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Une déferlante appelée vandalisme
Patrimoine
Publié dans La Presse de Tunisie le 07 - 03 - 2018

Grand émoi, ces derniers jours, après les actes de vandalisme qui ont pris pour cible le site antique récemment mis au jour fortuitement au lieu-dit Kastilya, dans le périmètre communal de la localité de Dégache, dans le gouvernorat de Tozeur. La fouille de sauvetage menée par les chercheurs de l'Institut national du Patrimoine (INP) a fait l'objet d'une ample couverture médiatique dans la mesure où le site dégagé comprend, entre autres vestiges, ceux d'un lieu de culte chrétien, apparemment une basilique remontant à l'époque byzantine ainsi que sa sacristie. Outre sa dimension historique qui nous renseigne sur une page relativement peu connue de l'histoire du pays et de la région, cette découverte vient enrichir l'offre touristique culturelle du Jérid qui peine à retrouver ses marques suite à la crise persistante qui a été amorcée dès avant 2011. Menée parfois avec emphase et force superlatifs par des médiateurs à court de scoops et, surtout, de formation en matière de communication scientifique, cette même couverture médiatique n'aura probablement pas manqué de susciter la convoitise de « chercheurs de trésors » en quête de l'« aubaine » de leur carrière de pillards professionnels.
La « recherche du trésor » est un sport depuis longtemps pratiqué à l'échelle de tout le pays. Des réseaux s'étaient même constitués, composés de fouilleurs clandestins qui sévissaient sur leurs propres terrains — des « henchirs » — lorsque ceux-ci comprenaient des vestiges non répertoriés, en particulier des nécropoles antiques, et qui opéraient également sur les sites mineurs et isolés. Le fruit de leurs récoltes était écoulé auprès de « gacharas », des brocanteurs spécialisés qui écumaient l'arrière-pays et qui sévissaient en toute impunité grâce à des accointances locales, petits chefaillons administratifs et autres agents corrompus de la Garde nationale. A son apogée, dans les années 90-2000, ce trafic a même été investi par certains membres des puissants clans des Trabelsi et des Ben Ali qui n'hésitaient pas, outre les moyens sophistiqués tels les détecteurs de métaux, à recourir à l'artillerie lourde : pelleteuses pour dégager les remblais et trucks pour déplacer les gros blocs de pierre taillée. La « marchandise » ainsi récupérée était par la suite écoulée dans le milieu, relativement restreint, des amateurs locaux, mais surtout à l'étranger via d'autres circuits, y compris la valise diplomatique. Les antiquaires des grandes capitales occidentales proposent ainsi aux riches collectionneurs pièces de monnaie antiques en bronze, en argent et même en or, amulettes, statuettes et autres bijoux, articles aussi précieux que facilement dissimulables.
Du moins tout cela était-il plus ou moins « organisé » et les appétits dévorants des uns et des autres ainsi que la défense des « chasses gardées » contribuaient-ils à limiter la casse aux seules castes installées. Après 2011, ce sport s'est démocratisé. Tout le monde s'y livre avec frénésie à la faveur du relâchement général qui prévaut dans le pays ces dernières années et qui autorise tous les dépassements, y compris en matière de sauvegarde du patrimoine. Fouilles clandestines, mainmise sur des terrains archéologiques pour les bâtir à usage d'habitation et même réaménagement d'espaces de culte classés en tant que monuments historiques, sans compter le saccage pur et simple d'un certain nombre d'entre eux sous prétexte de déviance religieuse.
Le couvert religieux
Ce qui est nouveau dans cette vague, c'est l'intrusion du couvert religieux dans cette vaste entreprise de démantèlement du patrimoine. De véritables commandos barbus et en tenue afghane se sont répandus partout pour, ici, se livrer à la chasse au trésor dans l'espoir de financer leurs menées subversives, là, dévaster des locaux de célébrations mystiques (zaouias) sous prétexte de lutte contre des pratiques « païennes », et ailleurs, réaménager des lieux de culte classés pour leur valeur historique ou pour leurs particularités architecturales, comme la mosquée Fadhloun, à Djerba, véritable joyau de l'architecture sacrée, défigurée par l'érection d'un mur d'enceinte et de nouveaux espaces pour accueillir un nombre accru de fidèles.
Cette déferlante continue de sévir et l'actualité ne cesse de charrier des nouvelles concernant de nouveaux actes de vandalisme ou la saisie par les agents de l'ordre ou de la douane d'objets en provenance de divers sites archéologiques ou historiques. Dans une déclaration faite à l'agence TAP, le directeur général de l'Institut national du Patrimoine a estimé à plus de 22.000 les pièces saisies provenant d'opérations de contrebande. Mais ce n'est là que la partie visible de l'iceberg, car pour une pièce saisie combien d'autres échappent aux statistiques, d'autant que ces prises sont, dans la plupart des cas, le fait du hasard, sauf aux frontières où la douane fait montre d'une vigilance particulière. Au demeurant, une cellule en charge des objets saisis a été créée au sein de l'INP. Elle a pour mission, entre autres, la coordination avec les douanes tunisiennes et la réalisation de tests d'urgence nécessaires dans le cas d'affaires où sont impliqués des étrangers, des voyageurs ou des personnes en transit sur les frontières tunisiennes. Pour le reste, il faut s'en remettre au hasard d'un contrôle de routine ou à de rares dénonciations.
La « chasse au trésor » sur les sites antiques est une pratique aussi vieille que la civilisation. Nous savons que dans l'Antiquité, déjà, les sépultures des prédécesseurs étaient violées dans le but de récupérer les riches parures des défunts de marque. C'est ainsi que plusieurs pyramides avaient été visitées bien avant les archéologues dans les temps modernes. Alors, comment faire face au phénomène qui va grossissant ?
Il est évident que, devant le nombre et la dispersion des sites et monuments, il n'est pas question de contrôler l'ensemble du territoire. L'armée n'y suffirait pas. Par contre, on pourrait considérablement limiter les dégâts si l'on parvenait à impliquer les populations locales dans la surveillance de leur patrimoine et sa défense. La sensibilisation et l'encadrement des enseignants ainsi que des élèves partout dans le pays (sous forme de clubs d'histoire et de camps archéologiques, comme cela se pratique depuis longtemps de l'autre côté de la Méditerranée) pourraient y contribuer puissamment. Une telle entreprise ne manquerait pas d'avoir des retombées sur l'ensemble de la population et cela se traduira par un rétrécissement de la marge de manœuvre des trafiquants.
Les médias ont également une responsabilité en amont et en aval de cette réalité. Certains reportages (en particulier à la télévision) qui, à propos de patrimoine archéologique ou historique, parlent dans un style lyrique de « trésors » ou de « richesses » inestimables alimentent un imaginaire collectif déjà nourri des phantasmes ancestraux de la caverne d'Ali Baba. Dans les années 80, une malheureuse reconstitution de la découverte, en bord de mer, d'une cruche contenant des pièces d'or d'époque romaine avait provoqué une « ruée vers le trésor » dévastatrice dans des dizaines de sites antiques. Les communicateurs ont, eux aussi, besoin d'être sensibilisés et encadrés afin qu'ils diffusent un discours responsable qui mette en évidence la véritable richesse du patrimoine, c'est-à-dire sa valeur documentaire et sa dimension économique en tant que facteur de développement grâce au tourisme.


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