Nidaa Tounes et Ennadha ont scellé une alliance d'intérêts, imposée par les résultats des urnes et que le bon sens commande. Cette réalité contraint les deux partis à cohabiter en bonne intelligence. Une situation à laquelle s'est accommodé les Tunisiens dont certains voient d'un bon œil que les plus deux grandes formations politiques gèrent les affaires du pays dans l'apaisement et la quiétude. Mais la persistance des problèmes dans le pays et les intérêts égoïstes et étroits des partis peuvent parfois mener à des divergences profondes et dévoiler au grands jours la fracture qui sépare les uns et les autres. En outre , il existe des dossiers qui constituent souvent des occasions de frictions entre les deux partis, à savoir l'Instance de la Vérité et Dignité (IVD), la justice transitionnelle, la loi de réconciliation économique et financière, les Ligues de protection de la révolution, les réseaux d'envoi des jeunes vers les zones de conflits, les événement de Tataouine et autres questions qui opposent traditionnellement Nidaa Tounes et Ennahdha. Alliance ou cohabitation N'ayant pas obtenu la majorité absolu lui permettant de former un gouvernement Nidaa Tounes qui refusait toute alliance avec le mouvement islamiste, a fini par tempérer ses ardeurs et abdiquer à la realpolitik. Tout en récusant le terme d'alliance pour qualifier son rapprochement avec Ennahdha, Nidaa Tounes a accepté d'associer le mouvement au pouvoir en lui accordant des portefeuilles ministériels. Une décision qui a permis au gouvernement de faire passer allègrement toutes les décisions à l'Assemblée des représentants du peuple (ARP). Les différents dissensions au sein de Nidaa Tounes et les scissions qu'il y a eu ont affaibli Nidaa Tounes qui n'est plus le premier parti à l'ARP comme c'était le cas au lendemain des élections de 2014. Aujourd'hui, Nidaa Tounes compte quelque 59 députés alors qu'il en possédait 86 à l'issue des élections législatives du 26 octobre 2014. Cette situation a rendu le parti de Nidaa Tounes davantage plus dépendant du mouvement Ennahdha qui peut bloquer toutes les décisions à l'Assemblée. Cela s'est largement reflété dans la composition du gouvernement d'union nationale où Ennahdha qui avait une représentation symbolique lors du gouvernement de Habib Essid, s'est taillé la part du lion dans celui de Youssef Chahed. Consciente de son impopularité toujours de mise au sein de l'opinion publique Tunisienne et de l'hostilité d'une grande partie de la classe politique, Ennahdha oeuvre à agir dans l'ombre de Nidaa Tounes en veillant à ne pas se mettre sous le feu des projecteurs. En dépit des changements proclamés et la nouvelle orientation prise par le parti en séparant le politique du religieux, Ennahdha suscite toujours la peur au sein d'un large frange des Tunisiens qui ne lui pardonnent pas ses erreurs. Encore très marqué par son passage au pouvoir et son expérience avec la Troïka, Ennhdha veut pour l'instant rester en retrait en laissant les commandes à Nidaa Tounes pour mieux bondir lors des prochaines élections où le mouvement islamiste risque de faire un raz de marrée. Divergences Mardi 11 juillet 2017, le groupe parlementaire de Nidaa Tounes s'est retiré de la séance plénière pour protester contre ce qu'il a qualifié de mauvaise gestion des débats par le vice-président de l'ARP, Abdelfattah Mourou relatifs à la création d'une commission d'enquête sur les événements de Tataouine. C'est connu, Abdelfattah Mourou est issu des rangs de Ennahdha où il occupe le poste de vice-président du mouvement. Donc, il s'agit là d'une accusation directe qui vise Ennhadha qualifiée de faire obstacle à la création d'une telle commission. Rappelons que certains dirigeants du parti islamiste ont pris position pour les protestataires de Tataouine qui réclament des projets de développements et la création d'emplois et dont le mouvement a dégénéré pour se solder par la violence ayant fait un mort et provoqué l'incendie des sièges des districts de la police et de la garde nationale dans le ville. Certains sont allés jusqu'à accuser Ennahdha d'être derrière le mouvement de protestation à Tataouine et de l'attiser. Si de pareils incidents se multiplient à l'ARP entre les deux principales composantes du gouvernement, cela donnera un signe d'essoufflement de la cohabitation et un de coup de semonce de cette alliance d'intérêt. Cela donnera aussi un argument supplémentaire à l'opposition dans son appel pour des élections générales anticipées en arguant l'impasse politique et économique qui règne dans le pays.