La sécurisation des citoyens, des forces politiques et sociales, et des partenaires étrangers, sur l'avenir de la transition démocratique en Tunisie, objectif initial du remaniement ministériel, est loin d'avoir été assurée après la formation du nouveau gouvernement par le dirigeant nahdhaoui, Ali Laâraydh. Malgré les apparences d'innovation dans la nouvelle équipe gouvernementale, l'incertitude persiste et reste à son plus haut niveau. Les premières réactions des partis politiques de l'opposition et des commentateurs indépendants vont, toutes, dans ce sens. Non pas que cette fois ci, les développements de la situation sont imprévisibles, mais parce que les tunisiens, toutes catégories confondues, ne savent pas lire l'avenir, comme les autres peuples arabes, du reste. Au beau milieu de l'euphorie générale suscitée en Tunisie, par le triomphe de la révolution tunisienne, le 14 janvier 2011, et l'extension de cette flamme révolutionnaire à d'autres pays arabes, et alors que les diverses forces s'étaient réunies pour préparer les premières élections générales démocratiques dans le pays, tous les pronostics des acteurs politiques et autres analystes accordaient la victoire au centre gauche, dans cette consultation électorale. Seuls, les israéliens avaient exprimé leur crainte de voir les révolutions arabes engendrer des régimes er des gouvernements islamistes. Déjà, en présentant son gouvernement, Ali Laâraydh a laissé planer le doute à propos de la durée assignée à sa mission, déclarant en substance ‘'qu'elle s'étalera probablement jusqu'à la fin de l'année en cours, c'est-à-dire jusqu'à la fin de 2013, après l'organisation des élections législatives et présidentielles au mois d'octobre ou de novembre.'' Rien n'est fixé avec la précision et la clarté nécessaires, au moment où l'accélération du processus de transition démocratique, à travers l'achèvement rapide de la rédaction de la nouvelle constitution et l'organisation, au plus vite, des prochaines élections générales, est la principale revendication de l'opposition politique, ainsi que de la majorité écrasante des tunisiens, exaspérés de vivre dans l'instabilité totale et son lot d'insécurité générale. Le nouveau chef du gouvernement a indiqué qu'il appartient à l'Assemblée nationale constituante d'en décider, alors que le premier et le dernier mot appartient aux partis politiques de la coalition gouvernementale qui détiennent la majorité dans l'Assemblée constituante, donc, par ricochet au gouvernement. A la lumière de tout ce qui s'était passé avec le gouvernement précédent de Hamadi Jébali, la nouvelle équipe gouvernementale peut exercer toutes les pressions qu'elle désire sur les dirigeants des partis de la coalition gouvernementale, en particulier le principal parti de cette coalition, le mouvement Ennahdha qui jouera vraiment son avenir en déclenchant une nouvelle crise gouvernementale. Neutralité formelle L'autre facteur d'incertitude a trait à la neutralité des ministères de souveraineté et de l'administration. Le premier aspect semble avoir été réglé à travers la nomination de personnalités apolitiques à la tête de ces ministères tandis que la question de la neutralité reste posée au niveau de l'administration qui a été noyautée, selon l'opposition, par des hauts fonctionnaires inféodés à Ennahdha, sous le précédent gouvernement dirigé par son secrétaire général Hamadi Jébali. L'opposition et certains partenaires d'Ennahdha réclament l'annulation de la nomination de ces personnes inféodées à Ennahdha à des hauts postes administratifs (gouverneurs, délégués, directeurs généraux, PDG) et la création d'un comité collégial élargi qui supervisera à l'avenir les nominations aux hautes fonctions. S'agissant également de la neutralité des ministères de souveraineté, beaucoup d'analystes estiment qu'elle est une neutralité formelle, car l'indépendance politique des titulaires ne signifie rien dans un gouvernement où le pouvoir de décision, du moins pour les questions cruciales, est détenu par le chef du gouvernement , du moment qu'il est issu du parti bénéficiant, à lui seul, de la majorité à l'Assemblée constituante. C'est dire que le chef du gouvernement peut révoquer, à tout moment, un ministre qui va à l'opposé de son point de vue, dans les situations critiques. Sur un autre plan, des commentateurs n'ont pas vu, non plus, dans le nouveau gouvernement, des sommités et des personnalités de grande envergure, dans le domaine économique, devenu aussi important, voire plus important que le domaine politique.