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Crise du Covid-19 : état des lieux et plan de sauvetage de la Tunisie
Publié dans Business News le 13 - 07 - 2020

Avant l'arrivée même du gouvernement Fakhfak, le pays était en crise. Entre-temps, le raz-de-marée du Covid-19 a déferlé et a tout balayé sur son passage. La Tunisie se trouve ainsi face à une des pires crises de son histoire après indépendance. Où en est le pays ? Que prévoit le gouvernement dans l'immédiat et quel est son plan de sauvetage ? Trois ministres ont tenté de répondre à ces questions lors d'une conférence ce lundi 13 juillet 2020.

Une conférence de presse s'est tenue ce lundi à la Kasbah en présence de trois ministres : le ministre des Finances Nizar Yaïche, le ministre du Développement, de l'Investissement et de la Coopération internationale Selim Azzabi et la ministre auprès du chef du gouvernement chargée des Grands Projets Lobna Jeribi, venus pour présenter le plan de sauvetage, la mise à jour du budget de l'Etat et un topo sur les indicateurs du pays.

Premier point important, on apprend que le gouvernement prévoit, suite aux études réalisées, une décroissance de 6,5% (la cinquième fois après l'indépendance où on enregistre une croissance négative et deuxième après révolution). La baisse est imputée à un repli constaté dans tous les secteurs notamment quatre en particulier, le textile et habillement, les industries mécaniques et électriques, le transport et le tourisme, qui participent à hauteur de 20% dans le PIB et qui ont une haute capacité d'employabilité, a expliqué Selim Azzabi.
La crise a été « la balle de délivrance » pour le pays, signant la fin d'un modèle de développement archaïque et qui a permis de passer, enfin, aux réformes structurelles tant attendues
Le plan du gouvernement prévoit quatre axes : plan de sauvetage, des mesures financières, la Loi de finances pour l'année prochaine et qui comporte des réformes structurelles profondes outre un plan de développement qui permettra la mise en place d'un nouveau modèle économique et qui sera annoncé au premier trimestre de 2021.


Deuxième point, la difficulté de mettre en place une stratégie arrêtée vu le changement rapide des hypothèses. Dans ce cadre, M. Yaïche a indiqué que le gouvernement est incapable d'avoir une vision claire sur le devenir de la saison touristique actuelle, de la croissance économique ou des recettes fiscales. Idem pour le prix du baril qui est en train d'osciller, le gouvernement a retenu la moyenne de 45 dollars mais aucune certitude quant à l'évolution du prix.
Le ministre a précisé aussi que les dépenses de l'Etat ont augmenté (aides sociales, chômage technique, stock stratégique de 350 millions de dinars pour des recettes fiscales en baisse outre un budget supplémentaire de 300 millions de dinars pour le soutien des PME, etc.). Le manque à gagner en termes de recette fiscale est de plus de 5 milliards de dinars. Le ministère a préparé des mesures supplémentaires qui permettront d'atténuer l'impact entre 800 millions de dinars et 1,1 milliard de dinars.
« Ceci est tributaire de l'aspect politique et la vitesse avec laquelle on va valider l'ensemble des projets de loi qu'on va soumettre au Parlement dans les prochains jours », a-t-il soutenu dans une déclaration à Business News.
Vu tout ce qui a été décidé, le gouvernement prévoit un déficit budgétaire en nette augmentation qui va dépasser les 7% du PIB. L'endettement va atteindre les 85% du PIB dont 61% du PIB d'endettement extérieur. A ce sujet, le ministre des Finances a réitéré la volonté du gouvernement à limiter le recours à l'endettement extérieur et à le stabiliser au niveau actuel. Il a souligné que les crédits du pays seront payés en temps et en heure.


Nizar Yaïche a expliqué que même si le plan de financement est bouclé, sa mise en œuvre est extrêmement difficile, vu la situation et le changement rapide des données au niveau national et international.
Les besoins supplémentaires sont de 3,9 milliards de dinars, décomposés en une dizaine de rubriques. Pour y subvenir, le ministère compte sur les mesures annoncées (les 2% sur le système bancaire, sur les dépôts à termes etc.), les mécanismes de financements qui vont venir de tout ce qui est amnistie de cash et devises extérieures, les mécanismes de financements avec payement du secteur privé et prestataires de l'Etat et de certaines entreprises publiques (1 milliard de dinars), les sorties complémentaires sur le marché national, et un groupe de 4 à 5 mesures qu'il ne veut pas annoncer pour le moment pour qu'il n'y ait pas d'anticipation.
Dans ce cadre, le ministre a noté que le budget des ministères ne sera pas touché, idem pour la masse salariale. Le gouvernement ne recourra pas également aux dons obligatoires des citoyens et entreprises. L'effort sera plutôt focalisé sur la rationalisation des dépenses. Par ailleurs, l'économie de rente sera dans le collimateur du gouvernement.
« On a un plan mais il est tributaire de tout ce qu'on va faire dans les prochains jours et semaines. (…) C'est pour cela que j'insiste sur la stabilité politique du pays pendant cette période critique », a martelé le ministre des Finances.

Le gouvernement a ainsi mis en place un plan de relance économique « courageux », axés sur cinq idées principales. Premièrement, il va poursuivre l'élan social avec 1,2 million de dinars réservés à l'aide des familles tunisiennes. Deuxièmement, il ne prévoit pas d'augmentation de la pression fiscale, malgré la conjoncture difficile. Troisièmement, il a décidé de maintenir le budget de développement, mieux il va l'augmenter. Quatrièmement, il ne veut plus recourir à l'endettement extérieur en 2020. Cinquièmement, il a préparé une cinquantaine de mesures financières, économiques et fiscales concernant 8 axes (dynamisation de l'investissement, soutenir les startups et projets innovants, lutter contre la pauvreté, moderniser l'administration fiscales, encourager le décashing, intégrer le marché parallèle dans l'officiel, lutter contre l'évasion fiscale et renforcer le contrôle) et qui seront soumises dans les prochains jours au Parlement et visent des ressources supplémentaires de 1,1 milliard de dinars.
Le gouvernement ne prévoit pas de Loi de finances complémentaire pour le moment : elle est prévue au 4ème trimestre, jusqu'à l'éclaircissement de plusieurs paramètres liés.


Pour Lobna Jeribi, le gouvernement a mis en place une nouvelle vision avec des mesures opérationnelles dont la mise en œuvre est possible dans les cinq prochains mois. L'objectif étant de sauvegarder le tissu d'entreprises et de limiter le chômage. Dans ce cadre, il a mis en place une ligne de financement de 100 millions de dinars pour la sauvegarde des emplois.
Le gouvernement mise aussi sur des projets stratégiques notamment la révision du Code des changes, l'augmentation de la productivité du port de Radès de 4 à 10 conteneurs par heure, l'accélération de la réalisation des projets dans les régions pour trois milliards de dinars, le payement des prestataires de l'Etat en particulier ceux du BTP pour un milliard de dinars et la restructuration des cinq entreprises publiques dont Tunisair, la Société tunisienne d'acconage et de manutention (Stam) et la Société tunisienne de sidérurgie (El Fouledh). Il s'engage aussi à solutionner la situation fragile des ouvriers de chantiers et des enseignants contractuels pour la résoudre dans les cinq ans avenir.
Au menu aussi des mesures sociales comme l'intégration de 15.000 jeunes, âgés entre 12 et 18 ans dans l'économie et ceci avant 2020, en plus de permettre à 3.000 familles d'obtenir la propriété de leurs maisons. Le gouvernement a aussi engagé une réflexion sur le logement social, sur les normes pour y accéder et sur le pouvoir d'achat du Tunisien. En ce qui concerne l'administration et les services administratifs, il abandonnera 50% de la paperasserie ainsi que la réclamation de documents issus de l'administration et adoptera la signature électronique.
Et de marteler que « le pays ne peut plus soutenir le blocage des projets et créera à cet effet une haute instance et une salle d'opération qui veillera à la réalisation des projets dans les régions ».

S'agissant de la restructuration des entreprises publiques, le ministre des Finances a affirmé, dans une déclaration à Business News que « le point de départ et le constat est difficile et extrêmement grave : la majorité, pour ne pas dire la totalité sont en capitaux propres négatives, ce qui est pour lui inexcusable ». Il a précisé, en outre, qu'on ne connait pas la vérité sur les chiffres, la moitié des entreprises n'ayant pas arrêté leurs états financiers de 2018.
Et de soutenir : « L'évaluation en elle-même ne doit pas s'appuyer uniquement sur des critères économiques ou de rentabilités : elles ont une vocation nationale et pour la plupart elles jouent un rôle dans la stratégie nationale. C'est une approche équilibrée. L'objectif doit être spécifique et customisé entreprise par entreprise et de fixer ce qu'on demande à chacune ».
« Il n'y a pas de programmes solides des restructurations : on a besoin d'y travailler durement pour les clarifier et en même temps, on doit être conscient qu'une partie du manque de rendement de ces entreprises est dû à l'Etat, qui est responsable, fixant les tarifs et pour beaucoup d'entreprises tardant à les payer à hauteur de 6,2 milliards », a-t-il ajouté.
Pour M. Yaïche, on doit admettre deux faits important : l'Etat est coresponsable de ce qui est arrivé et il a géré mal ses entreprises. D'où la nécessité de changer la gouvernance des entreprises publiques avec une minutie dans le choix des directeurs, d'opérer une restructuration financière avec injection supplémentaire et inévitable de fonds pour les aider.
Pour cette année, le budget dédié sera serré vu la conjoncture, mais pour lui, l'enveloppe sera conséquente l'année prochaine pour relancer ces sociétés tout en innovant en termes de mécanismes.
Interrogé par Business News si l'Etat avait l'intention de privatiser certaines entreprises publiques, notamment celles opérant dans les secteurs concurrentiels comme la Régie nationale des tabacs et des allumettes (RNTA), il a répondu non. Mieux, il a indiqué que le ministère a mis en place un plan qui est en train de porter ses fruits.


Pour Selim Azzabi, la crise a aussi apporté son lot de bonnes nouvelles. L'agriculture ayant joué un rôle central et on a pu réaliser la sûreté alimentaire au pays, le secteur enregistrera 5,2% en 2020.
Par ailleurs, il a estimé que la crise va permettre de créer des opportunités et la mise en place d'une vision pour les secteurs stratégiques tout en établissement une nouvelle définition de la souveraineté nationale en relation avec les secteurs de l'énergie, la santé, la technologie et l'agroalimentaire, le tout en renouant avec l'axe stratégique et le rôle social de l'Etat. La crise a permis, selon lui, de prouver certains acquis et de compter sur les secteurs technologiques et des industries pharmaceutiques où on compte "des champions".
Il a rappelé que malgré la crise, la Tunisie a pu se renflouer en ressources financières extérieures, à la hauteur prévue dans la LF 2020, dans des conditions de manque de liquidités au niveau mondial et avec des conditions avantageuses. « Ce qui prouve que la Tunisie a une crédibilité et des amis sur lesquels elle peut compter en temps de crise », a-t-il déclaré.
Dans ce cadre, le ministre des Finances a précisé que le gouvernement est actuellement en discussion avec le Fonds monétaire international (FMI) et qu'il ambitionne de conclure un nouveau programme de financement d'ici les 3 ou 4 prochains mois et qui s'étalera sur 4 ans. L'objectif étant de faire parvenir un message positif aux partenaires internationaux et de les rassurer sur la Tunisie et son programme de restructuration.
Nizar Yaïche pense que l'espoir reste de mise à condition d'être efficace, d'accélérer la mise en œuvre des procédures et de pouvoir mettre les différends de côté, la crise politique ayant un impact et un coût sur l'économie. Et d'avouer : « On n'a pas le luxe pour une nouvelle crise politique. Le plus grand danger pour la Tunisie dans la prochaine période n'est pas un danger extérieur mais intérieur et lié à cette crise politique ». Il a appelé toutes les parties prenantes à la responsabilité. « Nous avons de grandes capacités mais il faut mettre en place le climat adéquat », a-t-il affirmé.

Le devenir du pays suite à la crise Covid-19 sera tributaire du plan de sauvetage, des mesures mises en place mais également de l'issue de la crise politique qui secoue actuellement le pays. Le timing sera primordial. Il faudra choisir donc les priorités et les combats à mener.


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