«Hozni wa alami kabiraan» (Ma peine et ma souffrance sont grandes). C'est l'une des fameuses phrases prononcées par l'ancien président de la République dans l'un de ses derniers discours. Cette même phrase n'a pas cessé d'être reprise par une téléspectatrice éveillée à propos du passage d'Hillary Clinton, secrétaire d'Etat américaine sur NessmTV a dans la soirée du mercredi 17 mars. Avons-nous fait la révolution de la dignité pour nous confondre en courbettes devant Hillary? Mrs Hillary s'en est merveilleusement bien sortie, a distribué sourires et rires très généreusement et très naturellement. Habillée très sport, pour, semble t-il, bien communiquer avec les jeunes, elle a su séduire. Elle a répondu à certaines questions d'une simplicité frôlant la superficialité, avec une aisance sans pareille. Normal, il n'y avait ni de questions pièges, ni de questions embarrassantes. Madame pouvait «intervenir tranquille» Les questions n'étaient pas très recherchées, ne touchaient pas des problèmes de fond, comme les programmes exacts des Etats-Unis sur la Tunisie, la dette de la Tunisie, les actions lancées en vue de booster les investissements, l'importance de la Tunisie de l'après révolution sur l'échiquier géostratégique de la première puissance mondiale, ce qui va changer dans les relations de notre pays avec les USA, le visa d'accès aux States ainsi que les critères d'éligibilité pour l'avoir, le rôle des Etats-Unis dans la chute et le départ de Ben Ali, la position américaine de l'occupation de nouveaux territoires palestiniens par Israël et autres plus intéressantes, les unes que les autres. Les questions peu étudiées ont fait dire à Riadh Ferjani, universitaire expert en audiovisuel, "L'interview" de H. Clinton sur NessmaTV est une catastrophe nationale pour la crédibilité des professionnels des médias: des intervieweurs apeurées et timorées''. D'autant plus que ce que nous retenons de la visite de Madame Hillary, ce sont les contrats signés pour le compte de Microsoft avec l'Etat tunisien. Je me trompe ou y aurait-il un contrat qui aurait été signé sans que l'on ne sache, au lieu de vendre la Tunisie, elle nous a vendu l'Amérique... Il est connu par ailleurs que Tarak Ben Ammar s'est imposé aux States par la qualité de son travail, ce qui a fait de lui, en 1999, le conseiller de Rupert Murdoch pour ses investissements en Europe, Afrique du Nord et Moyen Orient. Il l'aurait assisté dans une prise de participation à NewsCorp, aux côtés de Telecom Italia, dans la chaîne à péage Stream et jusqu'à l'achat en 2002 de la chaîne Telepiu au Groupe Vivendi, pour fusionner ensuite avec Stream, créant ainsi la plateforme SkyItalia. Ses relations avec Berlusconi, ami et partenaire professionnel sont notoires tout comme ses rapports avec le show biz américain. Ce qui expliquerait peut-être le choix de NessmaTV, outre sa dimension maghrébine. Mais avec tout le respect que nous devons à M. Ben Ammar, grand producteur tunisien qui «ne vendrait jamais son âme ni ses valeurs pour un film», l'accueil de la grande dame de la diplomatie américaine aurait pu se faire de manière plus discrète et plus fine. On aurait dû faire preuve de plus de retenue et de réserve. Oui, on aurait pu nous épargner le spectacle d'autant de servitude dans l'accueil d'Hillary à tel point qu'au lieu de voir des Tunisiens fiers de leur révolution et des changement qu'ils ont produits dans le monde entier et pas seulement arabe, nous avons vu des sujets. Ceux qui ont fait la révolution voulaient nous voir debout, dos bien droits et regardant nos vis-à-vis droit dans les yeux en égaux.