Le Huffington Post Maghreb a publié mercredi 30 septembre un article incendiaire intitulé « Désinformations dans l'affaire du Tunisien condamné pour "pratiques homosexuelles": Un média accusé de diffamation » dans lequel il décortique un article publié deux jours plus tôt sur Business News à propos de l'affaire de l'homosexuel Mohamed Hédi, condamné à un an de prison pour homosexualité. L'article du Huffington Post coïncide avec une belle campagne de dénigrement ciblant Business News actuellement observée sur Facebook et Twitter où la désinformation et la diffamation le dispute à l'insulte et l'invective. Parmi ceux qui ont pris part à la campagne, on trouve même Amna Guellali, directrice du bureau tunisien de Human Rights Watch qui a choisi de tomber dans l'insulte et la diffamation. Aux ordures proférées (et le mot leur appartient), la rédaction de Business News a choisi de ne pas répondre. Le spectacle de défenseurs des droits de l'Homme tomber dans l'insulte de bas étage sans même avoir le courage de s'en défendre au téléphone est assez désolant. Avec l'article du Huffington Post, balancé sur la scène publique et partagé par certains leaders politiques (dont ceux d'Al Massar) comme étant « la vérité, toute la vérité », nous avons constaté qu'il y avait clairement une manipulation de l'opinion publique dans cette affaire. Il fallait donc donner les éclairages nécessaires pour ceux qui se suffisent d'un titre et d'un post FB pour se faire une idée, mais également pour prendre à témoin cette même opinion publique sur ce qui se trame autour de l'affaire de l'homosexuel. Nous aurions d'ailleurs évité cet éclairage si le Huffington Post avait eu l'honnêteté intellectuelle de publier en intégralité nos réponses aux questions de leur journaliste.
Qu'est-ce que donc nous reproche le Huffington Post, puisque Business News estime avoir fait son travail, selon les règles ordinaires en la matière ? Dans son article, la journaliste commence par mettre en doute la version de Business News en écrivant « le média expose ainsi une version des faits présentée comme étant celle du ministère de l'Intérieur, sans citer le nom de l'interlocuteur » puis en écrivant : « la vraie version du ministère de l'Intérieur ». Il est ici sous-entendu que Business News a inventé cette version, puisqu'elle parle plus loin d'allégations. Elle indique ensuite que le média révèle le prénom et les initiales du nom supposé du jeune homme et, ce dernier, ne serait pas étudiant mais "travailleur journalier", selon l'interlocuteur anonyme. Suit après une série de paragraphes où l'on continue à mettre en doute l'article de Business News qu'on menace de poursuivre devant les tribunaux et l'instance nationale de protection des données personnelles. Chiche !
Nos réponses qui se basent toutes sur les règles ordinaires régissant la profession L'article de Business News, analysé par le Huffington Post, fait partie d'une série de papiers sur le même sujet publiés dans nos colonnes. Comme d'autres médias, nous avons suivi de près cette affaire et relayé à chaque fois toute nouvelle information. Avant et après l'article, nous avons relayé la version telle que donnée par l'avocate de l'homosexuel condamné. Dans celui-là, nous avons relayé la version du ministère de l'Intérieur. Pouvions-nous faire autrement que de relayer les versions des deux parties ? Si dans nos articles d'opinion, nous avons bien défendu, et sans ambigüité aucune, la liberté de l'homosexuel de jouir de son corps comme il l'entend et de la nécessité de retirer l'article 230 du code pénal condamnant l'homosexualité, il en est autrement quand il s'agit d'article d'information. Professionnellement parlant, il nous est impossible de ne pas relayer la version d'une autre partie dans l'affaire, celle du ministère de l'Intérieur en l'occurrence, étant donné que notre source est solide. Concernant notre interlocuteur « anonyme », la pratique est courante dans tous les médias de la planète, on ne cite pas systématiquement son interlocuteur, la source suffit. Dans le cas présent, la source est le ministère de l'Intérieur. Personne n'a à connaitre notre interlocuteur, il s'agit de protéger ses sources. Paradoxalement, dans son même article, le Huffington Post cite Business News sans citer son interlocuteur, mais la journaliste n'est pas à une contradiction près dans son article. Pourquoi un interlocuteur anonyme et non une source officielle ? Parce qu'il n'y a eu aucune version officielle du ministère dans cette histoire et il a fallu que Business News trouve un autre chemin pour connaitre l'autre version de l'histoire ! Paradoxalement, encore, le Huffington Post tournait en dérision et mettait souvent en doute – à raison d'ailleurs- les versions officielles de ce ministère, connues pour leur langue de bois et les « sportifs du Châambi » quand on parlait de terrorisme ou la « position immorale » dans laquelle était la jeune fille violée par des policiers. Sur ce dossier, soudain, on nous demande implicitement de ne traiter qu'avec une source officielle ! Il est important ici de noter que l'arrestation a eu lieu le 6 septembre alors que la première communication officielle a eu lieu le 28 septembre sur Nessma TV, APRES l'article de Business News. Aurait-il fallu que l'on attende encore plus longtemps pour que le ministère veuille bien s'exprimer, afin de correspondre à d'hypothétiques règles de déontologie, telles que suggérées par le Huffington Post ? Le porte-parole officiel du ministère de l'Intérieur aurait pu réagir en démentant Business News pour dire qu'il n'est pas responsable de ce qui y a été dit, à travers notre « interlocuteur anonyme », mais il ne l'a pas fait ! Mieux encore, dans son interview accordée au Huffington Post, ce porte-parole ne dément pas un seul mot dans ce qui a été publié dans nos colonnes. Quels sont les points où l'on nous accuse de diffamation ? Nous avons écrit que le ministère de l'Intérieur a dit que l'homosexuel était travailleur journalier ? Son avocate a admis, dans le Huffington et ailleurs, qu'il travaille en parallèle pour subvenir à ses besoins. Son statut d'étudiant serait prouvé par une inscription faite le 10 septembre alors que son arrestation remonte au 6 septembre. Au moment des faits, il n'était donc pas étudiant. Donc notre interlocuteur anonyme du ministère de l'Intérieur ne nous a pas menti ! Nous avons écrit que le ministère de l'Intérieur nous a dit qu'il était prostitué. Ce point là n'a pas été démenti par le porte-parole officiel qui a précisé qu'il a été poursuivi pour sodomie et non pour prostitution. A aucun moment, nous n'avons écrit le contraire et, mieux encore, nous avons dit exactement la même chose. Où sont donc la désinformation et la diffamation ? Nous avons écrit que le ministère de l'Intérieur nous a dit que l'homosexuel a donné son aval pour qu'il soit ausculté par un médecin légiste. Ce point, comme les autres, est confirmé par le Huffington Post quand la journaliste cite le porte-parole du ministère. Le même point est démenti par son avocate, et ce démenti a été relayé par Business News, bien avant le Huffington Post. Ici aussi, nous ne voyons ni diffamation ni désinformation. L'autre point qu'on nous reproche est d'avoir dévoilé l'identité de l'homosexuel. Ceci est faux, puisque nous n'avons dévoilé que son prénom composé, Mohamed-Hédi, contrairement à ce qu'a dit Mme Guellali. Personne n'a dit avant cela que Marwen était un pseudonyme et il a fallu que Business News dévoile le vrai prénom pour que l'on sache que l'avocate a usé d'un pseudonyme pour parler de son client. "Même le fait de divulguer les initiales ou le prénom de l'accusé peut lui porter préjudice et constituer une menace à son intégrité physique, vu la sensibilité du sujet", a déclaré un juriste au Huffington Post. Soit ! Dans ce cas, pourquoi l'avocate n'a pas appelé Business News pour demander d'utiliser un pseudonyme au lieu du prénom puisqu'il y a un risque pour son client ? Elle a bien nos coordonnées, puisque nous l'avons appelée à plusieurs reprises, sans qu'elle daigne nous répondre ! Quant à la menace sur l'intégrité physique, le Huffington Post adopte, pour la cause, une toute nouvelle attitude ! Personne n'a parlé de menace sur l'intégrité physique pour un cas mille fois plus grave aux yeux de la société, celui de Jabeur Mejri ! Nous avons défendu les droits des homosexuels indépendamment de cette affaire ainsi que la révision de l'article 230 du code pénal, et ceci est clairement mentionné dans deux articles d'opinion, ainsi que notre article d'informations de la journée du 28 septembre 2015. Article publié suite à la parution de la version du ministère de l'Intérieur à ce sujet. Reste l'accusation d'homophobie dont on nous accable sur les réseaux sociaux, suite à l'article du Huffington Post. Accusation que nous rejetons catégoriquement. Dans cette affaire, et bien d'autres, nos articles d'opinion et d'information démontrent tout notre soutien à la cause des libertés, dont celle de l'homosexualité. Nos archives sont disponibles et les lecteurs fidèles de notre journal savent que nous avons été parmi les premiers à soutenir l'association Shams et que nos chroniques montrent clairement la position du journal vis-à-vis de la situation dramatique de ce jeune homme.
A la lumière de tous ces éclairages, il y a lieu de s'interroger pourquoi accuse-t-on Business News de tous ces maux ? De toute manière, les accusations mensongères de diffamation visant Business News ne sont pas nouvelles. Plusieurs personnalités et partis politiques, dont le CPR, nous ont déjà adressé de telles accusations, car nous avons révélé des vérités dérangeantes, ce qui revient à dire que nous avons fait notre devoir tout simpement. En tout état de cause, il est déplorable d'utiliser le drame que vit ce jeune homme pour un règlement de compte entre journaux ou entre personnes. Nous ne sommes certainement pas infaillibles et nous sommes loin d'être parfaits, mais que nos lecteurs sachent que nous faisons tout ce qui est en notre pouvoir pour améliorer notre rendement, avec nos moyens de bord, fort limités par rapport à nos besoins. Nous ne disposons pas de financements étrangers ou/et occultes et nous ne vivons que grâce à la confiance de nos lecteurs et de nos annonceurs, en toute transparence.