Une partie du centre de protection des personnes âgées a été aménagée en resto du cœur La stratégie de promotion sociale se fonde dans notre pays sur des constantes essentielles tendant à garantir la justice sociale et à consolider l'esprit de solidarité nationale. On peut constater cette approche au cours de ce mois de Ramadan où la convivialité est très importante. Dans le gouvernorat de Kairouan à titre d'exemple, le charme inégalé du mois saint consiste, d'une part, à mêler le profane et le sacré, d'autre part à renforcer le partage, l'hospitalité et la solidarité, surtout au moment de l'iftar qui répand chaque soir son bonheur indélébile au sein de tous les foyers. En effet, les familles aisées viennent en aide aux plus nécessiteux en leur offrant des repas à la rupture du jeûne. En outre, un grand nombre d'associations et d'ONG dont les scouts s'emploient à organiser durant le mois du carême des tables de rupture du jeûne et à distribuer des couffins remplis de denrées alimentaires. Par ailleurs, la commission régionale de solidarité sociale relevant de l'Utss a distribué 1.400 aides en nature au profit des familles à faible revenu, sachant que chaque colis comporte des produits alimentaires d'une valeur de 75D. D'autres aides dont des vêtements et des chaussures seront offertes à 500 familles démunies, et ce, durant la deuxième quinzaine de Ramadan. A côté de cela, l'Utss a aménagé deux restaurants d'iftar au profit de 200 personnes dans le besoin sans oublier celles qui préfèrent rompre le jeûne chez elles et qui sont au nombre de 100. Lundi 21 mai, 5e jour du mois de Ramadan, à 19h20, les rues de Kairouan sont presque désertes et silencieuses. C'est à ce moment précis que nous pénétrons dans les locaux du Centre de protection des personnes âgées aménagés en un resto de cœur par le comité régional de solidarité sociale de Kairouan. Partout des guirlandes, des drapeaux, des banderoles souhaitant la bienvenue à tous les convives et des tables installées sous de grandes tentes et joliment recouvertes de très belles nappes. A la télévision, on passe les Ibtihalet. Au total, 6 responsables, dont Adnen Essid, le trésorier régional de la commission de solidarité sociale, Bilel Kefi, le directeur du centre et Faouzi Azouz, l'économe, veillent à ce que les hôtes du resto bénéficient de prestations de bon niveau dans une ambiance de cohésion sociale. On retrouve parmi eux des personnes âgées, sans soutien familial, des veuves, des laissés-pour-compte, des familles à très faibles revenus et des handicapés. Au menu, une salade tunisienne, une chorba frik, du riz à l'agneau, un brik à l'œuf et, enfin, une banane pour le dessert. Mongi Aribi (73 ans), le dos un peu voûté et le visage bouffi, nous confie : «Au passé, nous avons beaucoup souffert de la marginalisation. Notre vie était lourde comme une pierre et notre existence était austère. Que de frustrations avons-nous vécues dans l'attente d'un événement quelconque, d'une aide providentielle. Mais aujourd'hui, grâce à la nouvelle politique sociale, nos conditions deviennent dignes et humaines, surtout lors des fêtes religieuses et du mois saint...» Ourida Louzi, 69 ans, et qui arborait une veste gris clair qui soulignait sa maigreur, renchérit : «Ici, dans ce resto, on nous gâte énormément et on se sent en famille. D'ailleurs, les cuisinières et les ouvrières sont aux petits soins de tous les convives. Personne ne juge personne, et c'est important pour nous car, à notre âge, on devient très sentimental...» A travers toutes les tables, l'ambiance était chaleureuse et les commentaires allaient bon train. Tous les bénéficiaires de cette table de la fraternité souriait. Leurs yeux brillaient. Chacun reconnaissait sur le visage de ses voisins sa propre condition, sa propre certitude. Une heure plus tard, tout le monde quitte la vaste cour en emportant la collation du s'hour, à savoir des yaourts, du lait, des cakes et du pain. Et c'était le tour des ouvrières de tout nettoyer et de laver la vaisselle.