La Chambre tuniso-néerlandaise pour le commerce et l'industrie a organisé, avec le soutien de la société de courtage en assurance «MARSH», un déjeuner-débat, le 26 juin 2008 à l'hôtel Sheraton Tunis, sur le thème : «la CNAM, les affaires sociales et les investissements néerlandais», ce qui a permis au public présent dans la salle -composé essentiellement d'assureurs, d'hommes d'affaires hollandais, d'adhérents de la Chambre et des représentants des mass-médias, de relancer, en présence de M. Naceur Gharbi, président-directeur général de la CNAM, des interrogations, de formuler des réserves et d'exprimer, dans une ambiance franche et cordiale, des craintes et des appréhensions vis-à-vis d'une réforme, expression, affirment ses parrains, d'un consensus social dont la principale valeur est la solidarité entre les différents partenaires sociaux. L'assurance-maladie, un sujet d'actualité
Dans son allocution de bienvenue, M. Ahmed Bassalah, le président de la Chambre tuniso-néerlandaise pour le commerce et l'industrie, après avoir rendu hommage au soutien continu de l'ambassade du Royaume des Pays-Bas aux activités de la CTNCI, a d'emblée évoqué l'importance de la couverture sociale dans notre pays, loué le courage politique de l'Etat pour s'attaquer à une réforme où les intérêts des uns et des autres sont bousculés, a-t-il dit, afin de rationaliser les domaines d'intervention, d'améliorer l'efficacité des différents régimes d'assurances-maladie et d'assurer, au plus grand nombre, l'accès aux soins.
«C'est un sujet au centre de l'intérêt du public à tous les niveaux car la sécurité sociale, une entité au cur du dispositif de l'Etat providence, est un facteur de tranquillité, de sérénité et de productivité pour les différents acteurs de la vie économique nationale», clame notre vis-à-vis qui retrace, dans un souci pédagogique évident, l'histoire des textes législatifs tunisiens dont la première mouture remonte à 1896, signe notoire d'un début, dit-il, de bouleversement des schémas traditionnels de solidarité-clan, tribu, famille -et de l'esquisse d'une homogénéisation des processus intégrateurs dans un nouvel espace productif en gestation.
M. Christoph J. Ulrich, représentant de l'ambassade des Pays-Bas à Tunis, tout en rendant hommage au dynamisme du staff administratif de la Chambre, a mis en exergue le rôle de la réforme en cours dans le pays dans l'édification des investisseurs étrangers sur la situation sociale du site Tunisie, la fluidité des rapports humains dans l'entreprise et la promotion, à travers la concertation permanente et la priorisation des indicateurs de santé, d'une ambiance sereine et apaisée autour de l'acte productif. «La Hollande a entrepris, depuis une décennie, une restructuration similaire afin de canaliser les visites aux spécialistes, doter le médecin généraliste de nouvelles prérogatives et donner à la couverture sociale plus de lisibilité», conclut le diplomate qui a pris soin de souligner, pendant le débat, l'importance de la convention signée entre la CNAM et son homologue néerlandaise dans le domaine des prestations sociales dont l'un des aspects édifiants est de permettre aux ressortissants des deux pays une égalité de traitement.
La couverture sociale, une longue histoire
Le système d'assurance-maladie, institué en Tunisie au profit exclusif des fonctionnaires à partir de 1951, a été étendu, après l'indépendance, aux salariés du secteur privé, aux étudiants en 1965 et aux ouvriers agricoles en 1970, ce qui permit au pays d'améliorer, sensiblement, son taux de couverture sociale pour atteindre 87% en 2005 après avoir réussi à garantir, durant les deux dernières décades aux catégories à revenu limité l'accès aux soins et aux services indispensables à la préservation de la santé.
«L'insatisfaction des différents intervenants, l'évolution des dépenses à un rythme vertigineux et l'inégalité dans certaines formes de couverture ont poussé les pouvoirs publics, à partir de 1995, à réorganiser le secteur de l'assurance maladie, à rationaliser le domaine de la prise en charge du régime de base et à garantir des financements adéquats pour permettre la pérennité d'une réforme», nous dit M. Gharbi, le P-DG de la CNAM, qui rappelle le soutien de l'U.G.T.T au nouveau régime et l'adhésion enthousiaste de l'Union européenne pour accompagner une démarche (Bruxelles a déboursé la bagatelle de 40 millions d'euros à cet effet) au cur de sa vision sociale des rapports de production.
La fronde des médecins
«La loi n°2004-71 du 2 aout 2004 relative à l'institution du nouveau régime d'assurance maladie a provoqué une levée de boucliers parmi les médecins, suscité des controverses parmi certains secteurs de la fonction publique et crispé parfois le débat», avoue l'invité de la Chambre tuniso-néerlandaise pour le commerce et l'industrie dont les répliques, tout au long d'un échange passionné avec le reste des convives, reflètent un souci d'apaisement vis-à-vis d'une caste, pionnière, dit-il, dans les activités libérales, élite de l'élite et sur laquelle la CNAM compte pour aller de l'avant dans l'entreprise réformatrice tout en respectant, insiste notre interlocuteur, le droit des blouses blanches à l'indépendance.
A la fin, M. Naceur Gharbi, consensuel et débatteur hors pair, a taxé les médecins de garantie de conscience pour la nation et rappelé la disponibilité de 66% d'entre eux d'établir des conventions avec la CNAM dont 86% de généralistes, ce qui doit nous inciter, a-t-il insisté, à redoubler d'efforts pour apaiser les craintes des spécialistes, encore réticents, surtout dans le district de Tunis (seulement 20% de conventionnés), à rejoindre le reste de la profession dans une entreprise qui se veut volontariste, généreuse et utile à l'ensemble du corps social.