La libre circulation pour les professionnels tunisiens (sans visa) au même titre que les Européens et la mise à niveau du secteur agricole, afin qu'il puisse résister à la concurrence étrangère, parmi les plus importantes recommandations tunisiennes C'est aujourd'hui que s'achève le 2ème round des négociations Tunisie-Union européenne sur l'Aleca (Accord de libre-échange complet et approfondi), un processus qui fait suite à l'Accord d'association bilatéral signé en 1995. Soit, 23 ans de relations de coopération nord-sud, permettant à la Tunisie d'accéder au statut de partenaire avancé. Dans toute la force du terme, cette évolution des échanges est censée entretenir de bons rapports commerciaux et favoriser un climat d'affaires nettement productif. Et les deux parties auraient dû passer à l'action, mais la zone de libre-échange, tant souhaitée, a, en fait, un goût d'inachevé. Depuis, beaucoup d'eau a coulé sous les ponts, sans rien voir venir. Les négociations à ce sujet ont repris, lundi dernier, dans le cadre de l'Aleca. Le débat fut lancé, bien avant trois ans, avec pour mot d'ordre au préalable des privilèges au profit de la Tunisie. Autrement dit, il sera appliqué une démarche asymétrique et progressive qui devra tenir compte de son économie fragile et non concurrentielle pour ne pas voir le marché local crouler sous l'emprise des flux grandissants des marques et produits européens au détriment de ceux tunisiens. Quant au secteur agricole, encore sous-développé, il subira, le premier, les contrecoups. Pis, plus de 90% de nos agriculteurs ne savent rien, semble-t-il, du contenu de l'Aleca. Un chiffre surprenant, incroyable. Mais, les récentes déclarations du négociateur en chef de l'Aleca, Hichem Ben Ahmed, également secrétaire d'Etat au Commerce extérieur, faites à l'ouverture de ce 2ème round, ont tenu à le confirmer. Il y aura un suivi, en concertation notamment avec les structures syndicales et professionnelles du secteur dont l'Utap. De son côté, le syndicat national des agriculteurs a souligné l'importance d'une mise à niveau du secteur, afin qu'il puisse résister à la concurrence étrangère. Pour lui, il est tout autant nécessaire d'évaluer les résultats d'un partenariat tuniso-européen établi en matière agricole pendant plus de 50 ans. La société civile unanime Autre point à l'ordre du jour, la mobilité des personnes d'une manière libre et sans conditions. Dans ce sens, négociateurs officiels et société civile semblent catégoriques sur la suppression des visas, l'espace Schengen devant être ouvert aux fournisseurs de services et à tous les professionnels concernés par l'Aleca. Mais, la partie européenne ne l'entend pas de cette oreille. Pour l'heure, la libre circulation des personnes est toujours soumise à des raisons sécuritaires. Et peut-être, est-ce une question de temps. Toujours est-il que les raisons sécuritaires invoquées sont injustifiables car, un tel accord de libre-échange complet et approfondi ne peut être, en aucun cas, unilatéralement gagnant. Mariage de la carpe et du lapin, pour ainsi dire. Quoi qu'il en soit, notre pays doit être traité comme un partenaire à part entière et non pas un simple client commercial, comme avait bien insisté l'ancien ministre du Commerce, Ridha Lahoual lors du premier round des négociations. Sinon, la société civile aura son mot à dire. Elle n'a jamais été aussi unanime sur les risques que pourrait faire courir un tel accord bancal. Dès le départ, un collectif associatif, regroupant Ftdes, Ugtt, Ltdh, Réseau Destourna et bien d'autres activistes, avait crié haro sur cet Aleca si controversé. D'autres économistes et experts financiers n'ont cessé de le qualifier de catastrophique. M. Lassâad Dhaouadi, économiste, virulent opposant, disait que son contenu s'apparente à celui du traité du Bardo, signé en 1881, donnant ainsi lieu au protectorat français sur la Tunisie. Son application risque de faire perdre 40% de nos entreprises industrielles, dit-on. Pour d'autres, l'Aleca s'inscrit dans le prolongement de l'Accord d'association Tunisie-UE et donc ne va pas changer la situation. Sauf plus d'endettement, de chômage et de démantèlement tarifaire à caractère industriel.