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La révolution tunisienne sous le prisme de la BAD
Publié dans L'expert le 18 - 04 - 2011


Les perspectives économiques

Pour appuyer la mise en place de la stratégie d'appui de la Banque africaine de développement (BAD) à la Tunisie, partenaire historique et deuxième client historique de l'institution derrière le Maroc, les départements de la Banque chargés des opérations en Afrique du nord et de la recherche sur le développement publient une note économique sur les enjeux et perspectives économiques du pays après la révolution au moment où le gouvernement tunisien de transition vient d'annoncer son plan de relance économique.
Pendant des décennies, la Tunisie a été considérée comme un exemple de réussite sur le continent africain. Elle s'est distinguée par une saine gestion macroéconomique accompagnée d'impressionnants acquis sociaux, qui en a fait l'un des pays les plus performants d'Afrique.
Cette idée a été renforcée par les progrès accomplis par le pays ces dernières années, notamment son prompt redressement après la crise économique de 2009 caractérisé par une croissance du PIB de 3,7 % en 2010 et d'importantes avancées dans le sens de la réalisation des Objectifs du Millénaire pour le développement. Beaucoup en sont venus à conclure que la Tunisie était, pour l'essentiel, un modèle de développement durable fondé sur de bonnes pratiques.
Pourtant, le 14 janvier 2011, l'ex-président Zine El Abidine Ben Ali a quitté le pouvoir après un mois de manifestations et de violents affrontements qui se sont soldés par plus de 200 décès. L'agitation sociale et politique qui a embrasé la Tunisie en janvier montre qu'en dépit du relatif succès économique du pays, les principaux problèmes sociaux et de développement n'avaient pas été résolus.
La combinaison du chômage des jeunes diplômés avec de flagrantes pratiques prédatoires de corruption ainsi que l'exclusion politique et économique avait créé, chez les Tunisiens, une situation intenable de mécontentement qui a tourné à la révolution et mis un terme à 23 ans de règne du deuxième président du pays.
La présente note passe en revue les différents facteurs qui ont conduit aux récents troubles sociaux. Elle analyse ensuite l'environnement macroéconomique et présente une série de scénarios économiques pour 2011 et 2012.
Les principaux défis de développement persistent après la révolution
Même si les troubles sociaux ont en fin de compte pris une tournure politique, ses causes profondes résident dans les difficultés quotidiennes auxquelles est confrontée la population.
Les troubles sociaux en Tunisie se sont produits malgré de présumés progrès sociaux. La Tunisie obtient une note satisfaisante en matière de progrès en direction des Objectifs du Millénaire pour le développement. Pour ce qui est de l'Indicateur de développement humain, elle obtient également d'impressionnantes notes, occupant la 98e place sur 182 pays. En Afrique, trois pays seulement se classent mieux que la Tunisie (la Lybie est 55e, les Seychelles 57e et Maurice 81e).
Cependant, en dépit de ces avantages sociaux, le pays fait face à des niveaux élevés de chômage chez les jeunes—en particulier les jeunes diplômés—à d'importantes inégalités régionales et à des difficultés liées à la gouvernance. Ces problèmes qui sont à l'origine de la révolution persistent et le gouvernement devra s'y attaquer de toute urgence.
Chômage des jeunes diplômés
La lutte contre le chômage a certes été la plus grande priorité de la politique économique de la Tunisie pendant plusieurs années, mais le gouvernement n'est pas parvenu à créer un nombre suffisant d'emplois destinés aux jeunes diplômés. Si le taux global de chômage est resté supérieur à 14 %, chez les jeunes diplômés, le niveau du chômage s'est accru par un facteur de 10 au cours des deux dernières décennies et a atteint 20 % en 2010 (figure 1). La tendance à la hausse du chômage des diplômés d'université est la conséquence de l'explosion de la population juvénile, du rendement élevé des universités, de l'inadéquation entre la demande et l'offre de main-d'œuvre qualifiée, et de la piètre qualité relative de la formation reçue par beaucoup de diplômés.
S'il y a un manque manifeste de possibilités d'emploi pour les jeunes, il semble par ailleurs exister une inadéquation entre le domaine de spécialisation choisi et les réalités du marché du travail. Le taux de chômage qui atteignait 47,1 % en moyenne chez les jeunes détenteurs d'une maîtrise en économie, en gestion ou en droit et 43,2 % pour les titulaires d'une maîtrise en sciences sociales, témoigne de cette situation.
En revanche, ce taux s'établissait à 24,5 % chez les diplômés en génie
.
Le problème du chômage des jeunes diplômés ne sera pas résolu rapidement, car la population active tunisienne s'accroît, les nouveaux venus s'ajoutant au stock des personnes déjà sans emploi. Mais plus important encore, à cause de l'incidence de la révolution sur la capacité de production, la confiance des investisseurs et l'insécurité locale, l'activité économique devrait baisser à court terme, surtout dans les secteurs de l'industrie et du tourisme. Outre la destruction des emplois existants, cette situation pourrait gravement entraver la création d'emplois dans les mois à venir.
L'un des principaux défis que doit relever le gouvernement consistera à créer des possibilités d'emploi décent pour les jeunes diplômés en chômage. En janvier 2011, le gouvernement intérimaire a établi un programme offrant aux jeunes diplômés en situation de chômage chronique des possibilités d'emploi à temps partiel dans le secteur public. Dans le cadre de ce programme, les employés travailleraient à temps partiel et percevraient un salaire mensuel de 200 dinars tunisiens et ils bénéficieraient d'une couverture d'assurance-maladie ainsi que de tarifs préférentiels de transport public.
Disparités régionales
La Tunisie a certes connu une réduction considérable de la pauvreté et une amélioration des indicateurs sociaux, mais il subsiste d'importantes disparités socioéconomiques. Le problème des disparités régionales étaient au cœur de l'agitation sociale qu'ont connue les villes de Sidi Bouzid, Kasserine et Thala dans la région centre-est du pays.
Globalement, la côte orientale est mieux lotie que les régions de l'ouest et du sud (voir figure 3). La population et l'activité économique sont principalement concentrées dans le nord-est (gouvernorat de Tunis) et dans le centre-est (gouvernorat de Sfax), 75 % d'emplois non agricoles se trouvant dans la région côtière. Il s'ensuit une importante variabilité de la consommation moyenne et de la pauvreté d'une région à l'autre. En 2000, si l'indice de pauvreté (moyenne nationale) s'élevait à 18,4 %, il variait en fait de 6,9 % dans le district de Tunis à 30,8 % dans le centre-ouest (voir figure 4). De même, le chômage est tout particulièrement aigu dans l'arrière-pays. En moyenne, depuis 2004, le taux de chômage dépasse 22,6 % dans les régions de Jendouba, Le Kef, Kasserine et Gafsa.
Toutefois, les régions les plus pauvres ont par ailleurs pâti d'une négligence de la part des autorités, les régions côtières bénéficiant de 65 % de l'investissement public. En conséquence, le centre-ouest est la région la plus pauvre du point de vue de la prestation des services publics (santé et éducation), comme l'illustrent le nombre d'habitants par pédiatre et le taux d'analphabétisme juvénile. Pour assurer la paix sociale, le prochain défi majeur pour le gouvernement tunisien consistera à réduire les inégalités entre les régions.
Gouvernance et corruption
S'agissant de la gouvernance, le rang occupé par la Tunisie est relativement élevé par rapport à celui de la moyenne des pays de la région Moyen-Orient et Afrique du Nord et, mieux encore, à la note de l'Afrique subsaharienne. L'indicateur relatif à la voix et à la responsabilité constitue toutefois une exception. Transparency International classe la Tunisie au 59e rang sur 178 pays, ce qui en fait le pays occupant la meilleure place en Afrique du Nord. Cela étant, Freedom House4 fournit des données probantes montrant que la Tunisie accuse d'importantes lacunes en matière de droits politiques et de libertés civiles. Les indicateurs de Freedom House tendent en outre à indiquer que la Tunisie avait l'un des pires environnements médiatiques du monde arabe en 2010, le gouvernement recourant à tout un arsenal juridique, pénal et économique pour réduire au silence les voix dissidentes.
Fait plus important peut-être, la corruption flagrante au sein des plus hautes instances décisionnelles de la Tunisie a été un facteur déterminant du soulèvement populaire qui a conduit à la chute de l'ex-président Ben Ali. Celle-ci a facilité au cours des 20 dernières années, le développement d'un empire financier –fondé sur des biens mal-acquis – sans précédent en Tunisie, notamment dans les secteurs des médias, des transports, des banques, des télécommunications, du tourisme, des services aéroportuaires et du détail. Ces acquisitions douteuses se sont accélérées pendant le programme de privatisation au début de 2000, tout comme l'octroi de prêts bancaires à de très faibles taux d'intérêt qui ont permis la prédation d'actifs.
La Global Financial Integrity Foundation a estimé le coût de la corruption dans le pays à environ 1 milliard de dollars par an
.
Prévision de l'impact de la révolution sur l'économie tunisienne
Prévisions économiques à court terme
La révolution est porteuse de grandes promesses pour la Tunisie et ses fruits à plus long terme pourraient bien être importants du point de vue de la croissance économique ainsi que de l'équité et de la cohésion sociale. La situation politique du pays reste toutefois fragile.
Outre les défis de la transition politique, le gouvernement est confronté à court terme à la situation d'urgence immédiate occasionnée par un rétrécissement de la marge de manœuvre financière et des exigences sociales croissantes, tandis que les problèmes liés au chômage des jeunes, aux disparités régionales et à l'exclusion économique ne peuvent rester non résolus.
Les autorités ont estimé que lors des récentes perturbations, des pertes de 5 et 8 milliards de dollars (à peu près 4 % du PIB) ont été enregistrées, les recettes touristiques fortement touchées, les principaux investissements suspendus et des milliers d'emplois perdus. Au cours du mois de janvier 2011, un montant de 1,8 milliard de dinars a été injecté dans le secteur bancaire pour endiguer un retrait massif. Cette situation contraste avec celle de surliquidité qu'a récemment connue la Tunisie et qui a conduit à l'absorption de 1,1 milliard de dinars durant l'ensemble de l'année dernière. Les réserves de change ont diminué, passant de 13 milliards de dinars (147 jours d'importations) en fin décembre 2010 à 12,2 milliards de dinars (139 jours) en janvier 2011.
Le modèle des Perspectives économiques en Afrique a été utilisé pour prévoir les impacts macroéconomiques à court terme, sur la base de trois scénarios, à savoir ceux à hypothèse haute, moyenne et basse. Le tableau 1 montre les résultats récapitulatifs reposant sur ces trois scénarios.
Dans les trois scénarios, la croissance du PIB est affectée par une baisse de la demande de services touristiques, la perturbation de l'activité économique et la réduction des investissements directs étrangers. Le scénario à hypothèse moyenne laisse prévoir une croissance du PIB de 1,1 % en 2011, suivie d'une légère reprise de l'économie à 3,3 % en 2012. L'investissement privé se contractera, tandis que les dépenses publiques courantes, en particulier les traitements et salaires, augmenteront considérablement en raison de l'accroissement des demandes sociales. Le déficit financier s'élèvera à 5,2 % du PIB en 2011. Le déficit courant augmentera pour s'établir à 7,6 % du PIB, sous l'effet d'une augmentation des importations et d'une baisse des recettes touristiques. De même, l'inflation pourrait s'accroître pour se fixer à au moins 4,7 %.
Le taux de croissance du PIB pourrait connaître une augmentation — s'établissant à 3,6 %—en 2011, suivie d'un rapide redressement à 4,2 % en 2012, en cas de prompte normalisation de l'économie et reprise du secteur touristique, appuyées par de solides financements extérieurs et investissements directs étrangers, ainsi que par un plan de relance financière bien ciblé. Le déficit financier demeurera contenu à 3,9 % du PIB, mais le déficit courant atteindra 6,1 % du PIB, en raison de l'accroissement du déficit de la balance commerciale—l'exportation des produits manufacturés suscitant une augmentation des importations—et d'une baisse des recettes touristiques. L'inflation sera maîtrisée à 4,2 %, même si le niveau élevé des prix alimentaires et pétroliers internationaux exercera une pression sur la balance commerciale et le compte courant.
Néanmoins, en cas d'instabilité politique et sociale prolongée, l'économie pourrait se contracter de 2,5 % en 2011. Les investissements tant publics que privés se contracteront, tandis qu'un recrutement massif et une augmentation salariale dans le secteur public auront une incidence négative sur le déficit financier, lequel pourrait atteindre 6 % du PIB. Le gouvernement essaiera, dans ce cas, de répondre uniquement aux demandes sociales, au détriment de l'équilibre budgétaire, de la balance des paiements courants et de la lutte contre les pressions inflationnistes. Le déficit courant augmentera pour s'établir à 8,9 %, en raison de l'importante perte enregistrée dans les recettes touristiques et de l'augmentation des importations suscitées par un accroissement de la consommation et une baisse des exportations. L'inflation pourrait atteindre au moins 6,4 %, sous l'effet de l'augmentation salariale, de la dépréciation, et des prix alimentaires et pétroliers internationaux élevés qui seront répercutés sur les prix nationaux en dépit du niveau élevé des subventions. Dans le cadre du scénario à hypothèse basse, une lente croissance positive de 2,4 % est prévue en 2012.


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