Les derniers actes de violences survenus à Sidi Bouzid n'ont pas manqué de susciter de nombreuses interrogations sur les raisons d'un tel soulèvement. Qui sont ces fauteurs de trouble ? Que veulent-ils ? Et, à qui appartiennent-ils ? A qui profiterait l'instabilité ? Dimanche, 30 octobre, le calme était revenu dans la ville après deux nuits de couvre-feu, des nuits mouvementées durant lesquelles les habitants de Sidi Bouzid ont assisté aux nombreux saccages de certains édifices de la ville par ceux que les habitants appellent « des intrus ». De nombreux habitants de la ville sont catégoriques : « ce ne sont pas des Bouzidiens qui ont fait ça ». Mais la théorie selon laquelle, les habitants de Sidi Bouzid auraient incendié la ville dans un moment de colère suite aux déclarations de l'ISIE d'annuler 6 listes de la Pétition populaire, dont Sidi Bouzid fait partie, tient la route et serait même plausible. Cette ville n'est-elle pas le « berceau de la révolution » ? Une ville oubliée et laissée pour compte et dont les habitants ont payé de leur sang pour pouvoir enfin tracer eux-mêmes leur destin et participer pleinement à cette nouvelle page de leur histoire. L'annonce de l'invalidation de cette liste a certes été vécue comme une offense, mais aurait-elle pu, à elle seule, déclencher ces émeutes ? Selon de nombreux habitants de la ville, il s'agirait d'un travail de professionnels, d'un scénario monté de toutes pièces. De nombreux bâtiments portent aujourd'hui les stigmates des vandales, notamment dans l'Avenue Habib-Bourguiba, principale artère de la ville. Les comportements des vainqueurs, loin d'apaiser, ont mis le feu aux poudres et ont attisé la colère et la désillusion des habitants. Ceux qui ont toujours été des exclus et qui aspirent à une certaine reconnaissance de la part du peuple, pour qui « ils ont apporté la révolution ». S'ajoutent à cela, les rumeurs qui circulent sur la toile, accusant Samir Dilou d'avoir traité les électeurs de la Pétition Populaire « d'idiots et d'ignorants ». Aucun enregistrement ne fait foi de ces déclarations, mais l'image du parti Ennahdha en a été sérieusement écornée auprès de ce même public. Pour ne rien arranger, s'ajoute à cela, le refus d'Ennahdha de toute alliance possible avec les élus de la Pétition Populaire. De nombreuses versions ont vu le jour : les plus courantes sont celles selon lesquelles, d'anciens hauts cadres du RCD auraient une main derrière la montée des contestations et des violences dans la région. Certains habitants raconteraient même que « certains cadres du RCD ont parlé de provocation envers Sidi Bouzid et propagé l'idée que tout le monde devait protester ». Peu d'éléments tangibles viendraient corroborer ces suppositions. Un épouvantail facile à brandir pour beaucoup d'autres et qui permettrait à nombreux responsables de se désengager de leurs actes et de ne pas régler leurs comptes avec la justice ou avec l'opinion tunisienne. En attendant, pour désépaissir le mystère, le ministère de l'Intérieur, nous sert des déclarations de « bandes de crime organisés » et de « vandales déguisés en salafistes ». Une affaire à suivre….avant qu'elle ne tombe aux oubliettes comme plein d'autres… Synda TAJINE