courant pour blasphème à propos de son œuvre exposée à El Abdelliya (La Marsa), en Juin 2012. Va-t- on mettre l'artiste en prison pour faute...de liberté d'expression ? En réalité, dans cette exposition, on sent beaucoup la peur, le danger et la violence que toutes les femmes tunisiennes vivent aujourd'hui en Tunisie et que ces trente- cinq artistes donnent à voir à travers leurs œuvres. On peut remarquer aussi que ces femmes artistes témoignent de l'agression de certains propos masculins salafistes, proférés par des jeunes et des moins jeunes barbus. Cette exposition importante devrait faire le tour du pays tant il est vrai qu'elle gagne à être visitée par un grand nombre de Tunisiens et de Tunisiennes sur le territoire. La philosophe Rachida Triki a très pertinemment exprimé dans une introduction l'importance de cette exposition lorsqu'elle dit : « encore et toujours présentes, les femmes créatrices sont porteuses d'espoir et gardiennes de mémoire. En Tunisie elles sont de plus en plus innovantes dans le domaine des arts plastiques et visuels, bravant les obstacles et les violences comme autant d'accidents qui nourrissent le désir de faire pour mieux exister. Héritières des figures pionnières qui ont réussi à s'imposer par leur talent dans l'histoire de la scène artistique locale, mais ancrées, plus que jamais dans leur présent, elles gardent cette force de caractère qu'anime la passion créatrice. Grâce à leur détermination, les artistes contemporaines sont désormais visibles sur la scène nationale, voire internationale. Elles se sont imposées lentement mais sûrement par la subtilité de leurs démarches. Qu'elles aient été dans des écoles des beaux arts, comme nombre d'entre elles, qu'elles aient fréquenté des ateliers d'artistes ou qu'elles se soient tout simplement auto forgées, ces femmes artistes surprennent par la diversité de leurs œuvres.... ». Karima REFAI (Chercheur et enseignante à l'I.S.B.A Nabeul)