Des hommes vêtus de blouses de différentes couleurs, avec chacun un badge, avec des numéros et des initiales du genre: AMM 324. Y en a qui font des signes dans l'air, avec les doigts, on dirait pour compter rapidement. D'autres qui font des coups de poings y en a qui crient, y en a qui parlent au petit micro accroché à leur casque, y en a qui discutent tranquillement, y en a qui discutent de façon plus musclée Et ça bouillonne, dans cette espèce de grande salle. Y en a aussi qui se cachent la tête entre les mains ou qui se tapent la tête contre le mur ?! Ils doivent être bien déprimés ceux-là les pauvres. Ca doit être un hôpital psychiatrique...?! Ca doit être cela oui ou alors une tribu sortie du fond de la jungle, et qui a son propre langage, sa propre organisation sociale, etc. Intéressant Il y a aussi de multiples et de gigantesques écrans, avec des chiffres, des chiffres qui défilent, plein de chiffres, et de différentes couleurs Tous les pensionnaires de cet hôpital regardent en continu ces écrans. Et les comportements décrits plus haut sont probablement déclenchés par certaines combinaisons de chiffres qui apparaissent à l'écran ça les rend fous manifestement un instant, 5mn, 10 mn et puis ça se calme de nouveau et ca discute, etc. Mais en fait, on ne sait jamais quand est ce que les chiffres «de la folie» vont réapparaître Oups! Non, ce n'est pas un hôpital psychiatrique ! ca s'appelle salle de marché c'est la Bourse en fait, le lieu qui incarne les marchés financiers et y en a partout sur la planète, les plus «folles» étant celles des grandes villes New York, Tokyo, Paris, etc. Les marchés financiers, c'est des marchés, c'est-à-dire qu'on y vend et on achète quelque chose sauf qu'ici on vend et on achète de l'argent. Voilà une définition très simple. Mais les marchés financiers c'est peut-être les lieux où se décide l'avenir des six milliards que nous sommes. C'est un monde dans le monde. Et c'est le monde des vrais décideurs. Oui en effet, c'est le monde des vrais décideurs, parce que nous ne sommes plus dans le capitalisme traditionnel' ou industriel, avec des entrepreneurs directeurs de leurs boîtes. Nous sommes dans l'ère du capitalisme financier, sauvage, faut-il insister surtout avec la libéralisation des échanges, ou disons le mot le plus à la mode: la globalisation ça fait plus pimpant. La libéralisation des échanges, ou la dérégulation des marchés, fait que le capitalisme passe d'industriel à spéculatif. On n'est plus tellement dans la logique de l'investissement, du recrutement, de l'innovation, etc. mais dans celle de la spéculation, pour s'enrichir. Et ce n'est plus le chef d'entreprise qui décide de l'avenir de sa boîte, car en général, dès qu'elle atteint une certaine taille, l'entreprise est absorbée, ou «achetée» par des actionnaires, qui n'ont aucun rapport et aucune histoire avec l'activité de l'entreprise, ou les salariés qui ont fait celle-ci. Mais ce ne sont pas non plus ces actionnaires qui décident de l'avenir de la boîte, car ces actionnaires, qui placent leur argent partout, délèguent la gestion de leurs portefeuilles à des intermédiaires, à des traders. Rentabiliser est la devise de ces gestionnaires de l'argent, ou du capital. Mais le plus dangereux c'est vouloir rentabiliser à court terme, à très court terme, et ça s'appelle spéculation. Bien normal alors qu'ils soient comme des fous les pauvres, ils doivent constamment chercher le meilleur placement pour l'argent qu'ils gèrent. Et au fur et à mesure des fameux chiffres qui apparaissent sur les écrans c'est-à-dire du comportement des autres traders, des prix des diverses matières premières, du pétrole, des données géopolitiques, etc. ils doivent constamment optimiser les portefeuilles qu'ils gèrent. Ca rend dingue oui Tout cela gonfle la valeur des actifs, valeur qui se déconnecte de plus en plus de la réalité... Qu'importe, puisque croissance il y en a, selon les chiffres, sacrés chiffres. Croissance dont les fruits tombent aux mains de 20% des habitants de la planète, qui s'enrichissent de manière fulgurante et se partagent 80% des richesses. Mais pire, ces bulles de la finance peuvent exploser du jour au lendemain, puisque gonflées «à bloc» par la spéculation et quand elles explosent, qui est-ce qui paye? C'est le petit actionnaire, ou le petit contribuable. Autant dire que c'est se taper la tête contre un mur. Est-on obligé de continuer comme ça? Le règne des marchés financiers et de la dérégulation, est-il inéluctable? Règne de fabrication de richesses colossales pour une minorité, tandis que la majorité se serre la ceinture toujours et encore plus ? Peut-être pas, de petites expériences d'une nouvelle organisation sociale et économique, sans argent, existent de par le monde un système carrément sans monnaie A suivre