Parmi les principales propositions présentées par l'Organisation de défense du consommateur (ODC) et la Chambre syndicale nationale des chaînes de magasins d'habillement pour une nouvelle loi sur les soldes devant remplacer celle n°40 de juin 1998, figure notamment la fixation d'une date précise pour les deux saisons des soldes. Pour l'ODC, cette date serait le 1er février de chaque année pour la saison des soldes d'hiver et le 1er août de chaque année pour ceux d'été. Encore plus précise, la chambre syndicale nationale des chaînes de magasins d'habillement suggère de fixer le dernier jeudi du mois de janvier pour les soldes d'hiver et le dernier jeudi du mois de juillet pour ceux d'été. Ladite chambre propose, en outre, de fixer une durée bien déterminée de la période des soldes, qu'elle soit de 6 ou 8 semaines. L'objectif est d'éviter les décisions d'allongement de la période de ces derniers, «une telle prorogation étant à l'encontre de la visibilité des opérateurs économiques et un facteur favorisant l'anarchie», selon Mehdi Abdelmoula, président de la chambre. Délais de stockage En ce qui concerne le délai de stockage des marchandises qui seront écoulées en période de soldes, les deux organisations (ODC et chambre syndicale) appellent à réduire cette période de trois mois à un mois, sachant qu'actuellement les marchandises exposées pendant les soldes ne doivent pas avoir été acquises, plus de trois mois avant le lancement de ces derniers. D'après Abdelmoula, cette condition de trois mois est inutile aujourd'hui, notamment avec «l'air de la fast fashion qui est un phénomène mondial exigeant un renouvellement continu des collections offertes sur le marché». Les recommandations de la chambre syndicale portent également sur la réduction du délai du dépôt par le commerçant auprès du ministère du Commerce de la déclaration préalable indiquant la liste des produits à écouler pendant les soldes. Ce délai devrait passer de 15 jours avant la date prévue pour le début de la vente des produits sous forme de soldes périodiques, à une semaine. De même, la chambre a appelé au changement de l'article 17 de l'ancienne loi sur les soldes (loi n°40 de juin 1998) interdisant les promotions dans les 40 jours qui précèdent les périodes des soldes périodiques, proposant de réduire ce délai à 20 jours. Introduits en Tunisie depuis 1999, les soldes saisonniers n'ont cessé de partager les consommateurs entre satisfaits et insatisfaits de ces périodes de rabais, outre la multitude des infractions relevées. Des données du ministère du Commerce ont, à ce titre, révélé que 239 infractions ont été relevées par les équipes du contrôle économique à la fin de la saison estivale des soldes de l'année 2015. Renforcer les sanctions L'ODC a donc appelé au renforcement des sanctions à l'encontre des contrevenants, lesquelles sanctions se limitent pour le moment à des amendes financières, a indiqué Saâdallah, président de l'ODC. Le responsable a, par ailleurs, mis l'accent sur l'absence d'études d'évaluation des saisons des soldes, précisant que l'ODC a recueilli un échantillon d'opinions des citoyens sur le degré de réussite des soldes en Tunisie. Il en ressort, a-t-il dit, une baisse du volume des achats du consommateur au cours de la période des soldes, expliquée, principalement, par l'affaiblissement du pouvoir d'achat de ce dernier. En ce qui concerne les problèmes de qualité des articles proposés pendant ladite saison, pour le président de l'ODC, il revient au consommateur de distinguer entre un article de bonne qualité et un autre qui ne l'est pas. «La rationalisation du comportement du consommateur est, à ce titre, l'un des rôles primordiaux de l'ODC», a-t-il rappelé. Une économie ouverte suppose des soldes «Les soldes périodiques sont une nécessité, étant donné que la Tunisie est passée, depuis l'année 1995, d'une économie fermée à une économie ouverte après la conclusion de l'accord de libre-échange avec l'UE», a fait remarquer Mehdi Abdelmoula, président de la Chambre syndicale nationale des chaînes de magasins d'habillement. D'après Abdelmoula, il est impossible de travailler dans une économie ouverte sans faire de soldes, appelant à la modernisation de l'activité économique, en s'inspirant des expériences des autres pays ayant une plus grande maturité économique et commerciale dans ce domaine. Et d'ajouter que la saison des soldes est désormais devenue une tradition pour le Tunisien, tant pour le commerçant qui va pouvoir écouler ses marchandises stockées et exposer la nouvelle collection que pour le consommateur qui profitera des prix réduits. Les soldes vus par les consommateurs Rencontrés dans l'un des centres commerciaux de Tunis, dont les différentes galeries sont touchées par le marasme économique qui frappe de plein fouet la Tunisie depuis 5 ans, des acheteurs se comptant sur les doigts de la main font leurs emplettes en déambulant au milieu de vitrines tristes et manquant d'animation. Interrogés sur les soldes en Tunisie, certains d'entre eux ont souligné, à la TAP, la vanité de ces réductions périodiques qui ne constituent pas, d'après eux, une opportunité, et ce, tant pour les consommateurs qui déplorent la mauvaise qualité des articles vendus au cours de cette période, que pour les vendeurs qui voient leurs stocks s'accumuler en raison de la crise qui pèse lourd sur le pouvoir d'achat du consommateur. Salma, aux vingt printemps, se dit insatisfaite des soldes en Tunisie, affirmant que «pendant cette période, les articles camelotes dominent sur le marché». «Les soldes en Tunisie sont incomparables avec ceux organisés à l'étranger..., tant aux plans qualité que prix...», a-t-elle regretté. Et d'ajouter: «à l'étranger, les soldes sont de vrais soldes... un article qui vaut 80 euros, je l'achète à 10 euros en période de remises». Les prix restent les mêmes Nadia, jeune fille tunisienne de 25 ans qui réside en Italie depuis 2 ans, a critiqué le comportement des commerçants tunisiens pendant les soldes. «Chaque saison de soldes, je fais un tour dans les boutiques et je constate que le prix des articles soldés reste le même que celui fixé avant les soldes... C'est pourquoi je préfère attendre la période des soldes en Italie qui dure environ deux mois pour faire de bonnes affaires», a précisé la demoiselle. Pour Ali, un commerçant âgé de 50 ans, les prix au cours de la période des soldes sont fictifs, soulignant l'importance d'intensifier le contrôle. Il a également critiqué le comportement des commerçants qui exposent pendant les soldes des articles soldés aux côtés d'autres qui ne le sont pas, provoquant la déception des acheteurs. Hanane, une jeune femme de 35 ans a affirmé, au contraire, tirer profit de la saison des soldes, disant qu'elle a confiance en certaines marques de prêt-à-porter, dont les articles sont de bonne qualité même pendant les soldes. Elle consacre ainsi un budget oscillant entre 400 et 500 dinars afin de faire des achats pour elle et ses deux enfants. Mourad (45 ans), s'est, pour sa part, écrié: «On copie l'Europe alors qu'on est différents aux plans social et économique». Propriétaire d'une boutique de prêt-à-porter, il a déclaré que «c'est une erreur d'introduire les soldes dans nos habitudes, cela ne constitue pas une faveur pour le commerçant dont les marchandises s'accumulent au courant de l'année vu la faiblesse du pouvoir d'achat du consommateur, l'acculant ainsi à les écouler pendant les périodes de soldes, dans l'espoir de voir affluer les acheteurs». Mourad, qui rangeait les chaussures de la nouvelle collection sur les étagères de sa boutique, a exprimé son inquiétude d'une telle situation. «Nous ne cherchons pas à réaliser des gains, mais plutôt à récupérer notre capital décaissé pour pouvoir payer les fournisseurs», s'est lamenté le jeune homme.