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Pourquoi la Tunisie est-elle devenue une pépinière de djihadistes ?
Publié dans Le Temps le 30 - 06 - 2015

Unique pays arabe à avoir réussi sa transition démocratique dans le sillage du printemps arabe, la Tunisie est en passe de devenir le premier «producteur » et «exportateur » mondial de djihadistes. Selon des statistiques publiées récemment par le Centre International des Etudes de Radicalisations basé à Londres (ICSR), les Tunisiens constituent en effet le plus gros contingent de combattants de l'Etat Islamique en Irak et au levant EIIL (Daech), avec plus de 3000 éléments. Ils devancent, dan ce cadre, les Saoudiens (2500) qui sont pourtant les plus grands idéologues et bailleurs de fonds du djihadisme, les Jordaniens (2089) et les Marocains (1500) et les Libyens (600) et les Algériens (250).
D'autre part, la branche libyenne de Daech compterait dans ses rangs «plusieurs centaines» de Tunisiens sur un total estimé à 1500 combattants, selon des sources sécuritaires.
Le nombre des Tunisiens qui ont rejoint les zones de combat en Syrie, en Irak et en Libye aurait pu être beaucoup plus élève si les autorités tunisiennes n'ont pas empêché 12.490 Tunisiens de partir grossir les rangs des djihadistes à l'étranger entre mars 2013 et avril 2015, selon un bilan publié par le ministère de l'Intérieur.
Outre Daech qui semble recruter avec une grande aisance, la Tunisie compte deux autres nids de djihadistes : la brigade Okba Ibn Nafaâ affiliée à Al Qaïda au Maghreb islamique (AQMI) et qui disposeraient, selon les experts, d'une centaine de combattants, et l'organisation Ansar Al-Charia, dont les membres ont notamment mené les attaques contre les ambassades américaines à Benghazi et à Tunis en 2012. Cette organisation est également revendiqué dans une vidéo postée sur les sites internet djihadistes les assassinats des opposants Chokri Belaïd et Mohamed Brahmi.
Pourquoi y a-t-il autant de djihadistes dans le pays le plus libéral du monde arabe et qui est souvent présenté comme étant le seul où le printemps arabe a réussi?
Précarité sociale
Pour l'anthropologue Mondher Kilani, la précarité sociale explique en grande partie l'embrigadement relativement facile des jeunes tunisiens par les groupes extrémistes. «L'adhésion au djihadisme résulte de trajectoires où la détresse psychologique et sociale est prégnante. Les problèmes sociaux (chômage, marginalisation, précarité économique, frustration) n'ont pas disparu comme par enchantement après la révolution. Certes, tous ces profils n'aboutissent pas à cet engagement puisque beaucoup de jeunes tentent par exemple le départ clandestin vers l'Europe pour changer de vie, mais la rencontre de certains d'entre eux avec l'idéologie du djihadisme s'avère décisive», relève-t-il. Et d'ajouter : «Le profil social des djihadistes correspond souvent aux déclassés, aux déçus dans leur aspiration sociale, en quête d'une identité ou d'une reconnaissance, indépendamment de leur degré d'instruction. Les mouvements djihadistes, qui disposent de moyens considérables, représentent un attrait non négligeable pour ces jeunes. Ils leur offrent des ressources matérielles mais aussi une forme de revanche sur la société qui les a délaissés, ignorés ou méprisés. Ils leur proposent également l'aventure, la puissance, le pouvoir sur la vie et sur la mort, la publicité et in fine la promesse du paradis».
D'autre part, M. Kilani, qui a enseigné l'anthropologie dans des universités suisses, françaises et belges, rappelle que les activistes djihadistes ont essaimé en Tunisie dès le lendemain de la révolution. «On a assisté durant plusieurs années à une volonté de réislamisation de la société tunisienne de la part des milieux fondamentalistes, sous le regard bienveillant ou avec la complicité active de plusieurs secteurs du mouvement islamiste Ennahdha, alors à la tête du gouvernement provisoire», a-t-il avancé.
Sous le règne d'Ennahdha, les djihadistes ont en effet poussé leurs pions dans les mosquées et les universités. Dans les premières, ils ont réussi à maintes reprises à placer leurs imams. Dans les secondes, ils ont tenté d'imposer leurs conditions en réclamant l'aménagement de salles de prière et le droit des étudiantes à porter le niqab.
Nature influençable
Face à cet activisme salafiste qui heurte la pratique religieuse apaisée qui était en vigueur depuis de longs siècles en Tunisie, le mouvement Ennahdha a longtemps tardé à prendre des positions claires. Preuve en est : les interminables sit-in des étudiants salafistes réclamant le port du niqab à la Faculté des Lettres, des arts et des humanités de la Manouba n'ont pas suscité de la part du gouvernement des réactions à la mesure de la gravité des protestations qui ont causé une interruption des cours à pendant plus d'un mois. Le ministre de l'Enseignement supérieur avait alors justifié son refus de promulguer une circulaire interdisant le port du voile islamique intégral par la suspension de l'ancienne Constitution !
Dans le même temps, les incendies des tombes de saints soufis, les appels aux châtiments corporels ainsi que la défense du voile intégral et de la polygamie se sont multipliés.
Professeur de sociologie à la faculté des Sciences humaines et sociales de Tunis, Moncef Ouannès pense, quant à lui, que plusieurs facteurs expliquent le fait que la Tunisie soit devenue une véritable fabrique de djihadistes. «Outre la précarité socio-économique, il y a lieu de citer l'échec de la politique officielle en matière d'encadrement des jeunes et de la politique religieuse adoptée sous le règne de Bourguiba et de Ben Ali, laquelle a anéanti la crédibilité des oulémas, des imams et des cheikhs de la prestigieuse institution Ezzeïtouna qui prêchait un Islam modéré aux antipodes avec les thèses wahhabites rigoristes», souligne-t-il.
Auteur du livre «La personnalité tunisienne», M. Ouannès met aussi en avant la «nature «influençable» et la «grande fragilité psychologique» du Tunisien.
«Le fait qu'un seul imam à Rouhia, un village de quelque 4000 âmes, ait réussi à convaincre plus de 200 jeunes de rejoindre la branche syrienne de Daech en dit long sur cette nature influençable», argumente-t-il.


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