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Réforme linguistique : un sujet qui fâche
Publié dans La Presse de Tunisie le 06 - 10 - 2019

Etant universitaire et philologue, je m'occupe depuis des années à analyser et étudier la langue parlée par mes étudiants tunisiens.
Un sujet qui n'a jamais pu être abordé par le passé par le pouvoir politique d'une façon sérieuse et «pacifique » j'oserais dire, à cause des différents événements que la Tunisie a connus.
On dirait que le sujet dérange énormément, en particulier les puristes arabisants convaincus, mais comme tous les sujets sensibles, ceci mérite une analyse approfondie et honnête de la part de nous tous. J'inviterais donc le lecteur à ne pas se sentir « blessé » ou visé par mes propos que je reporte ci-bas et à considérer ma proposition comme l'une des solutions possibles qui pourrait contribuer à avancer sur cette lancinante problématique linguistique en Tunisie, qui, comme dans d'autres pays dans le monde, fait face à ce genre de problème.
Est-ce-que le problème de la langue est une priorité pour notre gouvernement ? Si oui, quelle langue parle-t-on ?
La complexité linguistique en Tunisie touche profondément à la politique, au niveau culturel de nos jeunes et aux innombrables défaillances du passé de notre système éducatif.
Analysons le problème, partant du principe que chaque pays peut avoir une, deux, voire trois langues officielles et/ou maternelles. Prenons l'exemple des Maltais, des Belges, des Suisses, des Luxembourgeois et d'un nombre considérable de peuples africains qui s'expriment dans plusieurs langues.
Je tiens à souligner aussi que la langue maternelle est celle avec laquelle nous nous exprimons tous les jours, une langue parlée sur tout le territoire national et avec laquelle j'exprime mes états d'âme : la joie, l'amour, la rage, les chagrins…
Ma langue maternelle est donc celle que j'utilise quotidiennement et sans aucune restriction politique, m'adressant à mes parents, mes amis, mes professeurs, mes collègues de travail, etc.
Nous, Tunisiens, utilisons dans toutes les circonstances là, notre langue maternelle millénaire, remontant au moins à la période punique à l'époque de la civilisation carthaginoise, qui est le tunisien, relégué erronément en Tunisie au statut de « dialecte ».
Le tunisien demeure linguistiquement une langue, construite sur des substrats berbère, latin (langue romane d'Afrique) et néo-punique importants, tandis que son vocabulaire est principalement dérivé d'une corruption morphologique de vocabulaire arabe, français, turc, italien, et de langues espagnoles. Tous les critères linguistiques sont respectés, des règles propres à une langue, possédant une grammaire et des textes littéraires et théâtraux souvent ignorés.
Nous savons pertinemment que la langue est le miroir de tout un peuple et de toute une nation. La langue vit grâce aux apports extérieurs qui en font leur richesse, la langue reflète notre identité culturelle et l'appartenance à une région géographique, mais parfois aussi à un régime politique.
Prenons l'exemple des pays du Maghreb, nous nous rendrons vite compte que chaque pays possède sa propre culture à laquelle tient énormément et que grâce à celle-là, il peut se différencier des autres pays appartenant à la même région géographique.
Cette différence culturelle s'exprime essentiellement par sa langue.
A titre d'exemple, citons le Maroc ou l'Algérie qui ont une culture et une langue propres à eux qui les rendent différents linguistiquement et parfois culturellement de la Tunisie, pourtant si proche !
Pourquoi, alors, continuer à refuser notre belle langue tunisienne, nous obstinant à considérer l'arabe classique comme la seule langue maternelle?
Et qui dit que l'une exclut l'autre ?
Une des innombrables réponses est sans aucun doute le panarabisme et sa dictature linguistique. Ce mouvement politique, culturel et idéologique fortement séculier qui visait à unifier les « peuples arabes », se proposant comme le défenseur de l'identité arabe.
Mais de quoi parle-t-on ? de l'unification des peuples arabes ? de la défense de l'identité arabe ?
Vous avez déjà vu une quelconque unité politique, culturelle et idéologique entre les pays dits arabes ? Et qu'est-ce-qu' entendrait-on avec la définition de « pays arabes » ?
A mes yeux, tout cela relève du faux, surtout après le 14 janvier 2011 où le soulèvement des masses a souligné encore une fois cette différence culturelle et linguistique entre les peuples.
Rappelez-vous que notre « mot d'ordre révolutionnaire » a été « Dégage ».
D'un point de vue linguistique, ceci est très important et pas du tout anodin. Lors de la révolution, nous nous sommes exprimés donc dans la deuxième langue du pays, qui est le français.
A noter que notre voisin, la Libye, ne s'est exprimé ni dans cette langue-là, ni en anglais d'ailleurs, et même la façon de revendiquer ses droits pour la conquête de la démocratie a été et continue à être totalement différente de la nôtre.
Et pourtant on est des voisins !!!
Pour revenir maintenant au système éducatif, et je parle en tant qu'enseignant universitaire, le manque d'une identité linguistique crée, qu'on le veuille ou pas, un grand problème culturel et identitaire chez nos jeunes.
Cette recherche de l'identité pourrait expliquer, à mon avis, les incompétences linguistiques de nos étudiants, qu'une fois à l'Université, n'ont aucune maîtrise de l'arabe, leur soi-disant « langue maternelle », ni du français, leur deuxième langue.
En effet, ils ne parlent ni l'une ni l'autre. L'écolier, le lycéen, l'étudiant, doivent impérativement avoir la possibilité de pouvoir s'exprimer, écrire et étudier dans leur seule langue maternelle, le Tunisien, une langue pas statique et qui évolue, comme toutes les langues vivantes, avec l'apport de néologismes liés à l'informatique, à la science, à la médecine, etc.
La langue arabe classique est, par contre, statique, souvent contre toute évolution, car liée à la sphère du sacré.
Notre système éducatif a un besoin urgent de s'adapter aux exigences de nos jeunes qui ont subi dans le passé une arabisation sauvage et indiscriminée, privant leur cerveau de toute sorte de connaissance et d'esprit critique.
Il s'agit d'une spoliation du savoir, voulue expréssément par le pouvoir politique dictatorial qui a su créer une masse d'analphabètes diplômés, nuls en arabe, nuls en français et privés de toute forme d'analyse.
Je me demande, aussi, comment on peut demander à nos étudiants d'avoir un bon niveau culturel et linguistique quand ils se trouvent face à trois langues « nationales non déclarées ».
Ils parlent leur langue maternelle, le Tunisien, qui n'est pas officielle, on les oblige à écrire en arabe littéraire qui a toutes les caractéristiques d'une langue étrangère, et on leur fait suivre à l'école et à l'université des cours en français.
Le français demeure la langue de la culture, de l'élite, de l'informatique, des relations avec l'extérieur, langue de la diplomatie, mais aussi de l'enseignement et passeport pour l'Occident, pour tous ceux qui désirent continuer leurs études sur le Vieux continent.
Le français de Tunisie est donc à protéger et à sauvegarder.
Nous sommes tous responsables de la baisse du niveau culturel et linguistique de nos jeunes.
Le nouveau gouvernement devrait remédier à tout cela et se mettre au travail dès son installation pour faire face à cette schizophrénie linguistique, mettant en avant une fois pour toutes l'intérêt national, donnant des instruments à cette génération « abusée », d'avancer dans la lutte contre l'ignorance et l'illettrisme.


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