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Les 9 romans en lice pour le prix du «Monde»
Publié dans Le Temps le 11 - 09 - 2014

Le Monde s'apprête à remettre son prix littéraire pour la deuxième fois. En 2013, il était revenu à Yellow Birds, de Kevin Powers (Stock), et à Heureux les heureux, de Yasmina Reza (Flammarion). Pour cette nouvelle édition, neuf des 607 romans de la rentrée littéraire font partie de la sélection. Signés par des auteurs confirmés ou de jeunes talents, tous ont été écrits en langue française.
Outre l'équipe du « Monde des livres » (Jean Birnbaum, Raphaëlle Leyris, Florence Noiville, Macha Séry et Catherine Simon), le jury du prix est formé de journalistes qui travaillent aux quatre « coins » du Monde : François Bougon (International), Denis Cosnard (Economie), Clara Georges (à l'édition centrale), Vincent Giret (développement éditorial), Raphaëlle Rérolle (« Culture & idées ») et, bien sûr, Gilles van Kote, directeur du Monde et président du jury. A la mi-septembre, il remettra le prix dans les locaux du journal à son (ou sa) lauréat(e). Qui sera également l'un des invités du Festival du Monde, nouvelle manifestation qui se tiendra les 20 et 21 septembre.
Faux nègres de Thierry Beinstingel
« Pourquoi les gens d'ici votent à l'extrême droite ? » : muni de cet improbable bréviaire, Pierre, journaliste improvisé, de retour du Moyen-Orient, et Frédéric, preneur de son et aveugle, sont envoyés dans un ­village de l'est de la France, qui a donné au parti d'une « égérie à mèche raide » son meilleur score électoral. Quel rapport avec le roman ? Tout, bien sûr. Que « littérature et politique [fassent] rarement cause commune » n'empêche pas les liens de se tisser, assure Thierry Beinstingel, dans ce voyage subtil, d'une apparente simplicité, où se croisent les figures d'Arthur Rimbaud, de Jules Ferry ou du général Boulanger. Du « je » du romancier-reporter au « nous » de l'opinion, ce « grand collectif au sens de collecteur d'eau pluviale ou d'égout », l'auteur de Retour aux mots sauvages et Ils désertent (Fayard, 2010 et 2012) s'interroge, en même temps qu'il ­raconte une vraie et belle histoire de la France d'aujourd'hui. Epoustouflant.
Faux nègres de Thierry Beinstingel, Fayard, 422 p., 20 €.
Dans les yeux des autres, de Geneviève Brisac
« Dans les yeux des autres », Anna n'est plus que celle qui a autrefois vécu avec Marek Meursault, activiste mort au Mexique ; celle, aussi, qui a trahi la Révolution en la racontant dans un livre, comme un écrivain, c'est-à-dire sans complaisance, connaissant le succès avant d'être oubliée. Plus de vingt ans après, elle se retrouve à vivre aux crochets de sa sœur, Molly, médecin et femme d'action, la compagne de Boris, inlassable militant pour les sans-papiers et les sans-logement. Anna relit ses carnets de l'époque. Doucement cruel, mélancolique avec vivacité, le roman de Geneviève Brisac ausculte la trajectoire des idéaux et des rêves, mesure la vitesse à laquelle passe l'existence, dit l'importance de la littérature dans la vie, et parle avec une justesse saisissante des relations entre sœurs et des rapports entre filles et mère – le portrait de la fantasque et toxique génitrice des héroïnes est l'une des belles réussites de ce roman qui en compte de nombreuses.
Dans les yeux des autres, de Geneviève Brisac, L'Olivier, 312 p., 18,50 €.
Le Royaume, d'Emmanuel Carrère
Au début des années 1990, Emmanuel Carrère a traversé une dépression à laquelle il fit face en se tournant vers la psychanalyse mais aussi, et d'abord, vers Jésus. De cette crise, il a gardé trace dans des cahiers qui forment le journal de bord de sa conversion. Littéraire et spirituelle, la nouvelle enquête de l'écrivain part de ce matériau autobiographique. Dans un jeu de miroirs avec sa propre vie quotidienne, Carrère épouse le ­destin de saint Luc pour essayer de comprendre « comment a pu s'écrire un évangile » et de quelle manière peut se vivre la foi. Mêlant exégèses ­savantes et souvenirs intimes, esprit d'examen et humour narquois, il explore magnifiquement l'espérance, les doutes, la honte. A l'horizon de ce texte aussi puissant que sensible, il y a non pas un quelconque au-delà, mais « la réalité de la réalité », le seul royaume auquel Carrère veut demeurer fidèle.
Le Royaume, d'Emmanuel Carrère, POL, 636 p., 23,90 €. En librairie le 28 août.
Viva, de Patrick Deville
L'écrivain voyageur boucle, en majesté, son cycle latino-américain et sa page mexicaine : c'est dans les pas de Malcolm Lowry, l'auteur d'Au-dessous du ­volcan (publié en 1947), devenu un livre culte, et dans ceux de Léon Trotski, l'ancien chef de la révo­lution russe, fuyant la terreur stalinienne et s'installant à Mexico (où il sera assassiné en août 1940), que Patrick Deville entraîne ses lecteurs. Lowry et Trotski ne se sont jamais rencontrés, mais Viva les fait se croiser. Dans ce tourbillon inouï, bruissant de rage et d'espérance, surgissent des figures connues, comme les peintres Frida Kahlo et Diego ­Rivera, ou moins connues, comme la photographe Tina Modotti. Tous, d'Antonin Artaud à l'énigmatique B. Traven, semblent s'animer d'une nouvelle vie. Jusqu'à la chute finale. Une fresque ­saisissante.
Viva, de Patrick Deville, Seuil, « Fiction & Cie », 224 p., 17,50 €.
La Condition pavillonnaire, de Sophie Divry
En exergue de son roman, Sophie Divry cite Jean Guéhenno : « Le problème de la liberté intéresse tout le troupeau. Tout le troupeau sera libre ou pas une bête ne le sera. » L'écrivaine (remarquée, en 2010, pour La Cote 400) nous avertit ainsi : la vie de « M. A. », qu'elle va dérouler devant nous, est l'affaire de tous. L'existence que mène son héroïne, avec son carcan bourgeois, ses insatisfactions, qu'elle va chercher à combler en s'essayant à l'adultère, à l'humanitaire et au yoga, soulève des enjeux profondément politiques. La Condition pavillonnaire a beaucoup à voir avec la condition humaine. Et ce roman, qui retrace l'existence de M. A. à la deuxième personne, entre clins d'œil à la Bovary de Flaubert et ­influence d'Annie Ernaux, est l'une des excitantes ­découvertes de cette rentrée.
La Condition pavillonnaire de Sophie Divry, Noir sur Blanc, « Notabilia », 266 p., 17 €.
Quiconque exerce ce métier stupide mérite tout ce qui lui arrive, de Christophe Donner
Brillant, drôle et joueur, infiniment séduisant : tel fut le producteur de cinéma Jean-Pierre ­Rassam, mort en 1985, à 44 ans. Christophe ­Donner ( qui a tenu une chronique jusqu'en 2012 dans M, le magazine du Monde ) le fait revivre ainsi dans son nouveau roman. L'auteur se focalise sur ses années les plus flamboyantes, entre 1967 et 1974, et plus précisément sur ses relations avec Claude Berri – qui n'est pas encore le « parrain » du cinéma français, mais sera bientôt le beau-frère de Rassam – et Maurice Pialat – amant de la sœur du précédent. Affection, mépris, admiration et jalousie circulent entre les trois hommes, à mesure des films, grands ou moins grands, qu'ils tournent ou produisent. Ce formidable portrait d'un homme est aussi celui d'une époque, que Donner déroule sous nos yeux sans temps mort.
Quiconque exerce ce métier stupide mérite tout ce qui lui arrive, de Christophe Donner, Grasset, 304 p., 19 €.
Tram 83 de Fiston Mwanza Mujila
C'est à Lubumbashi, ville Far West de l'ex-Zaïre (aujourd'hui République démocratique du Congo), que Lucien, apprenti écrivain, et Requiem, copain d'enfance et loubard dessalé, se retrouvent un beau jour. Le Tram 83, l'un des « bars à traînées les plus achalandés », devient leur repaire. « Musiciens par inadvertance ou prostituées du troisième âge (...), boulangers autodidactes ou marabouts ou mercenaires se réclamant de Bob Denard (...) » : la « Ville-Pays » s'y rue, en quête d'un bonheur bon marché. Les cadres des concessions minières et autres « touristes à but lucratif » s'y précipitent aussi. Il y a du Jérôme Bosch dans ce huis clos citadin, frénétique, flamboyant. Mais un Jérôme Bosch insolent, globe-trotter, qui aurait lu Gabriel Garcia Marquez et Chimamanda Ngozi Adichie. Vivant en Autriche, le jeune Fiston Mwanza Mujila, né au Katanga en 1981, signe là son premier roman : l'une des plus enthousiasmantes découvertes de la rentrée.
Tram 83 de Fiston Mwanza Mujila, Métailié, 206 p., 16 €.
Mécanismes de survie en milieu hostile d'Olivia Rosenthal
On ne sait dans quelles franges, quels limbes évolue la nouvelle héroïne d'Olivia Rosenthal : un monde apocalyptique où, la population ayant été décimée, ne demeurent que des hordes d'hommes ou d'animaux qui menacent sa survie et l'obligent sans cesse à fuir ? Le délire d'un cerveau paranoïaque ? Les espaces limoneux du coma, quand l'esprit fait l'expérience de la mort imminente ? La romancière maintient l'ambiguïté en entremêlant fiction et matériau documentaire, robinsonnade dans des terres dévastées et récits de malades ayant ­réchappé à la mort clinique. Il y a quelque chose de doublement fantastique dans Mécanismes de survie en milieu hostile : une sur-réalité, doublée du prodige de voir un grand écrivain imposer, de livre en livre, sa voix singulière et poursuivre sa réflexion sur l'identité des êtres.
Mécanismes de survie en milieu hostile d'Olivia Rosenthal, Verticales, 188 p., 16,90 €.
Tristesse de la terre. Une histoire de Buffalo Bill Cody, d'Eric Vuillard
Il a gagné en notoriété ce qu'il a perdu en identité. Depuis que sa vie a été travestie en légende dans des romans bon marché, William Cody, dit Buffalo Bill (1846-1917), ne s'appartient plus. A la tête d'un divertissement à grand spectacle, l'ex-éclaireur est devenu la coqueluche du public occidental. Le Buffalo Bill's Wild West se produit partout : en Amérique du Nord, bien sûr, mais aussi en Europe lors de tournées triomphales. Décrivant l'apogée de la gloire de ce chef de troupe et le crépuscule de l'idole, Eric Vuillard réduit, dans son septième livre, le Far West aux dimensions d'un chapiteau sous lequel ­Indiens et cow-boys cavalcadent, pétaradent et réécrivent l'histoire récente. C'est triste et flamboyant, ­grotesque et mélancolique.
Tristesse de la terre. Une histoire de Buffalo Bill Cody d'Eric Vuillard, Actes Sud, « Un endroit où aller », 164 p., 18 €.


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