L'exposition qui se tient aujourd'hui à la galerie Saladin à Sidi Bou Saïd est très originale en tous les cas elle suscite la réflexion et peut être le rêve. Cette exposition en effet, montre les travaux de deux peintres tunisiens établis depuis assez longtemps à Montmartre à Paris 18 ème. Tout le monde connait la butte de Montmartre, ce haut lieu parisien de l'art populaire dans toutes ses variétés et couleurs. Les millions de visiteurs étrangers et français qui visitent ces lieux cherchent tous à mémoriser leur passage à Montmartre. Certains Photographient les lieux, l'architecture, les ruelles tortueuses et escarpées, les pavés glissants et le funiculaire historique. Ceux qui arrivent à la butte se font "portraiter" à coups de crayons rapides et concis ou se font les contours de silhouettes ou les visages à coup de ciseaux. Les tableaux de peintures très nombreux sont aussi proposés. Beaucoup de ces touristes vont aux restaurants ou aux cafés siroter leur vin léger ou capiteux, tous les visiteurs, par milliers remplissent les rues, les places et les placettes, déambulent devant les artistes, tous en pleine activité de performance habile ou l'art sollicite la curiosité et l'émerveillement et fait délier les bourses ou les cartes de crédit. Devant le travail de nos artistes tunisiens établis à Montmartre, nous nous mettons à rêver, à imaginer que peut être nous pourrions un jour, vivre des moments analogues dans notre pays. Montmartre, sa butte, nous font penser à Sidi Bou Saïd, pourquoi pas ? On pourrait envisager de susciter la même dynamique pour reconvertir les activités, la rentabilité de Sidi Bou Saïd et surtout de reconvertir les services qu'un artisanat désarticulé, réifié et "défonctionnalisé" propose à des clients de plus en plus désintéressés et en tous les cas de plus en plus rares. Est-il possible de rêver à reconvertir la butte de Sidi Bou Saïd en une butte de culture et d'art mais aussi en lieu de plaisir, de communication et de convivialité. La butte pourrait alors entamer une nouvelle orientation sur la base de l'intrusion de travaux d'arts légers résultant d'exercices de dextérité, d'habileté artistique pouvant retenir l'attention du visiteur et le convaincre d'acquérir ces œuvres "vivantes" . Oui, tout cela est possible. Sidi Bou Saïd, en fait n'a rien à envier à Montmartre et à sa butte. Sidi Bou Saïd possède beaucoup d'atouts que la Butte de Montmartre n'en possède pas. Sidi Bou Saïd se prévale d'une vue imprenable sur le Golf de Tunis, sur le Bou kornine. Le village se targue d'un patrimoine architectural composé de belles demeures, d'hôtels intégrés, de rues silencieuses, de palais majestueux. Tout nous invite à Sidi Bou Saïd à ne plus se laisser faire par les petits trafics mais à réfléchir à un projet culturel d'avant garde, pouvant permettre à Sidi Bou Saïd d'envisager l'avenir de celui-ci dans le sens de sa revalorisation culturelle profonde. Notre ami Raouf Dakhli, maire de Sidi Bou Saïd ne s'opposera certainement pas à aller dans ce sens. Les autorités culturelles ne verront pas d'un mauvais œil une reconversion du village et de son patrimoine en appuyant les activités artistiques déjà en partie existantes et en créant un musée d'art pictural moderne et contemporain basé sur les travaux centrés sur le village depuis le 19 ème siècle. Oui, la butte de Sidi Bou Saïd pourrait être un modèle pour tous les villages vivant les mêmes conditions que les siennes.