Le déficit commercial ne cesse d'enregistrer des records. Il a atteint 9408 millions de dinars durant les 8 premiers mois, et a dépassé le cap des 10.000 millions de dinars au mois de Septembre. Un déficit important qui a pesé énormément sur la balance de paiement, et a été causé principalement par la baisse des exportations, face à une hausse des importations. Le gouvernement a tenu récemment une réunion d'urgence consacrée à la maîtrise de ce déficit, avec à la clé la décision de le réduire de 600 millions de dinars. Or, le déficit ne se « décrète » pas, c'est le fruit d'une conjoncture et d'une politique. Le gouvernement de technocrates a-t-il les moyens de concrétiser ses ambitions ? Une situation grave Le dernier communiqué de la Banque Centrale a tiré la sonnette d'alarme pour la énième fois sur la gravité du déficit commercial. En effet, il a enregistré « la poursuite du dérapage du déficit de la balance courante (+34,8% ou 1.412 MDT) qui a atteint 5.470 MDT au cours des huit premiers mois de l'année 2014, ce qui représente 6,6% du PIB, contre 5,3% pour la même période de 2013 et ce, en raison de la hausse continue du déficit de la balance commerciale (+22,7% à fin août 2014) dépassant 9,4 milliards de dinars, suite au repli des exportations (-0,6%) et à l'augmentation des importations (+6,2%). Aussi, le Conseil a-t-il mis l'accent, plus particulièrement, sur l'aggravation continue du déficit de la balance énergétique (augmentation de 71%) qui a atteint, sur les huit premiers mois de l'année en cours le même niveau enregistré pour toute l'année 2013, contribuant ainsi à plus de 60% dans l'élargissement du déficit commercial global ». Les chiffres du commerce extérieur des 8 premiers mois 2014 font état d'un déficit de 947 millions de dinars dans la balance alimentaire, de -2545 millions de dinars dans la balance énergétique, – 2707 millions de dinars dans la balance des matières premières et demi-produits, et de -2746 dans la balance des biens d'équipement. C'est donc un déficit global dans toutes les rubriques de la balance commerciale. Le déficit vient principalement de deux rubriques importantes : * Le déficit de la balance énergétique : La Tunisie enregistre depuis des mois l'affluence de ressortissants libyens sur notre sol. Ils sont estimés à 2 millions par les services du ministère de l'Intérieur, et même plus selon d'autres sources. On compte pas moins de 600 mille véhicules libyens circulant en Tunisie, toutes énergivores. Cette situation a créé une hausse de la demande sur les produits énergétiques de plus de 35%, selon nos calculs. Cette situation est aggravée par la baisse de notre production de pétrole qui a chuté de 75 mille barils par jour à 56 mille barils, suite à l'arrêt de certaines explorations et la position incomprise de l'ANC face à l'octroi de nouveaux permis d'exploration. En effet, aucun permis n'a été octroyé en 2014. * Le déficit de la balance alimentaire : Les chiffres du commerce extérieur enregistrent une baisse des exportations de l'industrie agroalimentaire après une baisse des exportations d'huile d'olive. Les importations de blé ont aussi augmenté suite à une récolte médiocre en 2013. * Les exportations de phosphates : La situation sociale du bassin minier a engendré plusieurs perturbations dans la production de phosphate, principal produit exporté. En effet, on enregistre une baisse de -2.9% dans nos exportations durant les 8 premiers mois.
Le gouvernement peut il réduire le déficit ? La réponse est mitigée. En effet, la décision de réduire le déficit commercial ne date pas d'aujourd'hui. L'actuel gouvernement avait tenu un conseil ministériel il y a 3 mois et a pris la même décision avec la fixation d'une liste de produits à contrôler lors de l'importation. Cette liste n'a pas été dévoilée jusqu'à nos jours. Le seul élément concret pour ce gouvernement réside dans la réduction des importations de voitures par les concessionnaires. Une décision avait déjà été prise de reporter le quota restant à importer pour les questionnaires pour 2014 à 2015.Le montant de ce report est de 50 millions de dinars. On est loin des 600 millions de dinars envisagés. La réponse est mitigée, car le gouvernement va être aidé par une bonne conjoncture agricole. En effet, ce n'est pas par des mesures mais par la nature que le déficit peut être réduit. La récolte céréalière enregistre une hausse de 49% par rapport à 2013 selon le ministère de l'Agriculture. Elle a atteint 23 millions de quintaux, dont près de 2,7 millions de quintaux de blé dur (70% des besoins de la Tunisie) ont été récoltés, ce qui permettra de réduire les importations de la Tunisie en céréales d'environ 80 millions de dollars au cours de l'année 2015. La valeur des importations tunisiennes en céréales (essentiellement blé dur) est estimée à 700 millions de dollars au cours des années de sécheresse et 500 millions de dollars au cours des bonnes saisons, soit 200 millions de dinars de gain. Du côté de l'huile d'olives, les prémices d'une bonne saison sont avérées. En effet, la Tunisie s'attend à «une importante récolte» d'olives frôlant les 270.000 tonnes pendant la saison actuelle, soit une hausse de 280% par rapport à la saison dernière. L'exportation d'huile d'olive engendre environ 700 millions de dinars dans les bonnes saisons. L'autre produit d'exportation est celui des dattes, dont les estimations tablent sur une hausse de 5%, rien que dans la région de Tozeur, soit 50 mille tonnes, profitant des bonnes conditions climatiques et l'entrée de nouvelles variétés. Sur un autre plan, le gouvernement ne donne pas une grande importance pour le développement des exportations, vu que c'est un élément tributaire de la situation économique du pays et de l'environnement des affaires. En effet, une grande partie de nos exportations sont au régime off shore, détenus par des multinationales qui commencent à bouder le site Tunisie. Le reste des exportations est tributaire de la pluviométrie, à l'instar du blé, de l'huile d'olive et des dattes, ou du climat social à l'instar du phosphate. L'intervention du gouvernement est donc très réduite. La performance de ce gouvernement sur le dossier du déficit commercial est principalement entre les mains de Dieu.