Ennahdha, a voir ses ministres et autres représentants, crie à la victoire, et pourquoi pas à l'anéantissement de l'UGTT, cet « ogre » fascinant de force, forgé au feu de la lutte de libération, nourri par le sang de Hached et consorts, érigé en citadelle par Bourguiba et ses ministres. Oui, Ennahdha pense être venue à bout de cette légende. Elle peut même remercier les responsables des derniers faits divers qui ont curieusement fait irruption dans le quotidien du tunisien connu pour détester qu'on bouscule son petit train-train de vie tranquille et sans histoires. Ennahdha peut donc penser d'ores et déjà à élaborer ses règles de jeu sans craindre un contre poids de taille, qui aurait pu dresser le peuple contre elle. Elle peut ébaucher sa construction de la Tunisie telle qu'elle l'aime et qu'elle l'imagine, en calquant sur les modèles des Etats islamiques qui l'ont précédée. Oui, mais... Oui, mais cette vision des derniers évènements serait vraiment très restreinte, puérile, à la limite absurde. Car Ennahdha, est-elle vraiment sortie victorieuse de ce bras de fer ? Pas si sur ! Car en face, ce qui s'est passé était ahurissant ! La mobilisation qu'a réussi à engendrer l'UGTT autour d'elle, était inouïe ! Elle a su drainer autour de sa cause la plupart des partis politiques de la Tunisie, y compris les deux alliés d'Ennahdha dans la Troïka. La mobilisation de la société civile a été sans précédant. Les tunisiens n'étaient pas du reste. Ils ont afflué par vagues vers le siège du syndicat, vers ses locaux régionaux, vers les marches et manifestations... Et surtout, l'UGTT était forte par le soutien et les manifestations de solidarité des forces syndicales internationales. Oui elle était forte, l'UGTT, tellement forte qu'elle a appliqué le vieux adage qui dit que « La vraie force est la force de pouvoir pardonner » ou plus précisément dans son cas la force de pouvoir passer l'éponge, en attendant de voir. Et puis, il y avait aussi la conjoncture fortuite ou pas, où la situation sécuritaire était des plus embarrassantes. Oui, au risque de décevoir beaucoup de « va-t-en guerre » la centrale syndicale a compris qu'elle a suffisamment fait étalage de sa force, de son poids dans le jeu politique et social, qu'elle peut se permettre de faire machine arrière juste avant le combat final. De toutes les façons, la peur bleue qu'ont attrapée ceux d'en face était assez éloquente, rien ni personne n'a été laissé de côté pour tenter quelque chose avant le coup de gong. Le branle bas de combat était total et désordonné fait de cafouillages, de fausses manœuvres de maladresses, de manœuvres de diversion grotesques... Et puis l'avenir démontrera qu'il y a eu l'avant 13 décembre et qu'il y aura l'après 13 décembre. Et là où a résidé la vraie force tactique de l'UGTT, c'était dans la semaine de délais laissée entre l'annonce et la date prévue de la grève. Cette semaine a été suffisante pour faire le constat des forces en présence. Donc, les déclarations à chaud et les fanfaronnades des bleus et des pas mûrs ne doivent pas éclipser la victoire de la force tranquille, surtout que la grogne gronde toujours dans les entrailles de l'ogre revigoré de ses soutiens. Et la question qui sera de mise les prochains jours, c'est : Sous quelle forme et sous quelle nomination se mueront les milices anciennement nommées salafistes, puis LPR ? Car à chaque mésaventure, et dès qu'ils sont grillés, ils se terrent pendant quelques jours pour réapparaître sous une nouvelle nomination et avec un nouveau look. La réponse à cette question, nous la connaitrons à la prochaine agression contre des personnalités ou des militants et des locaux de Nidaa Tounes...