A croire qu'on est retourné de plain pied à une époque où les conflits tribaux se négocient inéluctablement dans le sang. Sur fond de vendetta et autres expéditions punitives, pour venger un quelconque membre d'une tribu agressé et, par-là, mettre à genoux les rivaux. Bref, c'est le chaos total, sans compter que d'innocentes victimes, dans la majorité des cas, soient touchées à leur tour. Au départ, une altercation opposant deux jeunes gens au sujet d'une moto mise en vente par l'un et sollicitée par l'autre. Du banal, admettez-le, des tractations du genre, ça se négocie au quotidien et dans chaque coin de rue, sinon dans des espaces aménagés pour ces circonstances. Seulement, les négoces qui se sont engagées n'ont pu aboutir à un accord, comme c'est souvent le cas d'ailleurs, lorsqu'il s'agit de traiter dans le noir. Essentiellement quand il y a des doutes quant à l'origine de l'engin proposé à la vente, donc à céder. Ce fut, a priori, l'étincelle qui fut à l'origine du désaccord, très vite mué en conflit qu'il fallait traiter à coups de poing et de pied. Le problème, c'est que l'acquéreur s'est trouvé seul en face de trois adversaires, le revendeur étant accompagné à l'occasion de deux copains. A trois contre un, la cause était bel et bien entendue, l'acquéreur se trouvant en position défavorable, en infériorité numérique, en fait quasiment incapable de se défendre et parer l'avalanche de coups lui tombant sur la tête. Et autres parties de son anatomie, au point d'être transporté d'urgence, à l'issue de la sauvage agression, dans un établissement hospitalier de la capitale. En guise d'accord et de tractation, on ne pouvait espérer pire. En tout cas, une fois remis de ses blessures et de ses émotions, le jeune homme n'avait d'autre idée en tête, une tête encore meurtrie soit dit en passant, que de se venger et laver l'affront. Mais il fallait patienter et attendre le moment propice pour déterrer cette rancune qui le rongeait intérieurement. Jusqu'au jour où il eut vent de la présence de son rival aux environs de Bab B'har, alors qu'il était lui-même du côté de Bab Jedid, autrement dit sur son propre territoire et qu'il lui suffisait d'un simple coup de fil pour ameuter les siens. Aussitôt, une expédition punitive s'est organisée, pas moins de sept copains répondant à l'appel à la rescousse lancé par l'ex-victime. La petite bande des huit lascars, ainsi constituée en un tour de main, s'est dirigée illico vers la zone où la présence du rival était signalée. Or, le rival en question n'était pas seul, il était lui-même accompagné de trois autres individus, ce qui explique qu'une petite guéguerre s'est déclarée opposant les deux bandes rivales. Mais rapidement, la «tribu» de Bab Jedid prenait le dessus, obligeant sa rivale, originaire de Bab El Khadhra, de battre en retraite, battue à plate couture par la première, avantagée par son grand nombre et l'arsenal, d'armes blanches essentiellement, dont elle disposait. Il faut dire que la bande de Bab El Khadhra était douée pour les replis stratégiques. Dépités pour ne pas avoir assouvi leur rancune à leur soûl, les gars de Bab Jedid n'ont trouvé mieux que de s'en prendre aux véhicules stationnés dans les environs, n'hésitant pas, non plus, à agresser les passants. Entretemps, des témoins auraient alerté les auxiliaires de la justice, venus rapidement mettre fin aux dépassements et embarquer trois membres de la bande, tous armés, dont l'un d'une hache, sans oublier le couteau, ustensile nécessaire pour les voyous de notre époque.