Actuellement, l'emploi des jeunes est le cheval de bataille du gouvernement. Après la série de protestations des jeunes chômeurs dans les régions défavorisées du pays, l'heure est au boulot pour offrir à cette jeunesse en furie un emploi permanent qui puisse garantir son avenir. Les plus brillants des jeunes diplômés n'ont aucun souci. Ils sont immédiatement recrutés par les entreprises publiques ou privées dès la fin de leurs d'études. Le problème se pose surtout pour les moins brillants souvent sans qualification et qui représentent la majorité. Ils attendent durant parfois 10 ans, voire plus, pour passer un concours ou un Capes leur permettant d'intégrer une institution publique avec un salaire stable. Aujourd'hui, il y a saturation dans la fonction publique. Alors, il reste l'initiative privée que redoute un grand nombre de jeunes. «Je ne fais confiance qu'aux institutions étatiques. La fonction publique, c'est comme on dit "un clou dans le mur". C'est plus rassurant d'avoir un salaire fixe», affirme Borhane, qui a passé plusieurs fois le Capes sans succès. D'autres jeunes pensent comme lui. Par contre, son frère cadet a réussi à réaliser son projet : une PME d'entretien automobile qui emploie cinq personnes grâce à un crédit BTS. Ces jours-ci, la crise de l'emploi est à son paroxysme. La Banque tunisienne de solidarité (BTS) fait son come-back avec un programme ambitieux. Créée en 1997, avec un capital auquel l'Etat participe à hauteur de 36%, elle offre des moyens de financement et la création de sources de revenus pour les personnes qui n'arrivent pas à réunir les ressources nécessaires ou à offrir les garanties suffisantes. Nouvelles mesures Elle constitue une alternative au système bancaire classique en finançant des micro-projets et micro-entreprises de jeunes promoteurs. «C'est la banque du peuple !», lance fièrement Khélifa Sboui, son P-dg. Face à la saturation dans la fonction publique (56.000 nouveaux emplois en 2015) et au handicap du secteur privé en raison de la conjoncture économique difficile et qui n'a pas encore retrouvé son élan, il existe une alternative, l'initiative personnelle. A ce titre, la BTS accordera 13.000 crédits au courant de l'année 2016 avec un budget de 156 millions de dinars. 14 régions de l'intérieur du pays : le Nord-Ouest (Béja, Jendouba, Le Kef, Siliana), le Centre-Ouest (Kasserine, Sidi Bouzid, Kairouan), le Sud (Gafsa, Kébili, Tozeur, Médenine, Tataouine, Gabès) et Zaghouan disposeront de crédits. 6.500 crédits pour chaque gouvernorat d'un montant de 470 millions de dinars. Les jeunes promoteurs qui veulent se lancer bénéficieront d'un crédit moyen de 12.000 à 28.000 dinars. Le plafond de crédit visant les micro-entreprises destiné aux diplômés du supérieur est de 150.000 dinars. «La BTS exige un apport financier personnel ou des garanties, ce dont on ne dispose pas, nous autres jeunes», déplore Anas, diplômé en design. La banque rassure les jeunes promoteurs que les garanties sont d'ordre moral, autrement dit qu'un membre de la famille doit appuyer l'initiative par des garanties. «Même cette mesure a été abandonnée vu les conditions de crise actuelles», annonce le P-dg de ladite banque. Désormais, aucune condition n'est émise pour l'obtention d'un crédit. (Communiqué du 25 janvier 2016). Exonération des droits fiscaux Se pose alors le problème des droits fiscaux. Une nouvelle mesure a été adoptée dans ce sens, qui consiste en l'exonération des contrats de prêts accordés par la BTS des droits d'enregistrement. L'exonération du droit d'enregistrement qui concernait les contrats de mariage, les contrats de micro-crédit et les contrats d'engagement de production agricole, concerne désormais aussi les contrats de prêts accordés par la BTS. Les bénéficiaires de prêts accordés par la Banque Tunisienne de Solidarité (BTS) seront exonérés du droit d'enregistrement des contrats à partir du 1er janvier, tel que stipulé dans la loi de finances de l'exercice 2015. Le ministère des Finances a indiqué dans un communiqué que cette mesure a pour but d'unifier les procédures fiscales relatives à l'enregistrement des contrats de petits crédits afin d'encourager les jeunes et les nouveaux promoteurs. Plus de 17.125 emplois ont été créés en 2015 et 19.300 sont prévus pour 2016. Cela signifie que les problèmes d'emploi de 19.000 familles sont résolus. Mais qu'est-ce qui fait que la crise persiste encore ? «Selon des études menées par la BTS, les emplois sont de l'ordre de 17.000 et nos estimations pour l'année en cours sont de 19.000. Le problème est que le diplômé bénéficie d'un crédit mais consacre son temps à passer des concours ou le Capes. Pour lui, le projet personnel est une solution provisoire. Il vise un poste dans la fonction publique. Ceci fait partie de la culture de l'initiative personnelle», estime Khélifa Sboui. L'initiative privée est donc requise ainsi que l'agrandissement du projet. «Le bénéficiaire peut profiter d'un autre crédit, à condition qu'il n'ait pas de dettes», ajoute-t-il. Fonction publique ou initiative personnelle Mais que faire de tous les diplômés n'ayant pas de qualification particulière ? En France, 70% travaillent dans des secteurs qui ne sont pas leur spécialité. En Tunisie, on compte deux catégories de diplômés : les diplômés qui ont une qualification professionnelle (technicien, ingénieur, médecin, etc.) et ceux ayant un diplôme en sciences humaines (histoire, géographie, philosophie, lettres, etc.). A ces derniers, il faut une formation dans un domaine technique, une formation complémentaire dans la gestion, etc. pour qu'ils puissent réussir à monter leur projet. «J'ai un diplôme en littérature arabe qui ne m'a servi à rien. Mes parents m'ont encouragée à suivre une formation. J'ai choisi la pâtisserie. J'ai obtenu un crédit de la BTS et aujourd'hui, je fabrique ma pâtisserie au fond de mon magasin et j'emploie 9 personnes», indique Sihem. Par ailleurs, la BTS dispose de conventions avec le ministère de l'Emploi et l'Agence d'emploi et du travail indépendant. Elle a donné des crédits de l'ordre de 114 millions de dinars en 2015. Ce sont de petits crédits pour de petits projets. Les nouvelles mesures consistent à accorder 13.000 crédits d'un montant de 176 millions de dinars, dont 50% pour les régions de l'intérieur. Le financement provient du Fonds d'amitié qatarie de 17 millions de dinars pour les régions de l'intérieur, la loi de finances complémentaire (60 millions de dinars) pour les 14 gouvernorats cités plus haut et 100 millions de dinars de la banque islamique de développement.