Dans le sillage des 11 communes ayant adopté l'approche de gestion participative, Ben Arous, mégalopole d'environ 75 mille habitants, vient d'intégrer dans son prochain budget communal les projets choisis et décidés par ses citoyens pour l'exercice 2017. Cela a, bel et bien, figuré à l'ordre du jour de la dernière assemblée de la délégation spéciale de la région. En fait, l'initiative émane de « l'Action associative », une organisation de la société civile nationale, dont l'appui apporté à la cité a été favorablement apprécié. Depuis sa création, cette ONG s'est fixé pour objectif la bonne gouvernance locale sur la base de l'approche participative, faisant du citoyen l'axe et la finalité de toute œuvre de développement. Ainsi se matérialise la démocratie citoyenne, et la décentralisation aussi. De par cette proximité, le citoyen se sent fortement impliqué dans la chose publique. Un partenaire à part entière. Ses idées, ses propositions et ses perceptions de son environnement immédiat peuvent l'ériger en maître chez soi. Sa réflexion au devenir de sa municipalité est révélatrice d'un souci d'évolution et de révolution culturelle, d'un intérêt majeur pour son action au quotidien. Son adhésion, volontaire, à la prise de décisions le concernant compte ainsi beaucoup, dans la mesure où il détient son pouvoir en main. Il aura à suivre et superviser la marche des projets, de la conception à la concrétisation. Et puis, il se réserve, alors, le droit d'agir et de réagir, en connaissance de cause. Dans cette logique citoyenne, la municipalité de Ben Arous avait, déjà, consacré la moitié de ses fonds d'investissement propres au budget participatif 2017, permettant, ainsi, à la population locale de décider des nouveaux projets de proximité : chaussées, trottoirs, éclairage public et embellissement de la ville. Voire, toutes les commodités nécessaires à un cadre communal, où il fait bon vivre. Chiffres à l'appui, le tout avec un montant à hauteur d'un million 725 mille dinars, soit 50% de son prochain budget global. Ceci étant, alors, qualifié de deuxième plus grand budget ouvert à la décision citoyenne en Tunisie, après celui de Sfax en 2015. Projets de proximité ! Ainsi, l'expérience avait bien commencé l'été dernier : formation de la population et sa répartition en quatre zones géographiques dont chacune regroupe un nombre de quartiers. Leurs résidents ont eu à proposer et voter pour des idées des projets d'intérêt général. Il a été, aussi, question d'élire leurs délégués représentants. M. Ahmed Ben Nejma, coordinateur du projet à l' « Action associative » est, on ne peut plus, précis : « quelque 476 citoyens participants, 40 projets d'infrastructure retenus et 12 délégués de quartiers élus ». Pour bien implémenter son expérience, ajoute-t-il, la commune de Ben Arous s'est engagée, dans la limite de ses capacités de financement du reste du 50% de son budget, à accorder une priorité aux projets votés et qui n'ont pas été décidés par les délégués de quartiers. Et partant, Ben Arous rejoint les 11 municipalités qui ont réussi à appliquer le processus du budget participatif en Tunisie. Sfax, la Marsa, Ettadhamen, Le Kef, Sbeitla, Raoued, Tozeur, La Manouba, Gafsa, Gabes et Menzel Bourguiba, ces communes ont, d'ailleurs, donné l'exemple. Une telle expérience vaut bien la peine d'être généralisée. Reste que les prochaines échéances régionales ne devraient pas tarder. Car, à force de les reporter sans délais, tout risque de basculer. Budget participatif Pris à témoins, les habitants ont manifesté une grande satisfaction, donnant la preuve d'une vraie conscience collective citoyenne.., fait valoir M. Seifallah Cherif, président de la délégation spéciale de Ben Arous. Et d'en déduire, à ce niveau : « les collectivités locales méritent de travailler avec autant d'instruments de démocratie locales efficaces et durables ». Ce qui permettra de rétablir les relations de confiance avec les citoyens et impacter positivement le rythme d'avancement des projets de développement locaux, admet le secrétaire général de la municipalité concernée, M. Kamel Louhichi. Mais, qu'est-ce qu'un budget participatif ? « C'est un processus de démocratie participative dans lequel des citoyens peuvent affecter une partie du budget de leur collectivité territoriale, généralement à des projets d'investissement », a-t-on appris d'une définition universelle. Née en 1989 à Porto-Alegre au Brésil, cette innovation démocratique s'est ainsi diffusée à travers le monde. M. Kouraich Jaouahdou, président de l'organisation « Action associative», semble être au parfum. D'ailleurs, c'est lui le chef d'orchestre qui a veillé au lancement, depuis 2014, du mécanisme du budget participatif dans plusieurs municipalités tunisiennes. D'après lui, le travail municipal constructif et moderne se base sur cet instrument de gestion des affaires locales dit « Budget Participatif », et ce, dans des milliers de communes dans le monde. Et de souligner qu'il est, aujourd'hui, urgent de former et d'encourager l'ensemble des municipalités tunisiennes à y adhérer, mais surtout à veiller à son application correcte et exemplaire. A ce point, il y aura beaucoup à faire. M. Jaouahdou trouve qu'une telle expérience constitue un appel à M. Riadh Mouakher, ministre des Affaires locales et de l'Environnement, pour en prendre soin. A lui d'en juger, dans le sens d'aller de l'avant sur la voie d'une véritable démocratie locale digne de ce nom.