L'opposition se replace toujours en ordre dispersé. Les ténors semblent n'avoir pas retenu la leçon du 23 octobre 2011, où plus d'un million et demi de voix sont parties en fumée, ne produisant aucune représentativité à l'ANC, alors que la Nahdha compacte et disciplinée a engrangé les sièges et s'est imposée comme pôle dominant de la vie politique tunisienne. La centrale islamiste s'est même permis le luxe d'apprivoiser le turbulent CPR de Dr Marzouki et de faire de Attakatol du Dr Ben Jaâfar parti de grande tradition militante et démocratique, un parti de soutien périphérique. Le reste du paysage politique a altéré le bon et le moins bon. Certes deux formations ascendantes et solides « Nida Tounès » et « Front Populaire » (Al Jabha Achaâbiya) se sont appropriées à peu près 40% du « marché » politique, si les sondages s'avèrent crédibles, mais pour le reste c'est la grande foire où toutes les combinaisons les plus imprévisibles et les plus inattendues restent du domaine du possible. Dans la mosaïque des représentations de masses, on oublie souvent les supports idéologiques, pour chercher tout simplement l'intérêt électoral, « l'existence » prenant instinctivement l'ascendant sur « l'essence » ! Qui peut aujourd'hui prévoir le positionnement de l'Alliance démocratique, ou même d'El Joumhouri pourtant membre fondateur de l'union pour la Tunisie ? ça risque de se jouer sur un fil, sur une candidature à la présidence ou même une part de pouvoir consentie à nouveau et avec quelle générosité et quels « sacrifices » par la Nahdha aux futurs figurants des « Troïka » à venir. Dans toute cette opacité, la Nahdha, d'ailleurs, en toute légitimité, continue à user de toutes les manœuvres pour s'assurer une reconduction à la tête de l'Etat, moyennant quelques correctifs sur le terrain avec un pragmatisme mesuré et de grande maîtrise. Quant aux alliances, elle n'a que l'embarras du choix. Du recyclage des « destouriens » et des Rcédistes en mal d'être, aux laissés pour compte des partis idéologiquement pointus, à tous ceux qui parmi les hommes d'affaires, les agriculteurs et même les petits artisans commerçants et des professions libérales qui commencent à en avoir ras-le-bol des politiciens agités et sans horizon de stabilité, tout ce beau monde qui se compte par « milliers » voire des millions pourraient basculer du côté de l'actuel pouvoir islamiste, si l'infantilisme de l'opposition continue dans l'insouciance actuelle de ses dirigeants. Encore un « fait divers » des plus significatifs qui est passé comme un poisson « chinois » dans l'eau, le dernier congrès de l'Union des agriculteurs a intronisé tout bonnement comme président, un ancien membre du conseil de la « choura » de la Nahdha dans l'indifférence générale de l'opposition, occupée à guerroyer pour vendre la peau de l'Ours qu'elle n'a pas chassé ! L'avertissement est de taille et devrait faire réfléchir les Etats majors des partis d'opposition car à ce rythme bien des associations et des « Unions » de la société civile feront peau neuve pour donner encore plus de volume à l'encadrement global du pays par le mouvement islamique. La dernière initiative de M. Hamma Hammami porte-parole du « Front populaire » pour mobiliser une sorte «d'alliance » la « nième », dite plus large des mouvances démocratiques et sociales, peut-être intéressante mais reste en deçà des attentes. D'abord, elle est tellement conditionnée qu'on a l'impression que le chef historique du parti de la gauche populaire, ne veut de personne ! Pas de ceci…pas de cela… Il demande même à « Nida Tounès » de « préciser » son programme économique et social, de dire sa position sur le domaine de l'Etat sujet à des convoitises capitalistes nationale et étrangères etc… etc…. Voilà qui justifierait un adage bien populaire : « Warrih al hsira yesbkek lijjamaâ » (Montrez lui la natte, il vous précédera à la Mosquée) ! A notre humble avis, si l'opposition démocratique et sociale, qui va de Nida Tounès à la gauche radicale, veut être crédible et pouvoir gagner aux prochaines élections, elle se doit d'être moins « conditionnelle » plus solidaire et surtout plus disciplinée dans le « vote utile ». La gauche marxiste doit aller plus au centre et la droite libérale doit évoluer vers la social-démocratie à l'Allemande ou à la française. Entre temps, ça presse de tout côté. Faire la fine bouche et chercher la « pureté »idéologique ne peut que rééditer le « 23 octobre » et là le réveil sera plutôt cauchemardesque, car entre temps le modèle social et culturel tunisien aura été noyé par les vagues rugueuses du Wahabisme et du salafisme de plus en plus hégémonique et dominant… et ce pour longtemps ! Attention plus les réveils sont tardifs… et plus ils seront douloureux !