Par Abdelkader KACEM* Depuis la nuit des temps, deux questions majeures attendent encore des solutions appropriées. Il s'agit de la quête humaine des gains matériels et la manière de partager les fruits de la croissance. Ces deux éléments impactent tous les rapports politiques, économiques, financiers et sociaux d'une nation. L'histoire a apporté des réponses constructives, mais parfois imparfaites. Les parties en désaccord reviennent à la charge dans le temps pour dénoncer les excès des solutions inadaptées et demandent encore le réexamen des situations en vue d'une solution plus appropriée dite «intégrée». Une telle solution serait, d'après les experts, équitable car elle donne satisfaction aux parties définitivement. Ça serait le cas pour résoudre notamment la fixation des prix des biens et des services, des taux d'intérêts et des commissions, des niveaux des salaires et des revenus, des impôts et des prélèvements obligatoires, des cours de changes et des droits de douane, etc. La résolution de ces problèmes se traduit par une croissance soutenue et une stabilité durable. Les solutions partiales, qui désavantagent les uns par rapport aux autres, ne sont que provisoires, car elles sont coûteuses et causent des frustrations durables qui alimentent les tentions au risque d'éclater de nouveau lorsque les contextes changent. Il existe théoriquement quatre possibilités de solutions, à savoir l'évitement, la domination, le compromis et l'intégration. Seule, la dernière est en mesure, en principe, de résoudre les problèmes définitivement. Cela s'applique dans toutes les relations humaines : politiques, professionnelles, sociales, familiales, éducatives, etc. Grâce aux discussions, les systèmes économiques et politiques ont apporté des réponses proches des intérêts des populations. Les propositions des économistes de renom ont été impactées par les milieux dans lesquels ils évoluent. Les classiques disent que les choses trouvent l'équilibre naturellement du fait de la «main invisible», les communistes ont cherché à satisfaire les demandes, chacun selon ses besoins, les capitalistes ont favorisé les détenteurs de capitaux, chacun selon ses capacités, et les libéraux ont privilégié les règles des marchés (offres- demandes) pures et parfaites. D'un point de vue pratique, la dernière serait la meilleure, car elle permet l'atteinte d'objectifs plus ambitieux en rapport à l'évolution favorable des indicateurs de développement d'ensemble. Mais, malheureusement, les règles des marchés optimales se trouvent elles-mêmes faussées et manipulées par des volontés malintentionnées, des spéculateurs, des fraudeurs, etc. faute d'une morale contraignante suffisante dans un système globalisé et mondial. Le contexte Parmi les indicateurs cités au paragraphe II, cherchant l'amélioration d'une approche adaptée afin de déterminer le meilleur niveau rémunération-prix pour favoriser les affaires, sources d'emploi, de croissance et de stabilité, nous choisissons de développer celui des revenus-salaires, car il répond plus particulièrement aux préoccupations des partenaires sociaux-professionnels, aujourd'hui à la recherche d'un compromis en vue d'une croissance nationale optimisée. En fait, généralement, lorsque le travailleur constate l'amélioration de ses revenus et de son bien-être du fait d'une baisse des coûts de consommation ou d'une augmentation de salaire et des avantages sociaux, il se trouve que son employeur constate naturellement la même chose pour ses affaires. L'impact économique (à la hausse ou la baisse) est généralement parallèle. Réellement, lorsque la rentabilité de l'entreprise progresse, dans un contexte favorable, le chef d'entreprise devient plus généreux. Et se rend compte qu'il a tout intérêt à encourager les collaborateurs qui ont été à l'origine de ses revenus florissants en augmentant leurs salaires et autres avantages sociaux. L'entreprise fonctionne comme la nature lorsqu'elle est prometteuse, elle serait généreuse et donnerait de bons fruits qui se vendent bon marché. A contrario, lorsque les choses vont mal en temps de crise, l'entreprise économique serait la première à subir les coups en rencontrant les difficultés avant que le salarié ne constate la détérioration de son niveau de vie par l'augmentation des coûts de ses besoins de tous les jours. Dans le contexte actuel difficile, notamment, l'entreprise subie une double évolution défavorable du fait du développement croissant des technologies et des concurrences soutenues. Malheureusement, dans ce contexte les choses deviennent paradoxales entre un travailleur qui demande des améliorations pour favoriser son pouvoir d'achat et une entreprise qui gagne moins. La compréhension partagée des parties est de nature à souder les affaires, surpasser les difficultés et maintenir les activités et les emplois durablement. Le maintien des entreprises et le développement de la production et des innovations sont favorisés par leurs rapports antérieurs cordiaux (humains, sociaux et professionnels) et les gestes réciproques (reconnaissance, motivation, implication, etc.). Plus le chef d'entreprise et ses managers sont proches de leurs collaborateurs, sensibles à leurs préoccupations et soucieux de leurs problèmes, mieux les travailleurs comprennent leur patron, soutiennent la production, investissent des efforts et résistent aux difficultés qu'ils rencontrent ensemble. Lorsque les paramètres économiques (concurrence, cours de change, prix, assistance), financiers (crédit, taux d'intérêt, impôts), sociaux (grèves, salaires, rendements) et pour un degré moindre culturels (formation, lieu de loisirs, etc.) ne sont pas favorables aux affaires, aucune entreprise, quels qu'en soient la taille, les réserves, le secteur et la nation, n'est en mesure de résister et payer des salaires même à un niveau très faible. La vie d'une entreprise n'est pas isolée de l'environnement dans lequel elle évolue. L'entreprise est perçue comme une source de richesse qui fait des profits et donne espoir aux travailleurs. Mais, on ignore souvent qu'elle est très fragile, qu'elle peu subir des pertes, qu'elle gagne souvent peu de profit, qu'elle est sous la menace permanente des faillites, qu'elle court des risques, qu'elle s'endette pour financer ses investissements et que les affaires nécessitent le soutien de tout leur environnement interne et externe. Réellement, on mesure l'intérêt d'une entreprise lorsqu'on ne trouve pas un travail, ou un bien et un service, indispensable disponible sur le marché. Economiquement l'entreprise profite à tout son environnement. Elle absorbe le chômage, elle paye des impôts locaux et nationaux, elle favorise les exportations, elle participe à l'équilibre des comptes extérieurs, elle contribue à la baisse des prix, elle couvre les besoins des populations, elle favorise la croissance, elle contribue au bien-être des citoyens, etc. Bref, elle contribue à la fierté de la nation. Dans un monde globalisé et libéral, lorsque les affaires vont bien en interne, les investisseurs étrangers sont tentés de monter des projets en mesure de créer beaucoup d'emplois en faveur des populations locales. La réussite des investissements nationaux est interprétée à l'extérieur comme le signe d'un environnement global favorable avec des paramètres encourageants qui incitent aux affaires (travailleurs qualifiés, productivité élevée, logistique fluide, crédit facile, taux d'intérêt faible, cours de change favorable, fiscalité abordable, droit de douanes non contraignants, population accueillante, relation respectueuse, culture ouverte, stabilité assurée, etc.). Par contre, une image défavorable avec des indicateurs économiques et financiers en baisse, des grèves à répétition, une productivité en recul et un climat social tendu font simplement un mouvement inverse des investissements et des personnes. Cela pousse même les investisseurs nationaux à fuir leur pays. Les atouts de la Tunisie Notre pays, intègre et respectueux des autres, a la chance d'être accessible par la mer Méditerranéenne à travers 1.200 km, se situant à une heure de l'Europe et au sommet de l'Afrique avec une population ouverte, équilibrée, studieuse et collaboratrice avec les autres. Il a construit des relations étendues, à travers l'histoire, avec ses voisins proches et lointains du monde entier, qui lui assurent aujourd'hui et toujours un soutien indéfectible dans les temps les plus difficiles. La Tunisie est en mesure, du fait de sa position géographique et ouverture sur le monde, de construire réellement des échanges gagnant-gagnant fructueux et respectueux de tous à l'avantage de l'Afrique proche et du reste du monde. Les possibilités d'avenir de notre pays s'annoncent florissantes. Nous avons des unités industrielles productives offrant de grandes possibilités d'emploi, de diversification, de croissance et de commercialisation, actuellement très peu exploitées. Elles pourraient être beaucoup mieux rentabilisées. L'agriculture nationale respectant l'environnement est capable de produire des délices à bon prix très recherchés à travers le monde entier. Elle profite beaucoup à l'extérieur. Elle ne demande que l'arrêt des constructions anarchiques et l'encouragement des bonnes mains de nos exploitants agricoles pour la soigner. Ceux-ci attendent simplement des prix équitables, des encouragements pour la transformation de la production, un soutien technique et financier pour développer les exploitations. Le tourisme demande le soutien des populations pour une meilleure sécurité et un accueil chaleureux et respectueux des visiteurs. Au plan commercial, toutes nos entreprises nécessitent d'intégrer le digital pour faire connaître leurs productions, recevoir les commandes rapidement et vendre dans le monde entier au moindre coût. Les infrastructures respectueuses des populations couvrent l'ensemble du territoire national : éducation, soins, administration, logistiques, etc. Elles ne demandent qu'à être préservées et exploitées judicieusement. Les possibilités d'amélioration Les capacités productives de tous les secteurs économiques de la Tunisie, actuellement peu exploitées, peuvent être multipliées sans beaucoup d'investissement matériel additionnel. Il convient simplement d'intégrer dans notre culture le besoin d'améliorer en continu notre travail de tous les jours, de soigner la qualité, de respecter les clients, de considérer les personnes en rapport avec les professions, de promouvoir les exportations en s'adaptant aux besoins des autres et de tenir les promesses. La formule japonaise du cercle de qualité serait très bien adaptée. Aujourd'hui, nous pouvons appuyer notre compétence d'ensemble à travers la culture personnelle permanente, la lecture, le digital et la formation virtuelle très accessible en plus de la formation initiale à l'université classique. De leur côté, les universités gagneraient à mieux encadrer nos étudiants pour les initier suffisamment à la création des affaires et l'acceptation des risques. Les parcours éducatifs personnels cherchant à apporter un meilleur service aux entreprises doivent être facilités et appuyés pour encourager les initiatives et améliorer la qualité. La productivité, l'innovation et la qualité seraient les principaux éléments de divergence avec les entreprises puissantes étrangères. Ils nous appartient de réduire l'écart progressivement au moyen d'un intérêt additionnel aux professions par les travailleurs, d'une formation continue généralisée comme en Allemagne, d'une production sans cesse améliorée, d'un service après vente rapide pour fidéliser les clients, analyser constamment le retour sur expérience pour tirer les leçons, mettre en place de meilleures conclusions et évoluer, etc. Pour impliquer davantage les travailleurs, il faut discuter périodiquement des problèmes, des objectifs et des moyens, responsabiliser, mettre en place des moyens adaptés pour leur permettre d'évoluer et d'atteindre leurs objectifs. Nous pensons que des concours internes et externes seraient l'un des moyens pour se qualifier et occuper les fonctions méritées quels que soient les niveaux d'étude. La responsabilisation et le pouvoir professionnel gagnent à privilégier les compétences les mieux au point pour éviter la démotivation pénalisante. Ce faisant, les autres comprennent et cherchent à suivre les exemples. L'équilibre à retrouver Dans les discussions employeurs-employés, deux questions sont récurrentes et demandent des solutions pour assurer l'évolution des rendements, l'amélioration de la qualité et la fidélisation des clients. Premièrement, la question des salaires. Celle-ci nécessite une solution intégrée qui tienne compte périodiquement de la réalisation des objectifs et de la rentabilité des affaires. Cela revient à évaluer la présence effective du travailleur, sa productivité, la qualité des services rendus, sa collaboration avec les autres et ses investissements culturels impactant la profession. Ces éléments doivent déterminer l'ajustement des rémunérations en fonction de la rentabilité effective de l'affaire annuellement. Deuxièmement, la responsabilisation, nous pensons qu'il serait profitable aux parties de désigner en cas de vacances de postes les personnes qui apportent la meilleure compétence-rendement. Car généralement, aujourd'hui, c'est pas toujours le cas. Cela constitue un exemple à méditer qui ne peut normalement rencontrer d'opposition de la part des collaborateurs. Une telle pratique généralisée aura des effets d'entraînement constructifs sur l'activité et les rapports professionnels. Ces éléments réduisent les pertes de temps, dans des discussions qui coûtent cher, et auraient un impact positif sur les travailleurs et leur entreprise. Parallèlement aux droits des travailleurs, nous pensons qu'il faut mettre en place un règlement approprié qui amène les collaborateurs défaillants à s'acquitter de leurs devoirs-responsabilités et soutenir les efforts de l'entreprise et de la nation. Le silence aux dépassements est contagieux et impacte négativement les autres collaborateurs et pénalise en définitive l'ensemble des affaires et des emplois. Au final, nous souhaitons que l'ensemble des Tunisiens mesurent, à juste titre, la chance d'avoir un emploi stable, comprennent les difficultés économiques du pays, se rendent compte des déficits de l'Etat, restent lucides, ouverts et oublient leurs divergences dans ce contexte difficile, plus particulièrement. Qu'on se serre avec force et détermination les coudes pour appuyer durablement la poursuite des affaires, la marche de notre pays vers la solidarité, la croissance, la sécurité et le plein emploi. Nous souhaitons l'appui du monde et de tous nos partenaires étrangers pour soutenir encore et toujours notre jeune démocratie, à la faveur d'une coopération renforcée et d'une concorde améliorée de nature à préserver les générations de la délinquance et favoriser une stabilité favorable à tous. *(Cadre bancaire retraité)