La présidente de l'IVD, Sihem Ben Sédrine, a été convoquée par l'ARP pour s'expliquer sur les griefs qui lui sont reprochés, mais elle a opposé une fin de non-recevoir à la demande de l'Assemblée Mohamed Ennaceur, le président de l'Assemblée des représentants du peuple et le père du dialogue social en Tunisie, est convaincu que le dialogue et rien que le dialogue est la solution la plus indiquée pour sortir le pays de sa crise et réussir «le moment historique que nous vivons tous». Quel bilan faites-vous de la précédente session parlementaire ? Il est un fait indéniable, c'est que nous avons maintenant un Parlement réellement pluraliste où plusieurs sensibilités politiques coexistent dans un climat d'échange et de dialogue continu. Tous les députés, quelle que soit leur appartenance, ont droit à la parole, à la proposition, à la critique et au contrôle de l'action du gouvernement. Nous sommes en train d'instaurer de nouvelles traditions du «vivre ensemble». Volet bilan, la dernière session parlementaire a connu une évolution notable avec l'adoption de 86 lois contre 45 seulement au cours de la première session. Ce qui traduit une amélioration du rendement grâce à de meilleures conditions de travail et à une logistique qui répond aux exigences de l'action législative. Les membres du bureau de l'ARP et des groupes parlementaires disposent, désormais, de bureaux fonctionnels et bien équipés. Nous avons conscience que l'Assemblée n'est pas uniquement une «fabrique» de lois, mais elle doit, également, agir sur le cours des événements que vit le pays. Quelle est votre conception des rapports entre l'ARP et le gouvernement ? L'ARP constitue un espace de collaboration interactive avec le gouvernement et nous avons toujours privilégié le dialogue à la confrontation. Le partenariat que nous entretenons avec le gouvernement n'exclut pas le droit à la divergence de points de vue. Ainsi l'Assemblée n'est ni un espace de conflit avec le pouvoir exécutif, ni un espace où les députés avalisent systématiquement les options gouvernementales. Comment vous allez procéder pour améliorer les méthodes de travail ? Nous avons, d'ores et déjà, procédé à une opération d'autoévaluation du rendement des députés. Dans ce contexte, l'ARP va organiser des journées parlementaires vers la deuxième quinzaine du mois de novembre prochain. Au cours de ces journées, les participants vont se pencher sur l'examen des trois axes suivants : le rôle législatif à l'Assemblée, la mission de contrôle de l'action gouvernementale, quelles procédures et quels mécanismes et la représentation du peuple ou comment le député doit se comporter en tant que représentant de sa région ou en tant que représentant de la nation. Ces journées devraient être couronnées par un programme d'action pour concrétiser la nouvelle approche de l'ARP en vue de la concrétisation de sa part de responsabilité dans le processus démocratique. D'autre part, une académie sera mise en place et a pour missions de : 1. Moderniser l'action législative par l'amélioration des capacités et des connaissances des députés et des cadres de l'institution parlementaire. 2. Optimiser la logistique, c'est-à-dire l'ensemble des méthodes et conventions de rédaction des textes normatifs. Ce qui permettra aux députés de mieux maîtriser les techniques de légifération. L'ARP s'est dotée d'une équipe d'experts pluridisciplinaires (droit, finance, fiscalité...) qui seront mis à la disposition des différentes commissions dans le but de les aider à produire des textes conformes aux normes. 3. Instaurer de nouvelles méthodes de communication interne et externe pour améliorer l'image de l'institution parlementaire auprès du grand public et instaurer la confiance entre le citoyen et le député. 4. Renforcer la fonction de contrôle de l'action gouvernementale. Quelle nouvelle conception de la politique de proximité ? L'ARP est consciente de l'importance particulière des régions dans la vie nationale. Chaque député dispose d'une semaine par mois pour s'investir dans sa région et de s'y informer sur les préoccupations de ses concitoyens. En plus de cela, l'ARP va se pencher davantage sur le renforcement du développement dans les régions. Ainsi elle envisage de consacrer des séances plénières aux préoccupations des concitoyens dans les différentes régions en présence du gouvernement. Des représentants de l'administration régionale et de la société seront conviés à ces mêmes séances. Vous êtes intervenu ces derniers jours pour apaiser la tension sociale en recevant successivement le secrétaire général de l'Ugtt et la présidente de l'Utica. Quelle issue pour cette crise ? Je suis parfaitement conscient de la gravité de la situation que connaît le pays. Une situation marquée par une crise économique, sociale et financière. La tension entre le gouvernement, d'une part, et l'Ugtt, de l'autre, a jeté son ombre sur la scène nationale. Eu égard aux bons rapports qui m'ont toujours lié à la Centrale syndicale et ses dirigeants, je suis intervenu pour dissiper le malentendu entre les deux parties et rapprocher les vues en les invitant à reprendre le dialogue autour des questions qui fâchent. Le gouvernement était tenu par une contrainte constitutionnelle et devait, par conséquent, transmettre le projet de loi de finances pour l'année 2017 au plus tard le 15 octobre, ce qui fut fait. Entretemps, il a envoyé une correspondance officielle au bureau exécutif de l'Ugtt l'invitant à revenir à la table des négociations. Mais cette correspondance est parvenue après la publication du communiqué de la Centrale syndicale. De toute façon, le dialogue n'a jamais été rompu entre les deux parties et il reste la seule voie passante. J'ai confiance qu'on arrivera à un accord qui satisfera tout le monde et préservera les intérêts supérieurs de la nation. J'estime qu'il y a une conscience partagée que nous vivons un moment historique, avec M. majuscule et que nous sommes condamnés à opter pour le dialogue et rien que le dialogue pour résoudre tous nos problèmes. L'Instance vérité et dignité (IVD) s'enfonce dans une crise qui semble sans fin. Des démissions et des révocations la menacent d'implosion. Qu'attend l'ARP, autorité de tutelle, pour intervenir ? L'ARP a écrit au mois de mars 2016 à la présidente de l'IVD lui demandant de lui faire parvenir les demandes de démission des membres, mais sa lettre est restée sans suite. Un rappel a été envoyé en juin et ce n'est qu'en août, en pleines vacances parlementaires, que la réponse est parvenue au bureau de l'ARP. Nous avons tenu une réunion mercredi 19 octobre pour examiner le remplacement de membres démissionnaires, mais, en raison de l'absence des représentants de tous les groupes parlementaires, les membres de la commission de tri ont décidé de reporter le choix de la date de dépôt des dossiers de candidature pour les postes vacants au sein de l'Instance vérité et dignité (IVD). Une nouvelle réunion a été convoquée pour jeudi 27 octobre afin de statuer sur cette question de remplacement. Envisagez-vous d'auditionner la présidente de l'IVD sur les griefs qui lui sont reprochés par les membres démissionnaires et «démissionnés» de l'Instance ? Une demande d'audience a été présentée à l'ARP par deux membres, Lilia Bouguira et Mustapha Baâzaoui avant leur révocation. Ils furent reçus par les présidents des groupes parlementaires. Suite à cela, la présidente de l'IVD, Sihem Ben Sédrine, a été convoquée par l'ARP pour s'expliquer sur les griefs qui lui sont reprochés, mais elle a opposé une fin de non-recevoir à la demande de l'Assemblée. Cela ne va pas nous empêcher de la convoquer de nouveau pour l'auditionner, en attendant son passage devant l'ARP pour la discussion du rapport annuel des activités dont nous avons reçu une copie. Interview réalisée conjointement par La Presse et Espacemanager