Webmanagercenter : Que dit la loi sur le plan réglementaire en matière de publication des salaires des dirigeants des entreprises? Maître Mohamed Ali Masmoudi : La loi, en l'occurrence le Code des sociétés commerciales, n'a rien prévu en matière de publication des salaires des dirigeants des entreprises. En effet, aucune disposition du code n'impose la publication des rémunérations au journal officiel de la République tunisienne ni dans des journaux quotidiens. La nouveauté de la loi de 2009 réside dans le fait que les éléments de rémunérations des dirigeants (PDG, DG, administrateur délégué, DGA, Administrateur) ainsi que les indemnités et avantages qui leur sont attribués ou auxquels ils pourraient avoir droit au titre de la cessation ou de la modification de leur fonction sont désormais soumis à la procédure de l'article 200, à savoir l'autorisation du conseil d'administration, l'audit par le CAC et l'approbation par l'AGO. De plus, dorénavant, ces rémunérations pourraient être annulées si elles ont été attribuées en violation de la procédure susvisée et qu'elles portent préjudice à la société. La responsabilité du conseil ou du dirigeant intéressé peut également être engagée. Il y a lieu de rappeler que la détermination de la rémunération des PDG, DG et DGA étaient jusque-là, du ressort du Conseil d'administration, sans qu'aucun contrôle ne soit effectué par le CAC ni aucune approbation par l'AG. La rémunération des administrateurs consiste quant à elle en des jetons de présence et une rémunération exceptionnelle. Les jetons de présence sont fixés annuellement par l'AG. En pratique, ce montant est réparti par le conseil entre ses membres. Le CAC ne se prononce pas sur les jetons de présence. Les rémunérations exceptionnelles quant à elles sont accordées aux administrateurs pour des mandats ou missions dont ils sont chargés par le CA. Elles sont décidées par le conseil d'administration et doivent être contrôlées par le CAC et approuvées par les actionnaires. Ainsi, la nouveauté consiste à étendre la procédure d'autorisation, de contrôle et d'approbation qui n'était prévue que pour les rémunérations exceptionnelles, à toutes les rémunérations, indemnités et autres accordées à tous les dirigeants. Y a-t-il des dispositions particulières par rapport aux sociétés cotées? Il n'existe pas de dispositions spéciales pour les sociétés cotées, ni d'ailleurs pour les sociétés faisant appel public à l'épargne. D'ailleurs, c'est là une des limites de la loi de 2009. Les commissaires aux comptes sont-ils tenus de par la loi d'informer les actionnaires à propos des rémunérations des dirigeants des entreprises et tous les avantages dont ils bénéficient? Et y a-t-il obligation de par la loi par rapport à cela? L'apport de la loi de 2009, c'est d'avoir étendu le régime des conventions réglementées (autorisation du conseil d'administration, contrôle du commissaire aux comptes et approbation par l'assemblée générale) à toutes les rémunérations perçues par les dirigeants (PDG, DG, Administrateur délégué, DGA et membres du conseil). Ainsi, dorénavant, le commissaire aux comptes doit faire état des rémunérations accordées aux dirigeants dans son rapport spécial à l'attention des actionnaires. S'il y a obligation de par la loi, a-t-on prévu des sanctions aux défaillants, ou y aurait-il un flou juridique par rapport à cela? Comme indiqué ci-dessus, le dirigeant en question ainsi que le conseil d'administration pourront être tenus responsables du non respect de la procédure relative à la rémunération des dirigeants (autorisation, contrôle, approbation). De plus, la rémunération accordée sans respect des procédures peut faire l'objet d'annulation si elle porte préjudice à la société. Quels sont les risques pour les commissaires aux comptes qui n'appliquent pas la nouvelle loi du code des sociétés commerciales? L'article 272 CSC a posé le principe de la responsabilité civile du CAC. Cet article dispose que le CAC est responsable tant à l'égard de la société qu'à l'égard des tiers des conséquences dommageables des négligences et fautes qu'il commet dans l'exercice de ses fonctions. Il est plus particulièrement responsable des infractions commises par les membres du conseil d'administration et dont il a eu connaissance mais qu'il n'a pas révélées dans ses rapports à l'AG. Quel serait, selon vous, l'impact d'une telle loi sur les rapports entre les commissaires aux comptes et leurs clients qu'ils soient des banques, des sociétés cotées en Bourse ou autres? Le commissaire aux comptes est, par définition, une personne professionnellement indépendante de la société dont il audite les comptes. C'est pour cette raison d'ailleurs que la rémunération du CAC est fixée par un texte règlementaire et n'est pas laissée à la libre discrétion des parties (la société et le CAC). Je ne pense pas que la nouvelle obligation qui pèse sur le CAC, à savoir de contrôler les rémunérations des dirigeants, puisse influencer la relation du CAC avec les dirigeants de la société dont il audite les comptes. Faut-il le rappeler à ce sujet, le CAC risque de voir sa responsabilité civile mise en cause en cas de négligence de sa part dans le cadre de l'exécution de son mandat.