«Donnez à un homme un poisson, et il aura à manger pour une journée, apprenez à un homme à pêcher, et il aura à manger toute sa vie» «La masse salariale ne doit pas dépasser les 40% du budget», c'est ce qui a été décidé par la dernière assemblée générale extraordinaire de la FTF. Très bien, mais de quel budget parle-t-on ? Quelle est l'équipe qui dispose d'un vrai budget et auquel elle s'en tient ? Si un budget est théoriquement composé de recettes et de dépenses, comment le présenter si presque toutes les rubriques sont meublées par des chiffres virtuels ? Quelle est l'équipe qui sait où aller dès le début de saison et qui est assurée de ne dépenser que ce qu'elle est capable d'avoir en caisse ? Soyons sérieux : il suffit que l'un ou l'autre veuille tirer le tapis sous les pieds de celui d'en face pour que les milliards voltigent ! Ce plafonnement est sans doute une décision prise dans l'urgence et alors que la majorité des clubs est dans une situation catastrophique. Même la «subvention» d'aide au fonctionnement que le ministère de la Jeunesse et des Sports a versée aux clubs a été saisie par la Cnss qui exige la régularisation de la situation de ces clubs avec la Caisse. Sur intervention de la FTF et de la tutelle, il a été décidé de verser les dix pour cent du dû et de fixer un échéancier pour le reste de la dette. Un certain nombre de clubs ont régularisé leur situation, alors que d'autres n'ont pu le faire parce que ne disposant pas de cette somme et ne sont même pas capables de payer...5% de leurs dettes. Et on veut légiférer pour poser des garde-fous ! Dans quelle mesure peut-on faire confiance à ces clubs qui sont malheureusement pris dans un tourbillon étourdissant, et duquel il leur sera extrêmement difficile de s'en extirper. La spirale des dettes enfle et les sources de financement s'assèchent, mal servies par une conjoncture économique difficile. Et même si ce n'était pas le cas, le statut et la gestion de ces clubs ne sauront leur garantir la pérennité. Au vu du professionnalisme que nous pratiquons, les dés sont pipés dès le départ, encouragé par une fédération et une tutelle qui ne font rien pour mettre en place une véritable réglementation régissant le professionnalisme d'une façon générale, parce que le football n'est pas le seul en cause. Une reprise en main qui s'impose et qui sera de nature à mettre un terme à cette navigation à vue qui ne mène nulle part. Qui osera le faire ? On ne peut exiger de clubs, actuellement non viables, parce que sans ressources propres et fixes, de redevenir amateurs et de pratiquer leur sport sans les soucis quotidiens qui leur empoisonnent la vie. L'exiger serait perdre des voix et se retrouver à la prochaine assemblée hors des murs du Temple... S'empresser de concevoir un statut convenant à un club véritablement professionnel risquerait de voir des supporters, qui n'ont rien compris, descendre dans la rue pour bloquer toute décision ne convenant pas à leurs couleurs... Le problème est donc là et non ailleurs. Le président de la FTF ou la ministre peuvent intervenir cette fois-ci, mais que feront-ils la prochaine fois ? Comment pourront-ils inviter les clubs à résorber les milliards de déficit qui finiront par les détruire ou au moins les mettre à la merci du bailleur de fonds qui risque un jour ou l'autre de partir, lassé par ce tonneau des Danaïdes qui engloutit même leurs plus secrets espoirs. Et c'est là qu'il nous semble plus opportun de réunir tout ce beau monde et de lui dire la vérité, tout en commençant par lui raconter l'histoire du poisson chinois. L'Etat n'a pas à subventionner des activités professionnelles, qui, en fin de compte, ne rapportent rien au citoyen qui paie cet argent mal géré. Un plateau d'éducation physique dans une école primaire, un collège, un lycée ou une faculté, une salle couverte afin que nos filles et garçons puissent s'entraîner convenablement, du moins décemment, des gants de boxe, des tatamis de judo, des tapis de lutte, des embarcations, des canoës, des fleurets en nombre suffisant et tout ce matériel qui fait défaut à des disciplines capables d'imposer le sport tunisien et sur lesquelles nous pouvons compter, des vestiaires pour se mettre en tenue à l'abri du froid et de la pluie, une piscine qui pourrait accueillir des milliers d'enfants, sont beaucoup plus rentables que ces clubs professionnels qui ne le sont que sur le papier. Ces clubs professionnels ont, certes, parfaitement le droit de s'activer, mais dans la limite de leurs moyens et en respect des règlements en vigueur. Ils se doivent de devenir un facteur d'enrichissement pour le sport national et non pas un boulet que la communauté nationale est obligée de traîner sans fin. Au lieu de décider d'un «plafonnement», on ferait mieux de mettre en place les statuts et les règlements régissant le vrai professionnalisme, viable, adapté à nos moyens, à notre économie, à notre pays, parce que ce genre de bricolage ne mène à rien. Il est improductif, trompeur et dangereux. Ce football «professionnel» mal organisé risque de détruire toutes les autres disciplines qui l'imitent sans garde-fous. En attendant cette décision vitale, nous avons encore perdu une année ! Au fait, quand les services des impôts commenceront-ils à s'intéresser à ce qui se passe dans ce milieu ?