Hammamet connaît une croissance urbaine et touristique rapide et non contrôlée. Ce qui se répercute négativement sur l'organisation de l'espace. La maîtrise de cette prolifération urbaine est indispensable car elle conditionne la qualité de vie mais aussi le développement économique. Le bon fonctionnement d'une agglomération dépend de la qualité des infrastructures et de leur organisation. Le phénomène urbain est un enjeu majeur de développement. Mais la métamorphose rapide de la ville d'Hammamet la rend aujourd'hui méconnaissable à un visiteur des années 80. La marée touristique y a été tellement brutale et généralisée que le Hammamet « paradisiaque » que connurent Paul Klee, André Gide, Georges Bernanos et bien d'autres, s'est comme par enchantement évaporé. Dr Salem Sahli, secrétaire de l'Association d'éducation relative à l'environnement ne mâche pas ses mots « La fièvre du béton n'a jamais été aussi forte à Hammamet. Partout c'est l'effervescence. La ville semble livrée à la surenchère immobilière. Au sud, au centre, comme au nord de la ville, les grues sont à l'œuvre pour ériger des complexes résidentiels, des centres commerciaux, des unités hôtelières…que sais-je encore ? Avec pour dénominateur commun une caractéristique : le gigantisme. Et c'est maintenant la mer et ses abords immédiats qui sont visés par les promoteurs de ces « choses », risquant de transformer les rares fenêtres vertes ouvrant sur le golfe d'Hammamet en un immense voile de béton barrant l'horizon. De proche en proche et d'extension en extension, les quelques sites demeurés jusque là intacts sont phagocytés par les constructions, et ce, malgré la grogne d'une partie de l'opinion et de certains conseillers municipaux. Ceux-ci font remarquer que la plupart des constructions hideuses contre lesquelles ils s'insurgent ont pour origine une dérogation à une disposition d'urbanisme. Et ils ajoutent que les dérogations généreusement octroyées aux promoteurs constituent une des techniques juridiques qui, a le plus porté atteinte à l'esthétique des habitations et à leur insertion dans l'environnement de la ville. Incohérence des aménagements entrepris Il n'y a pas que ces « énormes choses » qui défigurent Hammamet, il y a aussi cette somme de « petites choses », de petites initiatives, de petites atteintes au bon goût et au bon sens, toutes « anodines », mais qui en s'additionnant, finissent par détruire sournoisement mais sûrement, la « quintessence d'un lieu », l'âme d'un quartier ou la mémoire d'un monument « Il suffit d'une petite balade au centre d'Hammamet pour se rendre compte de l'incohérence des aménagements entrepris nous explique Dr Sahli : des parkings ont été aménagés au pied du fort et des remparts ; le café Sidi Bou Hdid est l'objet d'une exploitation commerciale bassement mercantile qui a complètement gommé la valeur patrimoniale de ce monument du 12è siècle ; la médina ( bledd), le cœur historique de la ville des jasmins, est quant à lui en voie de « bazarisation » ; les lampadaires de la place 7 novembre, les enseignes lumineuses et autres panneaux publicitaires -véritable hymne à la laideur- finissent par produire chez le visiteur une impression de désordre inesthétique. Pourtant ces lieux chargés d'histoire recèlent une force culturelle qui pourraient constituer un des leviers fondamentaux du développement local à Hammamet. Mais pour cela, il nous faut passer d'une culture de consommation à une consommation culturelle. Il n'est plus permis aujourd'hui de fermer les yeux devant ces atteintes à l'esthétique que subit la ville d'Hammamet. Ce mal est d'autant plus inacceptable, que depuis des années, la volonté des associations et des acteurs locaux de restituer à notre ville sa beauté perdue s'est concrètement traduite dans nombre de manifestations de sensibilisation, de programmes éducatifs ou encore de projets de terrain. Trahir cette volonté, c'est trahir les principes de démocratie et de citoyenneté dont notre révolution est porteuse ».