Dans leur recherche effrénée du gigantisme, les fondateurs et anciens propriétaires de Batam ont poussé la logique de la filialisation à son extrême. Les frères Ben Ayed ont, effectivement, bâti un groupe d'une trentaine d'entreprises en un temps record. En effet, les fondateurs, qui ont créé Héla d'Electroménager et de Confort Batam en août 1988, n'ont mis que treize ans pour mettre sur pied, à partir de la petite entreprise familiale de distribution de produits électroménagers un grand groupe qui, avant la crise de l'été 2002 -qui allait lui être fatale- employait plusieurs centaines de personnes et réalisait un chiffre d'affaires annuel de près de 200 millions de dinars. Mais lorsqu'il a pris possession des lieux, en octobre 2002, en tant que que mandataire de justice chargé de «gérer et préserver les intérêts des sociétés concernées et ceux des créanciers », M. Ali Debaya n'a pas tardé à s'apercevoir que certaines entreprises du groupe étaient de «véritables coquilles vides ». Celles-ci ont pour la plupart été déjà mise en faillite (Relax Palace, Media Sale, Centre de Vente en Gros, Centrale de Distribution) liquidées (Easy Tour, Batama, Servant Soft, Agriland). Les entreprises les plus intéressantes du groupe une dizaine - ont subi un traitement différent et font l'objet d'intenses efforts de sauvetage menés depuis trois ans.
Dans ce deuxième lot, deux entreprises (la Générale de Distribution et Batam Services) ont déjà été absorbées par la société Héla Batam. Quatre autres -Batam Immobilière, Evolution Conseil (bureau d'études), Galeries des Marques et Intimité ont été cédées à un tiers -et pour ces trois dernières entreprises, les repreneurs ne sont autres que leurs propres employés. Media Store devait tomber dans l'escarcelle d'un pool constitué de Batam et des groupes Atef Ben Slimen et Hachicha. Mais ce trio n'ayant pas libéré le capital, la société a été placé en règlement judiciaire -tout comme Kinderland. Smak (vente en détail de livres, papeterie, bureautique, fourniture scolaires, articles de musique, articles de peinture et cadeaux) est proposé à la vente. Mais les trois appels d'offres lancés sont restés à ce jour sans réponse.
Reste les deux plus importantes entreprises du groupe -Batam et Bonprix- et dont les situations sont aux antipodes l'une de l'autre. Reprise par des professionnels de la grande distribution -en l'occurrence les frères Zouari, vivant en France où ils sont franchisés de Franprix-, avec les principaux créanciers du groupe, Bonprix serait déjà en convalescence. En tout cas beaucoup mieux loti que Héla Batam -contrôlée quant à elles par les créanciers (banques et fournisseurs), elle reste la société la plus endettée du groupe et dont l'avenir est plus incertain que jamais.
Donc, même s'il existe encore -dans une certaines mesure- d'un point de vue juridique et sur le papier, le groupe Batam n'est plus ce qu'il était avant la crise et ne le sera probablement plus.
Batam avant le cyclone Créée en 1988, Héla Batam, la société-mère, a rapidement fait des petits : Intermétal (production d'acier et de fer), Société générale de distribution (distribution de meubles) et Batama (création, fabrication et distribution de meubles et ameublement) ont vu le jour en 1990-1991.
Trois autres sociétés -les Grands magasins spécialisés (GMS, distribution de jouets et textiles), Société général métal (distribution chauffage et climatisation, quincaillerie et sanitaire) et Batam Services (services en ingénierie informatique)- sont créées au cours de l'année suivante au cours de laquelle Batam rachète l'espace Relax Palace (espaces de loisir, restauration et café).
La fièvre entrepreunariale s'empare de nouveau des frères ben Ayed en 1996 (Media Store -distribution de produits informatiques, multimédia et accessoires-, Société Intimité de Lingerie Fine, et La Centrale de Vente en Gros). Idem en 1997 (Société Galerie des Marques -distribution de chaussures, maroquinerie et accessoires-, Easy Tour -, et Servant-Soft Tunisie -conception, édition et distribution de progiciels de gestion). En 1998, le rythme se ralentit, mais le groupe entre dans le secteur de la grande distribution «généraliste» avec Bonprix, une chaîne de supermarchés qui en comptera 34.
Trois ans plus tard, l'année 1999 voit Batam, en même temps, entrer en bourse, et étend l'éventail de ses activités à l'habillement haut de gamme (Galerie des Marques), à la distribution de chaussures, maroquinerie et accessoires (Sens Inverse), à celle des appareils, accessoires et consommables photo et vidéo (Choof), et des biens culturels, bureautiques et multimédia (Smak).