Webmanagercenter : Qu'est-ce qu'on attend finalement du Comité national pour la promotion du football tunisien ? Slim Chiboub : Composé d'éminentes personnalités sportives à l'image de MM. Hammouda Ben Ammar (ancien président du Club Africain), Mohammed Wertani (directeur sportif au Stade Tunisien), Moncef Foudhaili (ancien patron de la FTF), Othman Jnaiyah (ancien président de l'Etoile Sportive du Sahel), Samir Sellimi (ancien joueur international et commentateur à Nesma Tv), le Comité national pour la promotion du football est tout d'abord un lieu de rencontres, d'échanges et de concertations, censé remettre aux autorités de tutelle une feuille de route pour sortir notre football de l'ornière, éviter les régressions et les déceptions, remédier aux défaillances, enregistrées lors des dernières échéances et permettre à la Fédération, avant l'entame de la saison prochaine, de prendre les décisions adéquates concernant d'éventuels amendements, en entente totale avec les clubs, bien entendu. Que pensez-vous du parcours du football tunisien après plus de 13 ans de professionnalisation ? Globalement, les résultats sont bons. La Tunisie s'est qualifiée à plusieurs reprises au mondial et les clubs (EST, CA, CSS, ESS) ont outrageusement dominé les compétitions africaines durant toute une décennie. Seulement, nous vivons actuellement une crise de confiance, une période de doute, à la suite de la disqualification de l'équipe nationale, de son élimination au premier tour en Angola, des finances des clubs qui souffrent le martyr pour boucler leurs budgets et d'un arbitrage, cloué au pilori chaque semaine, malmené tout au long de la compétition et exutoire idéal pour toutes les frustrations. Au fait, le choix du professionnalisme est judicieux, mais toute la question est dans l'art du management, la canalisation des passions et la force du dépassement chez les présidents des clubs, lesquels, devant la montée des périls- crise financière, mauvais résultats -, n'hésitent plus à brandir la menace de la démission. Les menaces de démission sont le signe d'un profond malaise, n'est-ce pas ? A mon avis, les clubs tunisiens ont longtemps vécu au-dessus de leurs moyens, jonglé avec des investissements faramineux, ce qui a provoqué l'explosion des budgets, symptôme d'une bulle spéculative, la persistance des surenchères, surtout pendant le mercato et la fuite en avant de certains dirigeants, obnubilés par l'urgence des résultats, voulant à tout prix satisfaire l'ego des supporters, de tout temps jusqu'au-boutistes, se sont enfoncés dans des dépenses injustifiées vis-à-vis de certains joueurs étrangers, africains pour la plupart, incapables d'apporter une valeur ajoutée au groupe, d'intégrer la mentalité maghrébine et de constituer, dans la durée, une monnaie d'échange, susceptible de renflouer la caisse du club. Résultat, la crise est devenue structurelle et nous voilà avec des présidents d'association, menacés de poursuites judiciaires pour des chèques impayés ou des retards de paiement Verra-t-on bientôt un changement au niveau du statut des associations sportives ? L'actuel statut qui est à but non lucratif est obsolète eu égard à la réalité sportive nationale. Il faut, au plus vite, une mise à niveau des lois pour permettre aux responsables de générer de l'argent, de faire face à un marché footballistique en mutation perpétuelle et d'opter pour des politiques à moyen et long terme, en misant sur les centres de formation et la pépinière locale. Seulement, de nos jours, les présidents sont constamment sur la défensive avec en prime un test crucial et fatidique chaque dimanche. Tout en appelant à une refonte de nos règlements, il est urgent aussi de rappeler les fondamentaux du professionnalisme, fondé sur la discipline, la maîtrise de soi, la culture de l'effort et la capacité d'adaptation des uns et des autres. Il est clair que nous sommes dans une période transitoire, ce qui explique certains dérapages et les situations confuses au niveau des prises de décision en amont et en aval. Cela dit, je demeure confiant dans la capacité du Tunisien à se mobiliser lorsque le besoin se fait sentir surtout quand il s'agit de tenir notre rang parmi les grandes nations footballistiques du continent. Les joueurs tunisiens n'ont-ils pas besoin d'une mise à niveau comportemental ? Me concernant, j'ai souvent vu des joueurs s'en sortir mieux que certains responsables devant les médias, assumer leurs engagements vis-à-vis de leur club et faire preuve de maturité incontestable. Alors bientôt le bout du tunnel ? Il faut du temps pour mûrir, grandir, bref donner du temps au temps afin de capitaliser plus d'une décennie de professionnalisme. Les clubs ont besoin de véritables dirigeants militants, crédibles, francs et dynamiques, à même de tenir leurs engagements envers les joueurs pour éviter les désagréments et les manquements à la parole.