Au palais du Bardo, on est conscient que la nouvelle législature sera chargée des lois que tout le monde attend. La pression est de mise, surtout pour la création de la Cour constitutionnelle qui doit naître avant fin octobre Aujourd'hui, les Tunisiens et les Tunisiennes seront au rendez-vous avec le démarrage de la deuxième législature de l'Assemblée des représentants du peuple (ARP). Cette législature devrait se prolonger, selon le règlement intérieur de l'ARP, jusqu'à juillet 2016. Au programme de cette législature, selon un accord convenu entre Mohamed Ennaceur, président du Parlement, et Habib Essid, chef du gouvernement, quelque 22 projets de loi considérés comme prioritaires dont en premier lieu le projet de loi relatif à la création de la Cour constitutionnelle devant être constituée impérativement avant fin novembre prochain comme le veut la Constitution du 27 janvier 2014. Une autre loi doit être également adoptée définitivement. Il s'agit de la loi organique portant création du Conseil supérieur de la magistrature censé remplacer officiellement l'Instance provisoire de l'ordre judiciaire (Ipoj). Les députés se doivent d'examiner et d'adopter les nouveaux articles du projet de loi que l'Instance provisoire de la constitutionnalité des projets de loi a déclarés anticonstitutionnels, suite à une requête d'opposition introduite par trente députés mécontents. La création du Conseil supérieur de la magistrature (CSP) doit intervenir avant celle de la mise en place de la Cour constitutionnelle dans la mesure où il revient au CSP, selon la Constitution, de choisir quatre parmi les membres de la Cour constitutionnelle. C'est la raison pour laquelle l'ouverture, aujourd'hui, de la nouvelle législature sera marquée par une séance plénière au cours de laquelle les députés décideront de la naissance définitive du Conseil supérieur de la magistrature. D'autres projets de loi figurent dans l'agenda de la législature qui démarre aujourd'hui. En tête de ces projets de loi, celui relatif au nouveau code électoral qui régira les prochaines élections municipales et régionales, la loi sur le nouveau découpage administratif et la loi sur les nouvelles prérogatives qui seront attribuées aux municipalités et aux régions. Sauf que dans l'agenda convenu entre Ennaceur et Essid, il n'y a point de référence au projet de loi relatif à la réconciliation économique soumis à l'ARP par le président de la République, Béji Caïd Essebsi. Certains observateurs n'ont pas hésité à tirer la conclusion selon laquelle le gouvernement aurait décidé de retirer le projet de loi vu la levée de boucliers qu'il a provoquée. Et le responsable de l'information au sein de l'ARP de se trouver obligé d'intervenir pour démentir l'information relayée par plusieurs médias selon laquelle le gouvernement n'a pas le droit de retirer un projet de loi déposé par la présidence de la République. Reste maintenant à se poser la question : est-ce que les députés pourront respecter les délais prescrits à l'adoption de la loi sur la Cour constitutionnelle et à son entrée en vigueur ? Une autre question non moins importante : est-ce que les nouveaux membres de la commission parlementaire de législation générale qui a adopté jusqu'ici 50 articles de la loi en question et décidé de transférer 10 articles (objet de conflit) à la séance plénière vont continuer le travail accompli par leurs collègues ou vont tout refaire ? Le Dr Souheil Alouini, député nidaiste, confie à La Presse : «Je pense que les 10 jours restants du mois d'octobre sont suffisants pour que les députés respectent les délais et adoptent la loi d'ici début novembre prochain. Les nouveaux membres de la commission de législation générale poursuivront le travail accompli par leurs collègues. Il reste encore 19 articles à discuter sur les 79 que comprend le projet de loi relatif à la Constitution. 60 articles ont été déjà discutés, cinquante ont été avalisés par la commission et les 10 autres seront transférés à la séance plénière ou à la commission des compromis. Pour ce qui est de la constitution des nouvelles commissions parlementaires, elle interviendra sûrement en cours de semaine puisque Nida Tounès n'a pas encore choisi les membres qui le représenteront au sein des commissions ainsi que les présidents des commissions qu'il aura à diriger. Les journées parlementaires de Nida devant arrêter les choix du parti se tiendront les 21 et 22 octobre». A l'opposé de l'optimisme affiché par le nidaiste, une source constitutionnaliste bien informée pense qu'il «existe de réelles craintes de voir les délais prescrits par la Constitution dépassés au vu du rythme actuel des travaux de la commission de législation générale». La même source ajoute : «Les nouveaux membres de ladite commission doivent poursuivre le travail déjà accompli par leurs collègues sortants. Reste qu'il n'est pas évident qu'ils puissent respecter la règle de la continuité. Au cas où ils décideraient de tout réexaminer, il est sûr que les délais constitutionnels seront violés». A la question de savoir la date exacte de la promulgation de la loi sur la Cour constitutionnelle, la même source précise : «La loir sur la Cour constitutionnelle doit être promulguée avant fin octobre et la cour doit être mise en place et entrer en fonction au plus tard le 22 novembre prochain. Mais avant d'en arriver là, il faut que le Conseil supérieur de la magistrature soit constitué définitivement et entre en fonction». Il est à préciser que les principaux points litigieux concernant le projet de loi sur la Cour constitutionnelle ont trait à l'ancienneté dont doit se prévaloir tout candidat désirant siéger à la Cour et la possibilité pour la Cour de décider d'elle-même de déclarer une loi anticonstitutionnelle. Ceux qui s'opposent à cette disposition soutiennent que la Cour constitutionnelle ne peut agir qu'une fois saisie par le président de la République, le président du Parlement ou par au moins trente députés.