«Une fois n'est pas coutume» dit le dicton. Il paraît que même si la Tunisie d'aujourd'hui est dotée d'une Haute Autorité Indépendante de la Communication Audiovisuelle récemment créée et adoptée par le gouvernement, ce dernier ne peut toujours pas s'empêcher de faire le mauvais et le bon temps dans le secteur des médias. Une fois de plus, les normes déontologiques de la presse sont bafouées par ceux qui sont dans le pouvoir actuellement. Et pour cause, les 5 dernières nominations à la tête de radios publiques sans respecter les règles de la transparence ou de l'impartialité ou même se concerter avec la HAICA. Après avoir sorti un communiqué dénonciateur de telles pratiques, la Haute Autorité Indépendante de la Communication Audiovisuelle a organisé hier, vendredi 23 août 2013, une conférence de presse dans laquelle elle dénonce vivement ces nominations et remet en question son rôle en tant que Haute autorité dans la régulation du secteur médiatique audiovisuel. Népotisme et mutisme du gouvernement Ces nominations imposées par le gouvernement provisoire actuel devaient normalement émaner des compétences de la HAICA, selon le décret-loi 116. Une décision arbitraire qui a suscité l'indignation des professionnels du secteur ainsi que les ONGs luttant pour la liberté d'expression à l'instar de Reporters Sans Frontières qui s'est dit très déçue et a ardemment critiqué ces nominations qu'elle trouve «inquiétantes». A elle, s'est jointe La Coalition civile pour la défense de la liberté d'expression (CCDFEX) qui réclame vivement l'annulation de telles nominations. Quant à la HAICA, n'ayant pas été consultée, elle a annoncé, hier, avoir pourtant écrit trois fois au gouvernement pour revoir ces nominations et lui rappeler que de telles décisions sont de son ressort à elle et ne reviennent pas au pouvoir en place. Les membres de la HAICA ont annoncé vendredi, lors de la conférence de presse qui a eu lieu dans ses locaux, que les trois correspondances qu'ils ont envoyées au gouvernement étaient bien avant que les 5 nominations n'aient lieu et que le dernier en date s'est fait à J-1 de la prise de leurs nouveaux postes par les nouveaux directeurs choisis arbitrairement sans concertation. La HAICA a, notamment, rappelé avoir demandé la mise en place d'une commission hétéroclite et indépendante dont la mission est de recueillir et d'examiner les profils des candidats. Les membres de la Haute instance se disent dépités et indignés quant à la réaction du gouvernement qui a fait outrageusement la sourde oreille à toutes ces correspondances et qui a continué, malheureusement, à persister dans son erreur. Une réaction qui exprime une volonté de rester dans son propre mutisme et de ne consulter que son libre arbitre. Une volonté qui marginalise le rôle que devrait occuper la HAICA dans le secteur médiatique. Les pratiques absolutistes d'antan L'absence de réaction et d'interaction avec la HAICA, montre une fois de plus que le gouvernement en réalité préfère écarter cette dernière des décisions, lui rafler ces fonctions et s'accaparer des médias. Sinon, comment peut-on expliquer ce désir patent de garder le contrôle sur le 4ème pouvoir. Une des pratiques absolutistes qui rappellent l'ancien régime. La HAICA a pourtant tenu rappeler le pouvoir en place qu'il est impératif de respecter le rôle de cette dernière, c'est-à-dire de respecter la loi et l'indépendance des médias. Chose que le gouvernement a complètement bafoué et ignoré. Une crise de confiance semble être installée entre les deux parties. Une faille que la HAICA dénonce après que le pouvoir exécutif ait piétiné son rôle et ses compétences et ait surtout fait la sourde oreille. La Haute Autorité ne compte, pour autant pas, baisser les bras et se laisser faire. Ces membres ont montré, hier, une volonté infaillible et forcenée de protéger leur fonction et récusent catégoriquement qu'on fasse de l'instance un simple élément décoratif dont ont viole les prérogatives. Etant donné qu'aujourd'hui, la HAICA tente d'instaurer un nouveau concept quant au rôle des médias publics qui se base sur le contrôle et le questionnement du pouvoir, il est hors de question pour ce dernier de ne pas mettre la main dessus pour s'assurer de la servilité et de la docilité des médias étatiques. Les responsables politiques ne semblent pas pouvoir se défaire de cet amour passionnel qu'ils vouent à son Altesse la Presse. Pas pour le moment en tout cas.