Lors d'une interview exclusive accordée à Nessma TV, ce soir de dimanche 25 août 2013, Rached Ghannouchi a adopté, à la fois, un ton plutôt conciliant en affirmant qu'Ennahdha tend ses mains grandes ouvertes à toutes les composantes politiques pour trouver une sortie de la situation dans laquelle se trouve le pays et finir les « derniers cent mètres » de la transition démocratique. Concernant l'initiative de l'UGTT, le leader du parti islamiste réitère qu'elle a été acceptée par son mouvement, mais après l'établissement d'un dialogue destiné à mettre au point les détails de la prochaine étape et la nature du gouvernement à former car, pour lui, le gouvernement actuel ne peut pas démissionner sans qu'on ait une idée précise de celui qui va le succéder. Et c'est à ce moment que cheikh Rached Ghannouchi sort cette nouvelle formule, déjà évoquée par Ameur Laârayedh lors de sa rencontre avec des dirigeants de l'Alliance démocratique, en l'occurrence la constitution d'un « gouvernement d'élections » qui ne peut être formé qu'après avoir achevé la rédaction de la constitution, achevé la mise en place de l'Instance des élections et la finalisation de la loi électorale. Prié de donner un délai ou une date approximative, M. Ghannouchi a dit que cela peut prendre un mois, voire moins. «En tous les cas, nous le souhaitons », a-t-il fini par laisser tomber devant l'insistance du journaliste. M. Ghannouchi évoque son accord pour que les membres du prochain gouvernement ne se portent pas candidats aux prochaines élections. Y compris pour le président de la République dans la mesure où il doit choisir entre rester à son poste sans se présenter au prochain scrutin ou bien partir pour pouvoir y participer. Personne ne doit profiter de son poster pour en tirer d'éventuels dividendes. Rached Ghannouchi estime que tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes en Tunisie dans la mesure où les Tunisiens bénéficient de l'électricité, de l'eau et des salaires versés à temps. Et c'est en grande partie grâce au travail du gouvernement, selon ses propres termes. La notion de crise est toute relative selon d'où on se place, ajoute le leader d'Ennahdha qui reste persuadé que tout le problème réside dans le manque de confiance entre les différents protagonistes politiques avant de lancer un appel à l'opposition de laisser tomber son attitude négativiste et destructrice et de reprendre du service à l'ANC . Pour sa part, Ennahdha multiplie les concessions et n'exige plus le vote de la loi d'immunisation de la révolution, indique encore M. Ghannouchi qui évoque avec grand sourire ses relations amicales avec Béji Caïd Essebsi. « La preuve, je me suis déplacé à Paris pour le rencontrer », a-t-il dit en substance sans vouloir donner la moindre précision sur le contenu de leur entretien de trois heures. Il s'est contenté d'avouer que l'avènement de Nidaa Tounes a transformé la donne dans le paysage politique. Abordant le thème des Ligues de protection de la révolution, le chef d'Ennahdha a repris la même argumentation quant au refus de les dissoudre, s'agissant d'un phénomène à traiter au cas par cas par la justice. Quant au problème soulevé par le terrorisme et l'implication des membres d'Ansar Al Chariâa, M. Ghannouchi a précisé qu'il est pour le dialogue avec eux, même s'ils usent de la violence tout en appliquant la loi contre tous ceux ayant recours aux meurtres et à la violence sanguinaire. A la fin, Rached Ghannouchi lance un appel pathétique à tous, notamment aux élus retirés de retourner à l'ANC et un autre appel à Mustapha Bne Jaâfar pour la reprise des travaux de l'Assemblée. En résumé, le leader du parti islamiste réclame la reprise des travaux de l'ANC et l'entame du dialogue avec tous les partis politiques en vue de parvenir à un consensus concernant le prochain gouvernement qu'il surnomme « gouvernement d'élections », s'il y a accord et consensus pour cela. Dernière remarque, la question des nominations partisanes, qui figure parmi les principales revendications du Front de salut national et de l'UGTT, a été zappée par le journaliste intervieweur. C'est dire que l'interview, annoncée à cor et à cri, n'a pratiquement rien apporté de nouveau et n'a comporté aucune annonce digne de ce nom.