Après le «Projet Sfax» en 2013, la Délégation de l'Union européenne en Tunisie organise le «Projet Kairouan». Une exposition de photographies issue de la Résidence euromaghrébine tenue à Kairouan est actuellement visible au Palais El Ebdellia à La Marsa. Rencontre, dialogue interculturel, échange et complémentarité sont les objectifs qui ont rassemblé 27 artistes photographes européens et maghrébins lors d'une Résidence organisée à Kairouan. Après avoir travaillé sur le «Projet Sfax» en 2013, c'est au tour de la ville de Kairouan d'abriter le deuxième événement, le «Projet Kairouan» 2015. Un projet rendu possible grâce à la collaboration de la Délégation de l'Union européenne en Tunisie, dont l'objectif est de faire découvrir et partager ce regard croisé que posent les photographes sur cette ville sainte et millénaire, troisième ville la plus importante du monde arabo-musulman, tout en appuyant «son processus d'adhésion ou la consolidation de son appartenance à la liste du Patrimoine mondial de l'humanité». Issue de la Résidence euromaghrébine, qui s'est étalée sur une semaine à Kairouan, une exposition d'envergure est abritée depuis le 5 décembre dernier par le Palais El Ebdellia à La Marsa. L'exposition est composée de près d'une centaine de photographies, à travers lesquelles des photographes reconnus, venus de tous horizons, nous livrent leur fougue et leurs regards croisés, toutes techniques et démarches confondues, nous donnant à voir, chacun à sa manière, un aspect différent de la ville de Kairouran. A propos de cette exposition, Mme Laura Baeza, ambassadeur de l'UE en Tunisie, a déclaré que «ces photographies sont une invitation à un voyage initiatique pour découvrir les richesses cachées de cette capitale culturelle rayonnante. En effet, cette ville paradoxale, protégée par ses remparts et par son histoire édifiante, précédée de sa réputation historique, se révèle d'une étonnante modernité et animée d'une furieuse envie de vivre, enracinée dans la tradition. A l'heure des troubles, des conflits, des violences subies et entretenues, ces photos nous rappellent, avec force, la puissance de la culture pour jeter des ponts entre des sociétés et des civilisations qui se sont, tout au long de leur histoire, parfois affrontées...». On a eu le plaisir, donc, de découvrir la sensibilité esthétique et la charge émotionnelle contenues dans le filtre du regard des 27 photographes, à savoir Laura Kant (Pays-Bas), Hicham Benohoud et Majida Khattari (Maroc), Arslane Bestaoui et Redouane Chaib (Algérie), Calogero Cammalleri (Italie), Marianne Catzaras (Grèce), Peter De Mulder et Axel Derriks (Belgique), Malika Diagana (Mauritanie), Mejdi El Bekri, Wassim Ghozlani et Mouna Jemal Siala (Tunisie), Michel Giliberti et Karim Mrad (France), Iosif Kiraly (Roumanie), Iiris Lilja Kuosmanen (Finlande), José Manuel Navia (Espagne), Moritz Neumüller (Autriche), Oliver Soulas (Allemagne),Tomasz Tomaszewski (Pologne), Ellie Tsatsou (Royaume-Uni) et Valter Vinagre (Portugal). Un témoignage exaltant par sa beauté réaliste, des œuvres qui montrent, au-delà de la qualité artistique et esthétique, l'alchimie qui s'est instaurée entre ces photographes et leurs sujets. En contemplant ces diverses prises, on sent l'envie des photographes de transmettre le plus de sens, de valeurs, de lumières et couleurs possibles, en faisant parler murs et ruelles, monuments et simples boutiques, jeunes et vieux, hommes et femmes, maisons et cimetières, tout en se laissant fondre dans chaque coin de la Médina, essayant de cerner et de transmettre ce qui fait l'originalité et la beauté de cette ville. Leïla Souissi, la commissaire d'exposition, a affirmé pour sa part que «les instants immortalisés par tous ces photographes seront inscrits pour longtemps, en Tunisie et ailleurs, dans les yeux et les archives. Les différentes visions, qui nous ont été transmises et qui seront partagées ici et hors de nos frontières, nous aideront peut-être à mieux comprendre et à appréhender les divisions, les racismes, les haines qui sont la plupart du temps dus à l'ignorance que nous avons les uns des autres. Ces photos vont également nous apprendre à apprécier la fraternité, la solidarité et la générosité qui ont existé et qui ont été partagées dans la joie et, souvent, les fous rires durant la Résidence, et à nous encourager à poursuivre ces rencontres entre une ville et des artistes venus de différents horizons». Et l'on ne photographie une ruelle, non plus qu'un ciel ou un arbre, sans s'effrayer d'abord d'ajouter à l'art de l'art, à la sensibilité sa propre sensibilité et au mystère, son propre mystère grâce à un soyeux travail sur la lumière et le cadrage ainsi que d'autres procédés techniques qui font la spécificité de chaque artiste et sa singularité. Une exposition à découvrir jusqu'à la fin du mois à La Marsa.