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En Tunisie, on boit à en mourir !
Publié dans Business News le 15 - 01 - 2024

Encore une fois, la question de l'alcool frelaté et des boissons artisanales produites clandestinement refait surface. Encore une fois, il ne s'agira que d'un petit épisode médiatisé et n'ayant pas fait l'objet d'un débat public ou de mesures de la part du pouvoir malgré les décès enregistrés.

Les cas d'intoxication et de décès suite à une consommation d'alcool ou de boissons artisanales produites clandestinement ne représentent pas une première. En Tunisie, on a connu plusieurs événements du genre. Le plus célèbre d'entre eux était celui de 2020 quand une vingtaine de personnes ont été intoxiquées après avoir consommé du méthanol. Quatre d'entre-elles ont trouvé la mort. Le drame avait eu lieu au gouvernorat de Kairouan. Il s'est avéré que les victimes avaient consommé du méthanol mélangé à de l'eau de Cologne.
Mais pour quelle raison un Tunisien irait consommer du méthanol pur, ou encore de l'eau de Cologne ? La réponse est toute bête : la Tunisie, du 21e siècle, n'offre pas la possibilité d'acquérir légalement de l'alcool dans une bonne partie du territoire national. Il est, par exemple, impossible de trouver un point de vente en détail de boissons alcoolisées sur l'intégralité du territoire du gouvernorat de Kairouan. Une telle absence ne peut conduire qu'à une seule conséquence directe, à savoir la prolifération de la vente clandestine de boissons alcoolisées, communément connu chez les Tunisiens de « Marché noir ».
Presque tous les consommateurs de boissons alcoolisées ont fait appel à ce service. La politique de l'Etat au sujet de la vente d'alcool est clairement défaillante. Les vendeurs d'alcool clandestins sont presque implémentés partout. Ces derniers profitent de l'absence des points de vente afin de gonfler les prix. Des milliers et des milliers de dinars sont au cœur de ce marché illégal, sous le regard complice des autorités officielles qui se contentent de quelques raids policiers et de photos afin d'illustrer les efforts du ministère de l'Intérieur.
En plus de cela, l'absence de points de vente de boissons alcoolisées a facilité la mise en place d'un système de fabricants clandestins de boissons traditionnelles. On a eu droit au fameux cocktail à base d'eau de Cologne. Bien évidemment, et surtout pour les plus anciens, il y a eu la phase de la célèbre « vodka tunisienne ». On se contentait de mélanger de l'alcool alimentaire avec un jus de fruit ou une boisson gazeuse. Par la suite, l'accès à l'alcool alimentaire est devenu de plus en plus difficile, ce qui a facilité l'entrée en jeu de l'alcool de pharmacie. Certes, il s'agit principalement d'éthanol, mais pouvant contenir d'autres produits en plus des impuretés.
Il existe d'autres produits clandestins tels que la boukha artisanale et le legmi (vin de palme), vendus dans le gouvernorat de Médenine et de Gabès, ou encore la Grappa artisanale, vendue dans des sachets en plastique dans le gouvernorat de Gafsa. Malheureusement, le Tunisien lambda, désirant déguster un bon verre ne songe pas à ce genre de chose. Il se contente d'acheter ce qui est disponible et de le consommer pour finir malencontreusement aux urgences.
De plus, la question de l'accès aux boissons alcoolisées ne se limite pas à l'aspect géographique. Il y a la question de la fermeture des points de vente et des bars chaque vendredi. Seuls ceux ayant les moyens d'aller au resto ou de sortir en boîte pourront consommer de l'alcool.
Il y a, aussi, la question des prix. Les boissons alcoolisées se font de plus en plus chères. L'Etat ne fait qu'augmenter les prix en continuant à hausser les taxes et les redevances appliquées aux boissons alcoolisées. Mais, afin d'adopter ces mesures dans le calme et la bonne humeur, l'augmentation est, d'un côté, prétextée comme étant une mesure visant une marchandise loin d'être un produit de première nécessité, voire une marchandise de luxe et d'un autre côté, camouflée sous forme de révision des pourcentages appliqués non-pas lors de la vente en détails mais aux fabricants et aux intermédiaires. Le commerce de boissons alcoolisées est soumis à une TVA à hauteur de 19% et à un droit de consommation appliqué en fonction de la nature de la boisson et du type de flacon utilisé. L'Etat applique aussi un droit annuel de vente qui a récemment été révisé pour passer en 2022 de 750 dinars à 7.500 dinars pour la vente en gros et de 500 dinars à 5.000 dinars pour la vente en détail.
Il s'agit d'un véritable labyrinthe fiscal. On s'interroge souvent sur la composition des prix de vente en détail chez les grandes surfaces ou chez les restaurateurs. Comment justifier une telle hausse des prix ? S'agit-il d'un business qui coule à flot pour les revendeurs ? Afin de répondre partiellement, nous pouvons vous citer l'exemple du droit de consommation appliqué à la caisse de 24 bières pour les restaurateurs. Selon une facture que Business News a pu consulter auprès d'un restaurateur, la caisse de 24 bières est vendue à des prix allant de 19,504 dinars à 21,977 dinars en fonction de la marque achetée. Le droit à la consommation peut atteindre les 17,280 dinars. Ainsi, la caisse de 24 bières coûterait au restaurateur de 36,784 dinars à 39,257 hors TVA, soit un coût unitaire de 1,532 dinar à 1,635 dinar par bière hors TVA. Le coût final, TVA comprise, serait d'au moins 1,823 dinar et de pas plus de 1,946 dinar par bière.
Ce chiffre est loin, bien loin, des prix faramineux affichés sur certaines cartes, mais est, aussi, contraire à ce qui circule comme mythe selon lequel les bars achèteraient la bière à moins d'un dinar l'unité. De plus, ce chiffre est différent de celui affiché dans les grandes surfaces. D'autres restaurateurs nous ont confié que le prix pouvait augmenter, en fonction du fournisseur et du nombre d'intermédiaires pour atteindre les 2,050 et les 2,1 dinars. On pourrait se dire qu'une bière à deux dinars reste abordable. Or, un consommateur va en acheter huit ou dix par semaine en plus de ce qu'il va acheter comme nourriture, soit des dépenses aux alentours des vingt dinars pour un pays où le Smig est inférieur à 460 dinars (près de 4,5% du Smig). D'un autre côté, la « Grappa » citée auparavant est vendue à trois et quatre dinars le litre, soit seulement 0,6% du Smig pour une boisson avec une teneur en alcool de plus de 35%. Le même pourcentage est constaté pour les autres boissons artisanales produites clandestinement avec des prix considérablement bas. Les bouteilles de liqueur de mauvaise qualité sont vendues en magasin à pas moins de 45 dinars. Or, le prix des boissons de contrefaçon ou fabriquées clandestinement ne dépasse pas les quinze et les vingt dinars.
Il est, donc, tout à fait normal de voir des Tunisiens opter pour l'acquisition de produits douteux et dont la composition est carrément inconnue. Les consommateurs d'alcool ne cherchent qu'une chose : s'enivrer et partager un bon moment avec des amis et des proches autour d'un verre. Néanmoins, ils ne sont pas conscients de la gravité de la chose. Même s'ils ne décèdent pas à cause de ce qu'ils ont consommé, ils tombent malades et développent plusieurs complications.
L'intégralité de ces malheurs se résume en un seul phénomène : l'échec cuisant de la politique de l'Etat dans la gestion du commerce d'alcool. Au lieu de continuer de se voiler la face, on devrait penser à l'instauration de plus de points de vente avec le prolongement de la période de la journée dédiée à la vente de boissons alcoolisées. Le consommateur fait appel au vendeur clandestin non pas par plaisir, mais parce qu'il est sanctionné par l'Etat en raison de sa localisation géographique et du manque d'imagination de la part du pouvoir. Plus de points de vente signifie automatiquement une meilleure couverture de la demande et une baisse de la clientèle auprès du marché noir. En plus de cela, la réduction des taxes et des droits imposées à certaines boissons, notamment les liqueurs dont la majorité est importée, encouragera les citoyens à acquérir leurs breuvages préférés auprès des vendeurs agréés par l'Etat et autorisés à le faire. Encore une fois, une simple mesure permettant de sauver les consommateurs de la mort et des maladies, de lutter contre les activités économiques illégales et d'améliorer la régulation du secteur.
Il est temps d'imaginer des solutions et des alternatives applicables à moyen et à long termes et de se défaire des complexes et des tabous liés à la consommation de l'alcool. Faut-il le rappeler, les différents pouvoirs qui se sont succédé à la tête du pays ont misé sur ce secteur comme étant l'un des piliers économiques de la Tunisie et l'une des principales sources de revenu de l'Etat. D'ailleurs, feu Habib Bourguiba avait indiqué le 6 janvier 1984, à la suite des émeutes du pain, que les boissons alcoolisées devaient servir de façon à couvrir les dépenses de l'Etat dédiées aux compensations. C'est à croire que depuis cette date-là rien n'a changé. Le monde a continué à progresser et à adopter de nouvelles approches à l'exception de la Tunisie qui a décidé de rester au point mort, au point où on boit à en mourir !


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