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Tunisie: Ennahdha, entre le sacré et le sacrilège
Publié dans Tunisie Numérique le 28 - 08 - 2012

Dès qu'on épingle les dignitaires d'Ennahdha pour leur double langage et leur discours ambivalent, ils réagissent au quart de tour et rivalisent de démentis et de poncifs. Toujours la même ligne de défense : Campagne de dénigrement, procès d'intentions, velléité de défigurer le parti et de pervertir son message. Pourtant les faits sont têtus, il suffit d'observer leurs sorties médiatiques, leurs affiches et leurs professions de foi pour en être convaincu, si besoin est.
Ces derniers temps, le parti Ennahdha s'est répandu en saillies d'ordre religieux et en actes d'expropriation du référentiel islamique coïncidant comme par hasard avec les opérations “coups de poing” et les descentes contre les “kouffar”, menées, tambour battant, par la mouvance salafiste. Le premier instrumentalise l'Islam à coups de manœuvres politiques et de discours démagogiques et le deuxième, moins soucieux de la forme, manie le gourdin et le sabre pour “chasser les sorcières”, fort de ce climat de complaisance, voire d'impunité. Tous les deux, prétendument dépositaires attitrés et néanmoins autoproclamés de la foi en Tunisie, s'emploient à promouvoir et enraciner une toute autre idée de l'Islam, version wahhabite, que les tunisiens, théologiens, érudits et penseurs libres, ont catégoriquement rejeté depuis des lustres. En effet, depuis 1810, la doctrine wahhabite a été farouchement combattue, sans appel et sans concession, par le Bey Hammouda Pacha avec l'appui inconditionnel et éclairé des éminents théologiens de la mosquée Zitouna, notamment le Cheikh Ibrahim Riahi.
Vouloir utiliser la révolution tunisienne et l'environnement d'instabilité, de friction et surtout de liberté qu'elle a créé comme une brèche ou un levier pour revenir à la charge et répandre le wahhabisme c'est ramer à contre courant de l'histoire de la Tunisie, de sa personnalité et de sa conception modérée et moderne de l'Islam. Le wahhabisme n'a jamais pris racine en Tunisie malgré tout l'arsenal idéologique et matériel mis à cet effet. Le prosélytisme et la violence au service d'un insalubre et anachronique projet wahhabite, voilà la quintessence de la démarche et de l'objectif. Par le biais d'une distribution de rôle, associant la rhétorique religieuse à l'intimidation physique, les compères du wahhabisme, rampant à visage couvert, tel un ennemi masqué, se casseront les dents comme ils ont été contrés et laminés naguère.
Tendance à sacraliser le politique
Le grand parrain, à savoir Rached Ghannouchi, ne vient-il pas d'asséner lui-même que ceux qui s'opposent à son parti s'opposent à l'Islam, sacralisant du coup ce dernier et reléguant l'opposition au rang d'apostat. Quiconque s'y frotte est, par définition, un suppôt de Satan, un “kafer”, voué aux bûchers de l'enfer! Un seul mot critique contre Ennahdha équivaut à une atteinte contre l'Islam. L'amalgame est à son paroxysme. L'hérésie se décline par rapport au temporel et non plus au spirituel. Et voilà comment on cultive la confusion et on prend l'Islam en otage à des fins bassement politiques et électorales.
Désormais, le paysage politique n'est plus animé par la majorité et l'opposition mais fait l'objet de bras de fer entre les croyants et les mécréants. D'ailleurs, Ennahdha a toujours vicié le débat en le faisant basculer systématiquement dans les méandres de l'identitaire et du sacré, débat où elle dispose d'une longueur d'avance compte tenu de la foi musulmane de la société tunisienne. Donc, le champ est fertile pour soulever un tel débat et désigner les adversaires, voire même les ennemis. Somme toute l'unique confrontation qu'elle a les moyens de gagner et, à travers laquelle, de tenir tête au front opposé. C'est son terrain naturel, son fief de prédilection. D'où la propension des stratèges d'Ennahdha à susciter et à nourrir la controverse.
Il est révélateur de constater que chaque fois que le gouvernement est en mauvaise passe, un conflit d'ordre identitaire ou à forte connotation religieuse est aussitôt monté en épingle pour en faire un débat de société et, par là, faire diversion sur la marche boiteuse du gouvernement. Cette tactique pour le moins subversive a toujours ponctué la démarche politique d'Ennahdha, notamment depuis son accession au pouvoir.
Les pontes d'Ennahdha n'en sont pas à leur premier dérapage. Pour preuve : Nourredine Khademi, ministre des Affaires religieuses, a assimilé le local de son parti à une mosquée, en réaction à l'attaque perpétrée contre ledit local à Sidi Bouzid. Donc, pour Ennahdha, son local est un lieu de prière, de culte. Bref, le temple de l'Islam. Encore un peu et le siège sera réputé substitut de la “Kaaba”. Se déclarant, en conséquence, investi d'une mission hautement divine, Ennahdha joue désormais dans la cour des prophètes.
La voix messianique n'en démord pas. En effet, Ennahdha, droit dans ses bottes orthodoxes, s'est surpassée en matière de marketing religieux, promettant le paradis à ses affiliés, actuels ou futurs. Grossir les rangs d'Ennahdha est désormais un devoir divin. Dieu, notre Dieu à tous, serait-il au service exclusif d'Ennahdha ? Le discours sur l'emploi, le développement régional, la liberté, la répartition équitable des richesses ou les objectifs de la révolution, revendications trop terre à terre, ne sont que des produits d'appel, des effets d'annonce. Le paradis clé en main, il fallait y penser ! Pour le bon peuple bien averti, la carte d'adhérent est synonyme de “chèque en blanc”, un ticket d'absolution et de rédemption, et un billet pour se purger de ses souillures terrestres et pour franchir allégrement les portes de l'Eden.
Propension à politiser le sacré
Ces trois épisodes édifient sur le véritable agenda d'Ennahdha. En plus de sacraliser le politique et de l'habiller de forte symbolique religieuse, Ennahdha se démène à politiser le sacré en faisant le forcing pour incriminer toute atteinte au sacré. Une tactique à double vitesse dans la droite lignée de la mouvance salafiste dont le fond de commerce s'appuie sur la même plateforme idéologique et la même opposition sacré/profane (hlel/ hram). Deux facettes de Janus au service de la même cause, à savoir, la quête de ré-islamisation de la société selon une autre doctrine, par le politique pour Ennahdha et par le social pour les salafistes. Chantier ultime ainsi lancé en amont et en aval.
Nul n'est prophète en son pays, dit-on. Ce n'est pas le cas de la Tunisie, nous avons notre messager national. Nous autres tunisiens, sommes reconnaissants que Cheikh Ghannouchi soit parmi nous, sinon nous ne serions qu'un ramassis de païens, un troupeau écarté du droit chemin, destiné au purgatoire. Ce n'est point fortuit qu'on lui refile à tout-va du “radhia Allahou anhou”. Dans la foulée, encore un pas et Cheikh Ghannouchi sera affublé du titre “Commandeur des croyants”.
Derrière cette posture par trop messianique et franchement transcendante , ne cherche-t-on pas en fait à diluer la crise sociale dans le clivage moral et dissoudre les enjeux nationaux dans l'eau bénite de l'identité, remettant au goût du jour les effluves caverneuses et distillant l'extrême onction à la personnalité tunisienne, longtemps séculière, moderne, modérée et ouverte. Tentative de dissimuler l'incompétence criarde et le lourd déficit socio-économique du gouvernement derrière les artifices religieux et les méandres factices de l'identité. Jamais la Tunisie n'a souffert d'une quelconque crise identitaire ou d'une lecture belliciste de l'Islam. Le consensus a toujours prévalu malgré les velléités de créer et nourrir les foyers de la discorde. Pourquoi alors aujourd'hui tenter le diable et attenter à l'identité culturelle et nationale, pourtant homogène et fédératrice, si ce n'est pour des visées confessionnelles importées et non moins incompatibles.
En résumé, les pontes d'Ennahdha restent fidèles à leurs idées. Ils n'ont fait que répéter les mêmes slogans manichéens, abusivement utilisés lors de la campagne électorale, confirmant, sans s'en rendre compte peut-être, les accusations, naguère farouchement contestées.


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