Chawki Tabib, président de l'Inlucc, appelle à l'institutionnalisation de la coordination entre les différentes structures de lutte contre la corruption «Nous avons franchi de grands pas dans l'élaboration d'un cadre législatif pour la lutte contre la corruption, mais nous manquons encore de textes d'application», a lancé, hier, le président de l'Instance nationale de lutte contre la corruption (Inlucc), Chawki Tabib, à l'occasion de l'ouverture des travaux de la deuxième session du congrès national de lutte contre la corruption. Chawki Tabib a salué, lors de son intervention, l'adoption des lois sur la lutte contre la corruption, dont notamment celle relative au droit d'accès à l'information, et celle sur la dénonciation de la corruption et la protection des dénonciateurs. «Néanmoins, l'application de ces lois reste tributaire de l'élaboration des textes d'application», a-t-il déploré, rappelant la nécessité d'élaborer, le plus tôt possible, le texte d'application de l'activation des instances concernées par la lutte contre la corruption. Une large part de ce congrès sera réservée à l'examen du rapport d'activités de 2016 mais, aussi, à l'examen des projets de loi adoptés durant la période précédente, a affirmé Tabib, qui estime que la lutte contre la corruption fait également appel à l'amendement du code pénal. D'après lui, l'amendement du Code pénal a pour but de faciliter le travail des magistrats loin des pressions législatives et factuelles. Chawki Tabib a, en outre, fait appel à l'institutionnalisation de la coordination entre les différentes structures de lutte contre la corruption. Selon lui, il faudrait que toutes les instances et structures concernées par la lutte contre la corruption travaillent au sein d'un même établissement. Il a, par ailleurs, salué les efforts de l'Assemblée des représentants du peuple dans la mise en place d‘un cadre législatif, soulignant la position de l'instance par rapport à certaines lois, dont notamment la loi relative à la lutte contre la corruption et celle relative à la déclaration de patrimoine. L'Inlucc avait affirmé, auparavant, que certains articles des lois portant création de l'Instance contre la corruption et de déclaration de patrimoine sont contraires à la Constitution. Volonté politique De son côté, le représentant résident du Pnud et coordinateur du système des Nations unies, Diego Zorilla, a salué la campagne anticorruption lancée, en mai dernier, à l'initiative du gouvernement. Cette campagne traduit, a-t-il dit, une volonté politique forte et engagée dans la stratégie de lutte contre la corruption. Il a estimé que ce congrès constitue une opportunité pour réaffirmer l'engagement des institutions nationales, mais également internationales, dans la lutte contre la corruption. Diego Zorilla a salué, par la même occasion, le rôle de l'ARP dans la lutte contre la corruption à travers l'élaboration du cadre législatif nécessaire. «La Tunisie se distingue par l'élaboration de lois capables de faciliter la lutte contre la corruption et par les avancées remarquables qu'elle a réalisées en une courte période», a-t-il ajouté, rappelant la détermination des Nations Unies à soutenir les efforts de la Tunisie dans son combat contre la corruption. Le président de l'Assemblée des représentants du peuple, Mohammed Ennaceur a, pour sa part, affirmé que la lutte contre la corruption nécessite, en plus des textes de loi, de rassembler les efforts de toutes les institutions de l'Etat, dont la justice et la sécurité dans le cadre d'un système complet et d'une stratégie nationale. La corruption, a-t-il estimé, est capable de compromettre les reformes engagées dans les sociétés. C'est pourquoi, il est aujourd'hui primordial que la lutte contre la corruption soit une priorité nationale qui concerne toutes les composantes de la société, a-t-il ajouté. La lutte contre la corruption doit, selon Ennaceur, être associée a une stratégie prometteuse. «Elle nécessite des plans efficaces, basés sur un cadre législatif pertinent et concrétisés d'une manière ferme», a-t-il affirmé, soulignant que l'ARP est en train d'examiner, en commissions, des projets de loi relatifs à la lutte contre la corruption, dont le projet de loi sur la lutte contre l'enrichissement illicite en plus de quatre initiatives législatives déposées par des députés. Assistent à ce congrès de deux jours (8 et 9 décembre) des délégations de plusieurs pays dont l'Indonésie, la Palestine, la Roumanie, l'Egypte et le Maroc, ainsi que des activistes de la société civile de toutes les régions de la Tunisie, des ambassadeurs et des responsables des différents établissements tunisiens concernés. Ce congrès est organisé avec l'appui de l'Agence coréenne de coopération internationale (Koica) et du Programme des Nations unies pour le Développement (Pnud). Il a pour but de faire le point sur la première année de mise en œuvre de la stratégie nationale de bonne gouvernance et de lutte contre la corruption et de son plan opérationnel (2017-2018) adoptés le 9 décembre 2016 ainsi que la présentation des résultats et des avancées réalisés au niveau des îlots d'intégrité (santé, douane, municipalité et police). Chawki Tabib : «La Tunisie n'est pas un paradis fiscal» Le président de l'Instance nationale de lutte contre la corruption (Inlucc), Chawki Tabib, a déclaré que la Tunisie n'est pas un paradis fiscal et n'est en aucun cas un pays hospitalier de l'argent sale. Il a jugé «injuste» le classement de la Tunisie par l'Union européenne dans la liste d'Etats qui, selon eux, «ne font pas le nécessaire pour lutter contre l'évasion fiscale». Si la Tunisie avait été vraiment un paradis fiscal, nous n'aurions pas eu de crise économique, a-t-il dit. Au contraire, nous aurions profité sur le plan économique et financier comme c'est le cas pour bien d'autres pays qui sont de véritables paradis fiscaux et qui n'ont même pas été mentionnés dans le classement, a déploré Chawki Tabib. Pour lui, ce classement atteste bien de l'existence d'«un système international obéissant à une logique communautaire de favoritisme et de lobbying», relevant, toutefois, que «le système tunisien est, en partie, responsable de cette situation. Toutes les institutions doivent coordonner et unir leurs efforts en vue de lutter contre la corruption, renforcer la transparence et améliorer l'image de la Tunisie à l'étranger, a-t-il préconisé. Selon Tabib, il y aura un grave impact sur notre économie et sur l'image de la Tunisie en tant que destination pour les investisseurs étrangers si d'ici janvier prochain la Tunisie figure encore dans ce classement. Rappelons que les ministres européens des Finances ont validé, le 5 décembre 2017, une liste comportant 17 paradis fiscaux, tous extérieurs à l'UE: la Tunisie, les Samoa, les Samoa américaines, l'île de Guam, le Bahreïn, Grenade, la Corée du Sud, Macao, les Iles Marshall, la Mongolie, la Namibie, les Palaos, Sainte-Lucie, Trinité et Tobago, les Emirats arabes unis, Panama et la Barbade. Soixante associations participent à une exposition en marge du congrès Soixante associations actives dans le domaine de la lutte contre la corruption ont participé hier à l'exposition « forum de la société civile « organisée en marge de la deuxième session du congrès national de lutte contre la corruption. L'exposition a été organisée avec l'appui du Programme des Nations unies pour le développement et L'Agence coréenne de coopération internationale (Koica). Dans une déclaration à l'agence TAP, la chargée de communication du projet Tamkeen du Pnud, Chirine Ben Abdallah, a indiqué que parmi ces associations, 36 bénéficient d'un financement et d'un accompagnement technique de la part du Pnud. Les autres associations travaillent en collaboration avec l'Instance nationale de lutte contre la corruption. Les associations exposantes sont actives dans le domaine du renforcement de la redevabilité sociale, de la lutte contre la corruption et de la bonne gouvernance. Elles œuvrent au renforcement de la transparence et l'accès à l'information et ont pour objectif de rétablir la confiance des Tunisiens dans les institutions de l'Etat. Des applications mobiles et des bases de données ont été développées par ces associations afin de faciliter le signalement des cas de corruption et de fixer les priorités du développement pour chaque région en fonction des secteurs.