Très excité à l'idée de regarder ce film qui a fait couler beaucoup d'encre, je l'ai vu, enfin, hier, soir. Connaissant parfaitement bien le talent de Jaïbi et Baccar, pourtant j'étais, quelque peu, déçu par cette reproduction théâtrale et sa mise en scène filmée à la hâte et dans un décor morbide et hideux. Je ne sais plus où mettre cette représentation qui reste théâtrale à la base et non cinématographique ! Lenteur, gros plans sur des personnages éméchés, excités ou laissant dégouliner la bave horripilante de la bouche du protagoniste aux prises avec sa démence hallucinante. Tables, autels et portes béantes interpellent le spectateur, et le poussent à une fugue cérébrale pour dénicher des semblants de critiques sous-jacentes de l'ordre établi. Or, les répliques des acteurs le plus souvent sont pleines de clichés et appellent des images avec hélas du déjà vu. Cette dichotomie entre le ou la RICHE et le PAUVRE orphelin aliéné dérange parce que stéréotypée et condamne le dément à être l'indigent obnubilé par un père manichéiste et une mère vulgairement tatouée, qui n'a servi qu'à procréer de vicieux enfants, victimes de leur milieu permissif sur fond de proxénétisme atavique.
Les mots qui semblent être le fil conducteur de cette trame n'ont été que des cris stridents et cacophoniques qui les vident de toute substance. Le protagoniste a été laissé se livrer seul à son delirium alambiqué devant la riche et belle Baccar dont les accoutrements costumiers ont supplanté le bon mot et la bonne parole. Ceci ne lui enlève en rien de son talent et de sa prestance digne des meilleures actrices mondiales. Le triumvirat des magistrats ou responsable de l'hôpital n'a eu que peu d'effet sur le déroulement des scènes et sur les actes mis en scène autour d'un fou amoureux, haineux et imprévisible et d'une amoureuse, silencieuse et peut-être folle, elle aussi. Les prises de vues sont certainement faites à dessein dans un chantier délabré rien que pour l'éclat de notre pressentiment relatif aux chantiers interminables de nos réalisations cinématographiques encore balbutiantes.
Hélas !
Hichem Kacem
Réaction à l'article : "Junûn" de Fadhel Jaïbi: Par-delà le père et la mère Contact : [email protected]