Par Abdelhamid Gmati Depuis l'attentat de Sousse, les forces de sécurité et l'armée sont en «état d'urgence» et ont mis au point tout un dispositif sécuritaire. Selon le ministre, Kamel Jendoubi, plus de 100.000 agents de police, des gardes nationaux et des agents de la Protection civile, en plus des forces de l'armée nationale, sont déployés, et quelque 3.000 agents de sécurité ont été affectés à la protection des plages, des hôtels et des sites archéologiques». Cela donne des résultats : 127 personnes soupçonnées d'appartenance à des groupes terroristes ont été arrêtées. Et les unités de l'armée poursuivent la traque des éléments terroristes et ont bombardé, lundi dernier, les montagnes de Kasserine et de Ouergha au Kef. Ceci sur le plan de l'action directe. Pour tarir les ressources des terroristes, un mur de sable et de tranchées est en cours de réalisation, au coût de 5 millions d'euros, pour sécuriser la frontière avec la Libye, où les candidats terroristes se rendent clandestinement pour formation et d'où proviennent en contrebande armes, munitions et autres. Des protestations ont fusé contre ce mur, tant de l'intérieur que de l'extérieur du pays ; il faut préciser que ce mur ne gêne en rien le commerce entre les deux pays qui continue à travers les points de passage officiels et reconnus. Seuls les contrebandiers et les terroristes en pâtiront. Mais cela suffira-t- il? Le ministre de l'Intérieur a affirmé «qu'il n'y a pas une organisation en Tunisie qui s'appelle Daech mais il y a certains éléments qui ont prêté allégeance à cette organisation terroriste». Cela veut dire qu'il y a un véritable vivier de terroristes en Tunisie. On en a mesuré certains résultats. Selon un récent rapport d'un groupe de travail des Nations unies, plus de 5.000 Tunisiens ont rejoint l'organisation terroriste de l'Etat islamique, plus connu sous le nom de Daech, ou encore d'autres groupes extrémistes. On retiendra qu'ils ont été embrigadés et recrutés en Tunisie. Et leur nombre n'est pas établi. Il faut d'abord relever que, depuis la révolution, certains mouvements et autres groupes ne cessent de faire référence à la religion et au passé d'il y a 14 siècles. Il n' y a qu'à voir les feuilletons historiques diffusés sur plusieurs chaînes de télévision. La corruption honnie du régime passé a suscité le souci du Tunisien d'établir l'honnêteté, la probité. Et il a cru trouver cela auprès des personnes se réclamant de la religion. S'en est suivi un changement des mentalités et une sorte de naïveté, bien exploités par ce que l'on appelle «les marchands de la religion». Voilà un bon terreau pour les extrémistes et les terroristes. On le constate dans cette prolifération de voiles sous toutes les formes, du hijab au niqab et dans ces barbes noires hirsutes et ces kamis, tous accoutrements étrangers à la société traditionnelle tunisienne. Ces femmes voilées apparaissent, «normalement», comme «journalistes» ou comme invitées sur nos chaînes. On a même vu une niqkabée apparaître lors d'une émission de télévision sur une chaîne tunisienne. Cela se trouve dans les mosquées, les écoles, les jardins d'enfants, où l'on enseigne le jihad, le martyre et les « procédures expresse » pour entrer au paradis. L'Observatoire tunisien des jeunes a indiqué, mardi dernier, «qu'un jeune sur trois est sympathisant du courant salafiste dans sa dimension caritative et relative à la prédication, avec néanmoins un rejet clair quant à l'implication du courant salafiste dans la dimension politique». Cela veut dire que, «profitant de ce penchant, les salafistes pourraient exploiter le vide laissé par l'Etat et la société civile dans le domaine caritatif et social pour attirer et endoctriner les jeunes». Un islamiste réputé n'avait-il pas préconisé, il y a 4 ans, de s'occuper des jeunes et des enfants pour les enrôler dans l'idéologie islamiste ? «Visez les enfants parce qu'ils sont vulnérables et, à l'âge venu, ce sont eux qui prendront la relève pour endoctriner à leur tour leurs propres enfants et à transmettre intact ce système antidémocratique à la génération suivante». Ce qui a amené la secrétaire d'Etat auprès de la présidence de la République, chargée des relations avec la société civile, Saida Garrach, à déclarer que «la lutte contre le terrorisme commence à l'école». Et elle annonce : «Nous préparons actuellement un projet de solidarité pour la prochaine rentrée scolaire qui permettra de rénover certaines écoles, à travers les dons des associations et d'apporter de l'aide aux familles défavorisées, en leur achetant le matériel scolaire nécessaire avant la rentrée». Certes, on a fermé des mosquées «non réglementaires» et des jardins d'enfants. Mais il faudrait aussi mener une campagne auprès du public et des parents, pour qu'ils encadrent sérieusement leurs jeunes. Car ils sont les premiers concernés.