Comme c'était attendu, le sit-in d'hier n'était pas classique, il ne s'est pas conformé au rituel qui consistait à s'assembler presque devant l'hôtel Africa, vu que l'enceinte du ministère de l'intérieur est fermée avec des fils barbelés. Cette fois-ci, la foule assez nombreuse n'a pas stationnée à l'endroit habituel, elle a bougé en direction de ce ministère où elle était arrêtée par les forces de l'ordre. Le blocage de la chaussée a duré quelques minutes pendant lesquelles on a scandé des slogans, puis, on a inversé la marche et on s'est dirigé vers le théâtre municipal où l'un des organisateurs de la manifestation a appelé la foule à se joindre au sit-in qui est observé par la famille du martyr Ckokri Belaïd aujourd'hui devant le palais de la justice à 10 h du matin. Les slogans de cette journée, eux aussi n'étaient pas classiques, ils faisaient écho aux dernières révélations relatives au dossier d'assassinat . Pour mieux en saisir le sens et en savoir plus sur ce dossier, nous nous sommes adressé à Zied Lakhdar, le nouveau secrétaire général du Parti Unifié des Patriotes Démocrates, et Jilani Hammami, le porte-parole du Parti des Travailleurs. Zied Lakhdar : La révélation de la vérité aura un grand impact sur l'avenir de la Tunisie « Ce sera, dorénavant, l'escalade et la poussée militante pour desserrer l'étau autour du juge d'instruction et désamorcer les pressions exercées sur lui afin qu'il remplisse la tâche qui lui est confiée en écoutant tous les témoignages et en prenant toutes les mesures susceptibles de découvrir toutes les parties impliquées dans l'assassinat de notre camarade, c'est-à-dire pas seulement les exécutants mais aussi et surtout les commanditaires, c'est-à-dire ceux qui ont pris la décision politique et planifié le crime. Nous allons pousser le mouvement de protestation vers l'escalade dans la rue et, aujourd'hui, on leur en a montré un échantillon. Nous allons faire de même au niveau international et ce en appelant les amis du PUPD et du Front Populaire et des forces de libération et de progrès dans le monde à exercer une pression sur le gouvernement de l'étouffement de la Révolution en vue qu'il réponde à une large demande populaire, à savoir la découverte de la vérité. Cette vérité ne concerne pas seulement la propre famille du martyr, ni sa famille politique restreinte ou élargie, mais l'ensemble du peuple tunisien, car l'avenir de la Tunisie en dépend. Il est impossible qu'un processus de transition vers la démocratie puisse s'achever avec succès tant qu'une partie du ministère de l'intérieur conspirent contre les Tunisiens et menacent leur vie en se taisant face aux groupes suspects des Salafistes extrémistes et au trafic d'armes qui ne peuvent être dirigés que vers les poitrines des militants des forces progressistes et démocratiques. Nous nous attachons à notre droit de recourir à la justice internationale pour mettre à nu les auteurs du crime et du terrorisme qui veulent nous mener vers une guerre civile qui ne pourrait profiter qu'aux forces contrerévolutionnaires. » Jilani Hammami : Le refus par le juge d'instruction d'entendre Dammak est la preuve qu'on veut étouffer la vérité «Comme vous le remarquez, on se dérobe et on se joue du dossier, étant donné que le juge d'instruction refuse de saisir les ficelles qui pourraient le guider vers la découverte de la vérité. Parmi les plus importantes de ces ficelles, il y en a celle de Fathi Dammak, concernant l'affaire de la constitution d'un réseau de contrebande d'armes et des menaces de violence, qui a demandé, par le biais de son avocat, et à deux reprises, d'être entendu par le juge d'instruction. Ses demandes réitérées pour présenter son témoignage sur ce réseau armé, qui menace d'assassiner des hommes politiques, n'ont pas eu de suite. Le refus du magistrat qui mène l'enquête ne pourrait avoir qu'un seul sens : il ne veut pas que cette voie s'ouvre, car il est persuadé qu'elle va mener à des données bien évidentes. Cette attitude de sa part redouble notre détermination à persévérer dans ce mouvement contestataire, à poursuivre la pression et à en diversifier les modalités pour démasquer cette manière de traiter le dossier et cette volonté délibérée d'occulter la vérité. »