La Tunisie plurielle a voté avec toutes ses tendances et ses sensibilités pour dire certaines choses essentielles et en premier l'alternance pacifique au pouvoir qui est le fondement même de la Démocratie. Le peuple tunisien a été à la hauteur, malgré les imperfections de la logistique et quelques dépassements globalement négligeables au vu des résultats apaisants et bienfaiteurs. Désormais, toutes les « hégémonies » et les tentations du contrôle social intégral au nom de la Religion ou des idéologies extrêmes ou du Parti-Etat, ne pourront plus être opérationnelle ou acceptable dans ce pays. Première conclusion, la victoire de « Nida Tounès » ne ressemble en rien au raz de marée de la Nahdha lors du 23 octobre 2011 et c'est peut-être tant mieux, parce que nous avons vécu les dérives « Troïkistes » au nom de la « légitimité électorale » et surtout les tentatives et le harcèlement continu à l'ANC, pour imposer à la Tunisie un nouveau modèle culturel, politique et identitaire où elle ne se reconnaît pas. Certes, c'est le passé, aujourd'hui, et on doit tourner calmement et sereinement la page, mais on ne peut oublier la menace permanente et l'angoisse lourde qui ont pesé sur le pays trois années durant, pour défigurer notre manière d'être et de vivre et notre véritable identité millénaire. Finalement, le scrutin d'hier a rappelé aux politiciens zélés de l'Islam politique radical que ce pays est bien mieux dans sa peau portée depuis Carthage en passant par Kairouan et Tunis, que par celle des « Frères musulmans » d'Egypte qu'on voulait lui enfiler de gré et de force. Par la même, nous pensons que la Nahdha en changeant son fusil d'épaule, et en jouant la « démocratie civile » tout au long de la campagne électorale, a, non seulement, sauver les meubles, car la sanction aurait pu être plus lourde, et la note plus corsée, mais elle a pu se positionner dans un moule d'avenir que nous comparons à l'évolution de la démocratie chrétienne en Europe après les guerres de religion et la « laïcisation » de l'Eglise et son retrait par rapport à la politique et l'Etat. Toutefois, soyons prudents et lucides !... La tactique électorale prescrite par les bureaux d'inflexion d'images américains, doit se confirmer dans la durée pour rompre et de manière graduelle mais définitive, avec le projet initial « frères musulmans » de la Nahdha. Les supports de mobilisadtion comme la « Daâwa » (prédication intensive) zélée et qui fait figure de machine à laver les cerveaux, ou l'accointance discrète et secrète mais réelle avec l'extrémisme jihadiste de « Ansar Achariaâ », doivent laisser la place à la pratique politique civile démocratique comme en Occident. La Nahdha a plusieurs autres créneaux qu'elle peut vendre et commercialiser tels que le libéralisme économique et l'ouverture sur le monde et l'investissement plus volumineux et qualitatif. Mais, pour cela la Nahdha a besoin de « rajeunissement » et de « modernité » faute de quoi elle subira à son tour le déclassement malgré la ferveur religieuse de ses adeptes classiques et têtus. J'en viens à la gauche qui a progressé au vu des résultats annoncés et projetés du Front Populaire... mais elle aurait pu mieux faire si elle avait navigué plus au « centre » et si elle n'avait pas agité la menace de la fiscalité prétorienne et démolissante, ainsi que la « Ré-Etatisation » de l'économie. Le monde ne peut pas revenir en arrière ! Le Stalinisme et même le dirigisme rigoureux a fait son temps. Trop d'Etat tue comme le goudron dans la cigarette. Il tue l'initiative et développe la culture de « l'assisté » dans un peuple qui a d'autres ambitions. Notre modèle doit être plutôt la Chine « communiste » mais libérale et ouverte sur le capital, que Cuba ! J'ai toujours pensé qu'il y a une bonne place dans le paysage et la scène politiques en Tunisie pour un grand parti socialiste tel qu'il a été monté par François Mitterrand en France, ou Tony Blair en Grande-Bretagne ou encore le SPD allemand, de Willy Brandt. Mais, pour cela, il faut rassembler le peuple de gauche et arrondir les extrêmes. J'en parlai avec mon frère et ami Si Zied Lakdhar, camarade militant de feu notre martyr national Chokri Belaïd et impressionnant de calme et de sérénité qui semble y croire aussi. Mais, M. Hamma Hammami, autre baroudeur du « Front Populaire » (Al Jabha Achaâbiya), peut énormément aider dans cette voie en modérant encore plus son projet de société et le rendre plus attrayant pour les classes moyennes libérales et la bourgeoisie nationale. Dernière conclusion, (toujours à chaud et sur le tas) : La déroute et la défaite attendues et programmées des partis qui ont vendu « leur âme » à la Nahdha ! Leur tristesse, en ce moment, doit être inconsolable, mais quand on accepte de jouer les satellites « déclassés » en orbite autour d'une planète qui joue pour elle d'abord et... ensuite, on ne peut que se faire rattraper par les « trous noirs » que les astro-physiciens désignent par « cimetières d'étoiles ». Dommage et dire que ces partis et leurs leaders étaient parmi les plus grands défenseurs de la liberté du temps de la dictature, mais l'opportunisme est toujours rattrapé par la vertu... et le peuple tunisien a prouvé, le 26 octobre 2014, qu'il est vertueux et qu'il est un grand peuple. Oui, Hached.... Vous avez raison : « Peuple, je vous aime » (Ouhibouka ya Chaâb) !