«Poétique du corps et du genre dans la littérature et le cinéma maghrébins de langue française» tel est l'intitulé de la journée d'études qui s'est tenue le 15 mars 2013 à la Faculté des Sciences Humaines et Sociales de Tunis, département de français en partenariat avec l'Université de Mannheim, département de littératures romanes, en présence d'un grand public. A l'initiative de l'universitaire Sonia Fitouri, cette journée d'études germano-tunisienne s'inscrit dans le cadre de la coopération universitaire qui donnera lieu à d'autres projets de recherche. La séance plénière a été inaugurée par deux allocutions accordées respectivement par M. Noureddine Kridis, doyen de la faculté des Sciences Humaines et Sociales de Tunis et la directrice du département de français, Mme Amel Fakhfakh. Répartie en trois séances modérées par les professeurs Sonia Fitouri, Jamil Chaker et l'Allemande Claudia Gronemann et clôturée par une table ronde, cette journée avait pour objectif la mise au clair de la notion du genre ou encore gender comme concept et outil socio-intellectuel dans la littérature maghrébine d'expression française. Volontiers ou non nombre d'auteurs francophones et, plus précisément, les maghrébins laissent voir dans leurs écrits les rapports à la fois subtils et complexes entre homme-femme et masculin-féminin avec tous ce que ces duos révèlent comme différence, biologique pour le premier duo, sociale, culturelle et économique pour le second. Cette distinction est d'une extrême importance puisqu'elle a ouvert la voie à de multiples études, notamment, en sociologie et anthropologie, et ont permis de repenser le masculin et le féminin différemment, d'une manière autre que l'on se faisait communément auparavant du genre. Ce nouvel mode de pensée dont les prémices remontent au mouvement féministe que résume la célèbre phrase de l'écrivaine française Simone de Beauvoir «On ne naît pas femme, on le devient», qui a révolutionné le vécu de la femme et sa présence dans la littérature. C'est sur ce va-et-vient entre ce que l'on est biologiquement et ce que l'on pourrait devenir socialement, culturellement et économiquement que l'ensemble des communications ont porté. Cette vision dualiste que le sujet a de lui-même dans la quasi-majorité des œuvres maghrébines se réalise en premier et dernier lieu dans le corps, sur lequel se sont penchées les différentes interventions qui sont comme suit : Claudia Gronemann «Nom de plume et genre/Gender:la mise en scène d'auteur chez Assia Djebar» -Anissa Kaouel «Le Pain nu de Mohamed Chokri: par-delà le féminin et le masculin» - Michael Gebhard «Exorciser la douleur: des femmes face à la terreur/Rahida de Yasmina Bachir-Chouikh». Ensuite, Sophia Majeri «Le corps à l'épreuve du genre dans L'enfant de sable de Tahar Ben Jalloun» -Agnieszka Komorowska «Le regard clinique et la question du genre. La représentation de la psychiatrie dans le film algérien». Puis, Inès Bugert «L'Algérie est un homme», Le double conflit de l'identité sexuelle et nationale dans Garçon manqué de Nina Bouraoui» -Zouhour Bessrour «Corps et graphie dans La Transe des insoumis de Malika Mokaddem» -Chantal Marquardt, «Ambre,Artichauts et fifilles tunisiennes : Question du genre dans les blogs tunisiens». Chacune des trois séries de communications s'est achevée par une discussion avec le public présent. L'après-midi, une table ronde modérée par Sonia Fitouri et Samia Charfi, a réuni des écrivains tunisiens de langue française: Abdelaziz Belkhodja, l'algéro-tunisienne Wahiba Khiari Gammoudi qui a remporté le prix Senghor pour son roman'' Nos silences'' ,l'artiste-peintre et écrivaine tunisienne Aicha Ibrahim distinguée par deux prix : Le Grand prix de la Méditerranée et le prix d'excellence pour la Tunisie: Forum Femmes méditerranée (UNESCO-Marseille) pour sa nouvelle'' Le silence du Bleu de la Mer' 'et le prix Zoubeida Béchir pour son œuvre ‘'Arbre de Lumière. Arbre de vie''.Et l'universitaire Ahmed Mahfoudh, auteur de ''Brasilia Café'',prix Comar et d'un second roman ''Terminus Place Barcelone''. Le débat avait pour centre d'intérêt le rapport entre écriture, corps et identité au sens féminin et masculin du terme pour se conformer ainsi au concept du genre. La question de l'identité et bien d'autres thèmes ont attiré l'attention des chercheurs et des critiques littéraires non maghrébins tels que le groupe de chercheurs de Mannheim pour étudier de quoi est tramée la littérature d'expression française au Maghreb. De même que les intervenants ont fait le tour de cette question dans les récentes publications de plusieurs écrivains maghrébins et particulièrement, les Tunisiens. In fine, les efforts fournis par le comité scientifique et organisateur ne pourraient qu'être vivement félicités car ils ont contribué à consolider l'interaction en matière de littérature et des arts dans le domaine de la recherche scientifique entre l'université tunisienne et l'allemande établissant ainsi une solide passerelle académique et culturelle entre les deux pays.