Ramla Dahmani, sœur de l'avocate et prisonnière d'opinion Sonia Dahmani, a publié, lundi 14 juillet 2025, un témoignage sur les réseaux sociaux, dans lequel elle alerte une nouvelle fois sur la situation alarmante que traverse sa sœur en détention. Elle y décrit un environnement carcéral délétère, où l'insalubrité atteint un niveau critique. « La semaine dernière, j'ai parlé des égouts qui fuient dans la cellule de Sonia. Cette odeur ignoble, qu'elles respiraient déjà depuis des jours, elles ont continué à la respirer toute la semaine. Et leur état a empiré », écrit Ramla Dahmani. Elle raconte que Sonia Dahmani, dans une tentative de préserver un minimum de dignité et de santé, s'est procuré des masques vendus dans la pharmacie de la prison, une pharmacie officielle, autorisée. Elle comptait y déposer quelques gouttes d'eau de fleur d'oranger pour atténuer les odeurs pestilentielles. Mais, en regagnant sa cellule, une gardienne l'a interceptée pour lui réclamer les masques. « Sonia a cru – naïvement – qu'elle allait les déposer dans la cellule. Mais ils ont disparu », rapporte Ramla Dahmani. À la question de leur sort, la réponse fut laconique : « C'est interdit. »
Ramla Dahmani s'insurge : « Interdits ? Alors qu'on les vend dans la prison ? Interdits pour qui ? Pour les femmes qui suffoquent dans la crasse ? […] Interdits pour Sonia et ses codétenues, mais autorisés pour celles qui portent le niqab et s'en servent pour couvrir leur visage ? ». Pour elle, il ne s'agit ni plus ni moins que d'une injustice maquillée en règlement, d'un harcèlement institutionnalisé. L'état de santé de Sonia Dahmani et de ses codétenues se serait dégradé au fil des jours : oreilles bouchées, yeux gonflés, nez congestionné, vomissements, évanouissements… Il a fallu attendre que la situation devienne critique pour qu'un produit soit enfin versé dans les canalisations — une mesure d'urgence prise bien trop tard, selon Ramla Dahmani, qui dénonce « une solution de fortune, après des jours de supplice ».
Mais au-delà des conditions matérielles, c'est l'acharnement subi par sa sœur que Ramla Dahmani dénonce. À ses yeux, Sonia Dahmani est ciblée en représailles de ses propres prises de position. « Voilà ce qu'on fait à une femme parce qu'elle a dénoncé. Voilà comment on traite ses codétenues, juste parce qu'elles partagent sa cellule. Voilà comment on se venge », écrit-elle. Elle va plus loin, affirmant que les autorités la visent, elle, à travers sa sœur : « On m'a condamnée à de la prison, mais je suis loin. Hors d'atteinte. Alors ils frappent Sonia à ma place. Et quand ce n'est pas elle, c'est mon frère qu'ils salissent. Toujours avec les mêmes méthodes : insinuations, mensonges, campagnes calomnieuses ». Et d'ajouter avec fermeté : « Mais nous ne sommes pas dupes. Et nous ne plierons pas ».
À ceux qui lui reprochent de nuire à sa sœur par ses prises de parole, Ramla Dahmani répond sans détour : « C'est une reconnaissance, claire et assumée : on punit Sonia pour me faire taire ». Elle interroge alors : « Mais qu'est-ce que cela dit d'un système, si ce système accepte qu'une femme paie pour les mots d'une autre ? Qu'est-ce que cela dit d'un pays, si la voix d'une sœur peut envoyer l'autre à l'agonie ? ». Son message se termine sur un ton de résistance : « Plus vous vous acharnerez sur Sonia, plus je dénoncerai vos méthodes. Jamais je ne cesserai de dénoncer. Vous n'aurez jamais la paix. Jamais. ». Et elle le réaffirme : « Tant qu'une femme sera enfermée pour ses idées, je parlerai. Tant qu'on fera payer ma sœur pour mes mots, je dénoncerai. Tant qu'on transformera ce pays en prison, je me tiendrai debout ». Pour Ramla Dahmani, ce combat dépasse désormais le sort de Sonia Dahmani. « Ce combat, c'est pour la justice. Pour la dignité. Pour toutes les voix qu'on tente de faire taire. Et pour tous ceux qui, malgré tout, continuent de parler ».
Pour rappel, Ramla Dahmani a été condamnée à deux ans de prison par contumace, en vertu du décret-loi 54, avec exécution immédiate. Cette condamnation n'a été découverte que récemment par ses avocats, en consultant les registres du tribunal de première instance de Tunis. Depuis l'incarcération de Sonia Dahmani, Ramla Dahmani s'est imposée comme l'une de ses porte-voix les plus résolues. Refusant le silence, elle n'a cessé de dénoncer les dérives, relayant témoignages et alertes sur les atteintes aux droits fondamentaux. Un engagement qui semble, aujourd'hui, lui valoir d'être ciblée à son tour.