L'Assemblée des représentants du peuple a adopté le projet de plan 2016-2020 ou le programme 2017-2020 du FMI ? Le projet de loi d'approbation du plan de développement 2016-2020 vient d'être adopté par l'Assemblée des représentants du peuple (ARP). La bonne affaire ! N'y avait-il pas mieux à adopter ? Le projet de loi d'urgence économique, par exemple. On peut se demander en effet quelle mouche a donc piqué le gouvernement pour faire adopter un projet de loi dont le document qui lui est annexé, à savoir le plan de développement 2016-2020, est, soit totalement obsolète si l'on se réfère au plan initial élaboré en 2015, soit que les objectifs de ce dernier aient été précipitamment actualisés pour l'occasion, rendant, de ce fait, sa pertinence sujette à de très fortes réserves.
Le plan quinquennal de développement 2016-2020 initial, élaboré sous le gouvernement de Habib Essid établissait un schéma de croissance dans lequel la croissance moyenne du PIB serait de l'ordre de 5% contre 1,5% pour la période 2011-2015. Selon le même document, l'enveloppe globale d'investissement durant 2016-2020 serait de 125 milliards de dinars, le double de ce qui a enregistré durant 2011-2015. Pour sa part, le taux de chômage atteindrait 11% en 2020 contre un peu plus de 15% en 2015. En outre, les exportations de biens et de services évolueraient à un rythme annuel moyen de 6% tandis que les importations ne croîtraient que d'un peu plus de 5% en moyenne. Au vu des résultats qu'affichent l'année 2016 en la matière et ce que préfigure l'année 2017, ce serait proprement miraculeux que l'économie du pays puisse réaliser ces performances. A preuve, pour les deux premières années du plan, la moyenne de croissance ne serait, au mieux que de 2%. Ce qui exigerait un rythme de croissance annuel moyen de 6% sur le restant de la période. Un taux rarement atteint au cours de ces 20 dernières années.
Le gouvernement aurait-il actualisé ce schéma de croissance ? Rien ne permet de l'affirmer même si certaines sources indiquent que l'objectif de croissance a été réajusté à 3,5% en moyenne sur la période. Hasard ou nécessité, ce nouvel objectif correspond exactement aux prévisions établies par le FMI sur la base desquelles l'institution de Bretton Woods a accordé un crédit de 2,7 milliards de dollars sur 4 ans à la Tunisie. Des prévisions qui supposent des pré-requis que les autorités tunisiennes devront impérativement satisfaire. Autrement dit, il s'agit de mettre en œuvre, sans aucune autre alternative, les réformes structurelles identifiées par le Fonds. L'adoption du projet de plan 2016-2020 par l'ARP constitue un gage de bonne volonté du gouvernement et implicitement une manière de forcer la main au législateur qui, en adoptant le plan réactualisé, ne pourrait plus se défausser des contraintes qui le sous-tendent. Les réformes, on en recense une vingtaine. Certaines ont été adoptées mais leur mise en place n'est pas totalement achevée : loi bancaire, marchés publics, partenariat public-privé ou code d'investissement. D'autres réformes et non des moindres doivent être introduites qui concernent des domaines et secteurs d'une importante sensibilité : l'emploi, le code des douanes, le code des changes, la réforme de l'administration et de la formation professionnelle, celle de l'éducation et de l'enseignement supérieur, sans oublier la réforme des entreprises publiques et celle de la compensation, en y ajoutant la réforme du système de santé et celui des retraites. Et tout cela devrait être opérationnel au cours de ces trois prochaines années. C'est d'ailleurs cela que la délégation du FMI chargée du suivi du programme de réforme de la Tunisie veut constater avant tout décaissement des tranches de crédit prévues par l'accord élargi. La délégation n'a pas pu l'acter lors de la revue-programme de la fin de l'année 2016 ni lors de celle de février 2017. La troisième sera-t-elle la bonne pour le gouvernement ?