L'affaire remonte au mois dernier quand Moez Ben Gharbia et Wassim Hrissi, alias Migalo, ont été arrêtés. Le ministère public avait émis à leur encontre un mandat d'arrêt pour usurpation d'identité et nuisance au président de la République, selon les articles 32, 67, 159 et 291 du code pénal. L'arrestation s'est faite suite à une écoute téléphonique durant laquelle l'humoristeimitateur Migalo s'est fait passer pour le président de la République, Béji Caïd Essebsi, auprès de l'homme d'affaires tunisien résidant en France, Hamadi Touil.Après cette incarcération, la présidence de la République avait émis un communiqué expliquant que le chef de l'Etat avait pris la décision de renoncer à son droit de poursuite judiciaire contre les deux hommes tout en affirmant que l'institution n'avait rien à voir avec cette affaire. Quelques jours après, le nom du présentateur de l'émission polémique de la chaîne Al Hiwar Ettounssi, ‘A celui qui ose seulement', Samir El Wafi, a commencé à apparaître : El Wafi aurait fait chanter l'homme d'affaires pour l'aider à rentrer en Tunisie. Figurant sur la liste des hommes d'affaires corrompus et ayant à son actif une multitude de procédures judiciaires, Hamadi Touil aurait eu une proposition de la part de Samir El Wafi : il l'aiderait à rentrer en Tunisie en employant ses bonnes relations avec les figures politiques du pays en contrepartie, l'homme d'affaires devrait verser une somme d'argent à l'animateur. A l'apparition de ce récit, Samir El Wafi avait tout nié en bloc avant d'expliquer qu'il s'était effectivement rendu à Paris pour rencontrer Hamadi Touil. L'animateur a expliqué qu'il voulait enregistrer une émission avec l'homme d'affaires et que la proposition qu'il lui a faite, enregistrée dans une séquence vidéo par madame Touil, n'était qu'une tentative normale d'un journaliste pour convaincre le concerné. Une vidéo que Ben Gharbia voulait récupérer à tout prix et qui l'a amené à utiliser les talents de Migalo. Interrogé puis relâché, Samir El Wafi n'a plus été mêlé à l'affaire jusqu'à sa convocation, dans la journée du 15 avril, devant la brigade criminelle d'El Gorjani. A l'issue de l'interrogatoire, le procureur adjoint de la République a émis un mandat de dépôt à l'encontre de l'animateur. La date du procès a été fixée au 22 avril 2015. Tout juste après son arrestation, une campagne de dénigrement a été lancée à l'encontre de l'animateur sur les réseaux sociaux. Des journalistes, des personnalités publiques et des citoyens ont affiché leur soulagement de voir El Wafi arrêté ‘vu la qualité du produit qu'il offre à la télé'. De son côté, le mouvement d'Ennahdha a été le seul à émettre un communiqué dans lequel il a appelé à la libération d'El Wafi en criant à l'atteinte à la liberté d'expression. Un communiqué qui n'a apparemment pas pris en compte les éclaircissements du ministère public dont le porte-parole, Sofiene Selliti, a expliqué que l'affaire de Samir El Wafi est grave et n'a aucun lien avec la liberté d'expression ni avec l'esprit de vengeance dont parlent certaines personnes. Des déclarations qui ont suscité la révolte de Hassen Ghodhbani, l'un des avocats d'El Wafi. Maître Ghodhbani a estimé que le travail du porte-parole du parquet devait se contenter de communiquer les décisions du ministère public et non pas de caractériser les dossiers. Pour l'avocat, qualifier l'affaire de grave est une tentative d'influencer, négativement, l'opinion publique qui est déjà assez remontée. Hassen Ghodhbani a de même estimé qu'il n'est pas normal de voir des journalistes inculpés dans de telles affaires vu que le mensonge n'est pas un crime au vu de la loi. Il a rappelé que cette affaire était liée à une basse querelle entre des journalistes dont certains voulaient ‘détruire' Samir El Wafi et son grand succès et qu'elle n'est liée ni à une victime ni à un plaignant. Rappelons que Moez Ben Gharbia, Wassim Hrissi et Abdelhak Toumi ont été condamnés à six mois de prison avec sursis par le Tribunal de première instance de Tunis dans le cadre de la même affaire. Pour Hassen Ghodhbani, Samir El Wafi bénéficiera d'un non-lieu mercredi prochain. De son côté, le Syndicat des journalistes tunisiens garde le silence sur ce dossier. Au-delà de l'affaire, c'est la crédibilité des journalistes et des figures médiatiques qui se trouve entachée aujourd'hui. Quand le chantage et l'escroquerie se mêlent au travail du journaliste, c'est tout le secteur qui en prend un coup. Nous attendons cependant de voir le verdict du Tribunal en espérant que cela ne soit qu'un grand malentendu.