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Entre la présidence et l'IVD, bataille pour un gros gâteau
Publié dans Business News le 01 - 09 - 2015

La nécessité de trouver une solution au problème des hommes d'affaires qui ont spolié l'Etat et les deniers publics n'est pas nouvelle en Tunisie même si le projet de réconciliation économique a récemment relancé les débats. Il existe au moins deux précédents : l'initiative du juriste Kais Saïed et celle, érigée en loi, de l'instance Vérité et Dignité. Tour d'horizon d'initiatives pas si différentes finalement.

La première initiative dans ce sens était celle du constitutionnaliste Kais Saïed, en mars 2012. Le juriste proposait une formule simple pour établir une réconciliation avec les 460 hommes d'affaires interdits de voyage à l'époque. En fait, il s'agit d'imposer aux hommes d'affaires concernés le financement de projets de développement dans les régions défavorisées.

Selon les estimations recueillies par M. Saïed auprès d'une source gouvernementale, il s'agirait d'une somme oscillant entre 10.000 et 13.500 millions de dinars. Cet argent ne passerait pas par les caisses de l'Etat. En revanche, l'initiative prévoit la création d'organismes régionaux chargés de surveiller l'exécution des projets qui seraient financés par l'argent des hommes d'affaires. Ces derniers vont se répartir l'ensemble des délégations du territoire tunisien en suivant un ordre décroissant, les hommes d'affaires les plus « impliqués » prennent en charge les délégations les plus pauvres. Par la suite, les hommes d'affaires restent responsables des structures qu'ils auront financées (hôpitaux, écoles, etc…) pendant 10 ans.

Cette initiative avait été discutée au plus haut niveau, notamment entre le chef du gouvernement de l'époque, Ali Laârayedh, et l'UTICA. La centrale patronale avait émis certaines réserves arguant que l'acte d'investissement ne doit pas se transformer en punition et que le développement ne pouvait se réaliser de cette manière. L'initiative de réconciliation de Kais Saïed a été abandonnée depuis.

Vient par la suite la loi organique 2013-53 du 24 décembre 2013, relative à l'instauration de la justice transitionnelle et à son organisation. C'est en vertu de cette loi qu'a été créée l'instance Vérité et Dignité avec, à sa tête, Sihem Ben Sedrine. La réalisation de la réconciliation nationale fait partie des attributions de cette instance. Ici une précision s'impose : L'instance Vérité et Dignité n'est pas une instance constitutionnelle comme on a pu l'entendre. La constitution, dans son article 148, oblige l'Etat à « appliquer le processus de justice transitionnelle », sans plus.
Selon la loi organique 2013-53 dans son article 145, une « commission d'arbitrage et de conciliation » doit être créée « au sein de l'instance ». Cette commission est en charge, entre autres choses, de statuer sur les crimes de corruption financière. Le traitement de ces crimes se fait sur la base de « demandes de transaction ». Cette demande est présentée par la personne accusée avec le consentement de la victime, qu'elle soit une personne physique ou morale. Cette « transaction » est donc un arrangement ou un accord négocié entre la commission et la personne poursuivie. D'ailleurs, les dites poursuites ne s'arrêtent qu'après « l'application des clauses de la transaction », selon le texte de loi.

Toutefois, aucune précision n'est apportée sur les clauses de ladite transaction et la commission d'arbitrage et de conciliation, constituée au sein de l'IVD, garde toute latitude pour négocier comme bon lui semble. Le seul garde-fou spécifié reste vague et est explicité en ces termes au 1er paragraphe de l'article 145 : « Est créée au sein de l'instance une ‘'Commission d'Arbitrage et de Conciliation'' chargée d'examiner et de statuer sur les dossiers de violations, au sens de la présente loi, après obtention du consentement de la victime, sur la base des règles de la justice, de l'équité et des normes internationales appliquées, et ce, nonobstant l'extinction de l'action et la prescription des peines ».

Ainsi, le traitement de ces « transactions » se fait dans l'opacité la plus totale au sein de l'IVD. Si l'on ajoute à cela les soupçons de malversations qui tournent autour de l'instance, le doute est permis. En effet, le vice-président de l'instance, récemment limogé de son poste, avait fait part de ses doutes sur la gestion de l'IVD par sa présidente, Sihem Ben Sedrine, dans une correspondance adressée au président de l'Assemblée des représentants du peuple.

Sur ce point, le projet de loi présenté par la présidence de la République semble être plus complet. Il n'est pas question de « transaction » mais de restitution du montant total, objet du délit, majoré d'un intérêt de 5% par an, depuis la date où est commis le crime.

Toutefois, les différences ne sont pas énormes entre la loi organique 2013-53 et le projet de loi de la présidence de la République. Ces différences se placent à des points centraux. Par exemple, le projet de loi prévoit la création d'une commission de réconciliation qui peut être assimilée à la commission d'arbitrage et de conciliation de l'IVD. Mais c'est la composition qui change vu que la commission de réconciliation est composée d'un représentant de la présidence du gouvernement, un représentant du ministère de la Justice, un autre du ministère des Finances, le contentieux de l'Etat et deux membres de l'IVD. Les mécanismes de contrôle entre l'Etat et l'instance s'en trouvent ainsi favorisés. Toutefois, il est utile de noter que le projet de loi prévoit que la commission de réconciliation peut se contenter de quatre membres pour effectuer ses travaux. Ceci implique que l'on peut, éventuellement, se passer de la présence des membres de l'IVD si ceux-là souhaitent, par exemple, boycotter la commission.

La deuxième différence fondamentale avec la loi portant création de l'IVD, c'est la limite temporelle. En effet, aucune limite temporelle n'est fixée pour le règlement des « transactions » dans la loi organique 2013-53. On peut admettre que la limite maximale est la durée de vie de l'instance à savoir 4 ans, renouvelable une fois pour un an. Dans le projet de la présidence de la République, l'examen des requêtes se fait pendant trois mois, renouvelables une fois pour trois mois sur la base d'une décision justifiée. Par conséquent, la durée maximale de traitement d'un dossier est de 6 mois.

D'autre part, le projet de loi met aussi l'accent sur l'utilisation de l'argent récolté par la commission de réconciliation. Ainsi, les sommes récoltées sont confiées à la caisse des dépôts et des consignations. Par la suite, cet argent sera investi dans divers projets pour la collectivité le tout sous le contrôle de la Cour des comptes. Cette dernière doit également établir un rapport sur l'utilisation de cet argent et le porter aux trois présidences. Dans la loi organique de la justice transitionnelle, de telles dispositions ne sont pas prévues. Ceci peut être compréhensible dans la mesure où l'IVD est supposée traiter, notamment, des atteintes aux droits de l'Homme et opère sur un champ beaucoup plus large que la réconciliation économique.

Sur plusieurs autres aspects, le projet de loi présidentiel et la loi de l'IVD sont semblables. Par exemple, la réconciliation (ou la transaction) ne concerne que les montants déclarés par ceux qui souhaitent être amnistiés. Ceci implique qu'ils restent susceptibles d'être poursuivis s'ils sont impliqués dans d'autres affaires où s'ils ne déclarent pas la totalité des montants récoltés illicitement. Aussi, le fait que les poursuites ou l'exécution de la peine ne s'arrêtent qu'à la conclusion de l'accord entre les parties et non pas à la demande. Il est également spécifié que la personne qui souhaite être amnistiée doit expliciter par écrit l'ensemble des faits et avouer son crime dans les moindres détails.

En fait, les différences entre l'initiative de Kais Saïed, la loi organique 2013-53 et le projet de loi de la présidence de la République sont minimes. Pour les deux derniers, il s'agit surtout de la composition de la commission chargée de régler les litiges et des délais de traitement. Pourtant, au niveau politique, plusieurs partis se sont érigés contre le projet de la loi de réconciliation alors qu'ils ont allégrement voté la loi portant création de l'IVD, le CPR et Wafa en sont des exemples criants. En plus, il faut rappeler que la loi organique 2013-53 avait été rédigée et votée dans la précipitation pour des intérêts politiques évidents. Aujourd'hui, ceux qui avaient voté la loi de l'IVD critiquent sévèrement le projet de loi de la présidence alors que l'examen montre qu'il y aura plus de transparence au sein de la commission chargée des litiges (gouvernement et IVD au lieu de IVD seulement) et une plus grande célérité dans le traitement des dossiers. Qui cela peut-il bien déranger ?

Quoi qu'il en soit, Sihem Ben Sedrine et les membres restants de son instance sont contre ce projet de loi et estiment que c'est une prise en otage du processus de justice transitionnelle. S'il est vrai que le projet de loi présidentiel piétine quelque peu les plates-bandes de l'instance, il n'en reste pas moins qu'il apporte certaines améliorations dans le traitement d'un type précis de crimes. Il est clair que l'IVD va défendre son pré-carré et s'échiner à garder la main mise sur le règlement de ces affaires en créant sa propre instance en charge des « transactions ».


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