Par M'hamed JAIBI Au siège de l'Iace et à l'initiative de l'association Cercle Kheireddine, économistes, hommes d'affaires, syndicalistes, politiques et intellectuels associatifs ont débattu, hier, de l'actualité des relations de travail au sein de l'entreprise et de l'urgence d'un véritable dialogue prospectif à ce sujet. Le thème officiel de la conférence-débat : «Relations sociales et situation des entreprises en Tunisie» a permis, à la fois, de fêter les 50 ans du Code du travail et de revenir sur l'effervescence sociale et l'impératif d'un apaisement stratégique des tensions. Le débat a été dirigé par le syndicaliste Mohamed S'himi, suite aux conférences introductives de Hatem Kotrane et Nafaâ Ennaïfer. Un contexte de tensions Dans un contexte de tensions sociales aiguës venant prolonger un bras de fer sur les salaires qui a saigné l'Etat, premier employeur du pays, la réflexion à propos du Code du travail et sur les évolutions qu'il gagnerait à connaître pour être à l'heure des mutations profondes que vit la production économique et qu'impose la mondialisation prend l'allure d'un puzzle inextricable qui dévie pour donner à considérer la faiblesse cumulée montrée par l'Etat depuis la révolution. En France, même les socialistes veulent réformer leur Code du travail vers plus de souplesse et de mobilité, comme facteurs concurrentiels et atouts de compétitivité. Chez nous, les syndicats rêvent de réduire le temps de travail, de prolonger la durée des congés, d'abaisser l'âge de la retraite et d'imposer un droit de regard sur la gestion de l'entreprise. Concilier flexibilité et sécurité de l'emploi Sachant qu'en l'absence de représentants officiels de l'Ugtt, Habib Guiza, patron de la centrale Cgtt, reconnaît l'exigence des réformes en un «deux-en-un» qui puisse concilier flexibilité, sécurité des emplois et modernisation : «Flexisécurité». Présent à titre personnel en tant qu'invité, le ministre des Affaires sociales a dû monter au créneau pour «rétablir les faits», ce qui s'est résolu à défendre l'Ugtt en tant que premier syndicat du pays, apportant ainsi une note d'optimisme. Pour Mahmoud Ben Romdhane, si l'on excepte le climat préélectoral prévalant ces semaines-ci à la centrale, les cadres de l'Union sont acquis au modèle participatif nordique et à la paix sociale. Le pessimisme de l'Utica En regard, le dirigeant Utica, Nafaâ Ennaïfer, s'est déclaré spécialement pessimiste, évoquant les fermetures d'usines provoquées par les excès du syndicalisme. Pour l'homme d'affaires, il est clair que ce sont les éléments les plus radicaux et les «incontrôlables» qui dament sans faute le pion aux syndicalistes raisonnables pourtant majoritaires. Hatem Kotrane a, pour sa part, relevé les faiblesses, les incohérences et les anachronismes de notre Code du travail. Le professeur de droit a rappelé les évolutions des législations internationales en la matière et les objectifs tracés en termes de travail décent et de l'élaboration d'un «contrat social» qui sache étendre la démocratie au domaine économique et social. Promouvoir dialogue social et promotion sociale D'où le souci de l'Etat, signataire de nombreuses conventions internationales à ce sujet, de promouvoir le dialogue social et la promotion sociale. Et Kotrane d'appeler à responsabiliser les partenaires sociaux et à ne plus se contenter de la rédaction des conventions mais de réglementer les détails du processus de la négociation et de la compréhension mutuelle. Afin de dépasser l'uniformisation des conventions et des contrats d'un secteur à l'autre, pour prendre en considération les spécificités des divers secteurs et des domaines d'activité multiples. Et notamment les particularités du secteur des services.